L’idéologie transgenre est truffée de contradictions. Voici les plus importantes. (par Ryan T. Anderson)

Tra­duc­tion d’un article publié, en anglais, le 9 février 2018, à l’a­dresse sui­vante : https://www.heritage.org/gender/commentary/transgender-ideology-riddled-contradictions-here-are-the-big-ones


D’aucuns pré­tendent que nous vivons à l’âge de la post­mo­der­ni­té et du rejet de la méta­phy­sique. Ce n’est pas tout à fait vrai. La post­mo­der­ni­té pro­meut une méta­phy­sique alter­na­tive. Comme je l’ex­plique dans mon livre When Har­ry Became Sal­ly [« Quand Har­ry devint Sal­ly », livre cen­su­ré par Ama­zon, NdT], au cœur du mou­ve­ment trans­genre se trouvent des idées radi­cales sur l’être humain — en par­ti­cu­lier, l’idée selon laquelle les gens sont ce qu’ils pré­tendent être, quelles que soient les preuves du contraire. Un gar­çon trans­genre serait donc un gar­çon, et pas seule­ment une fille qui s’i­den­ti­fie comme un garçon.

La rai­son pour laquelle les mili­tants pro­fèrent ce genre d’assertion est évi­dente. Un argu­ment sur la tran­si­den­ti­té sera beau­coup plus convain­cant s’il porte sur qui est un indi­vi­du, et pas seule­ment sur la façon dont il s’i­den­ti­fie. Ain­si, la rhé­to­rique trans­genre dégou­line-t-elle d’af­fir­ma­tions onto­lo­giques : les gens sont le sexe qu’ils pré­fèrent être. Telle est l’affirmation.

Les mili­tants trans­genres refusent d’admettre qu’il s’a­git d’une affir­ma­tion méta­phy­sique. Et afin que le débat ne se situe pas sur le plan phi­lo­so­phique, ils le pré­sentent comme une reven­di­ca­tion scien­ti­fique et médi­cale. De nom­breuses asso­cia­tions pro­fes­sion­nelles sont déjà acquises à leur cause.

Ain­si, dans une bro­chure inti­tu­lée « Réponses à vos ques­tions sur les per­sonnes trans­genres, l’i­den­ti­té de genre et l’ex­pres­sion de genre », l’A­me­ri­can Psy­cho­lo­gi­cal Asso­cia­tion écrit : « Trans­genre est un terme géné­rique pour les per­sonnes dont l’i­den­ti­té de genre, l’ex­pres­sion de genre ou le com­por­te­ment n’est pas conforme à celui typi­que­ment asso­cié au sexe qui leur a été assi­gné à la nais­sance. » Remar­quez le choix des mots : le sexe d’une per­sonne est « assi­gné à la nais­sance ». En 2005, même la Human Rights Cam­pai­gn par­lait plu­tôt de « sexe de nais­sance » et de « sexe physique ».

L’ex­pres­sion « sexe assi­gné à la nais­sance » est désor­mais pri­vi­lé­giée parce qu’elle ouvre la voie à « l’i­den­ti­té de genre » comme base réelle du sexe d’une per­sonne. Dans une décla­ra­tion d’ex­pert adres­sée à un tri­bu­nal fédé­ral de dis­trict de Caro­line du Nord concer­nant le H.B. 2, le Dr Dean­na Adkins a décla­ré : « D’un point de vue médi­cal, le déter­mi­nant appro­prié du sexe est l’i­den­ti­té de genre. » Adkins est pro­fes­seure à la facul­té de méde­cine de l’u­ni­ver­si­té Duke et direc­trice du Centre de Duke pour les soins de genre des enfants et des ado­les­cents (Duke Cen­ter for Child and Ado­les­cent Gen­der Care) qui a ouvert en 2015.

Adkins sou­tient que l’i­den­ti­té de genre est non seule­ment le moyen de base per­met­tant de déter­mi­ner le sexe, mais aus­si « le seul déter­mi­nant du sexe approu­vé médi­ca­le­ment ». Toute autre méthode relè­ve­rait d’une mau­vaise science, affirme-t-elle : « Il est contraire à la science médi­cale d’u­ti­li­ser les chro­mo­somes, les hor­mones, les organes repro­duc­teurs internes, les organes géni­taux externes ou les carac­té­ris­tiques sexuelles secon­daires pour sup­plan­ter l’i­den­ti­té de genre dans le but de clas­ser quel­qu’un comme homme ou femme. »

Il s’a­git d’une affir­ma­tion remar­quable, notam­ment parce que, jusqu’ici, le genre était consi­dé­ré comme une construc­tion sociale, tan­dis que le sexe était consi­dé­ré comme une réa­li­té bio­lo­gique. Aujourd’­hui, les mili­tants affirment que l’i­den­ti­té de genre est une des­ti­née, tan­dis que le sexe bio­lo­gique est une construc­tion sociale.

Adkins ne dit pas si elle appli­que­rait cette règle à toutes les espèces de mam­mi­fères. Mais pour­quoi le sexe devrait-il être déter­mi­né d’une cer­taine manière chez les humains, et d’une autre chez les autres mam­mi­fères ? Et si la science médi­cale consi­dère que l’i­den­ti­té de genre déter­mine le sexe chez l’être humain, que cela signi­fie-t-il concer­nant l’utilisation des médi­ca­ments ayant des effets dif­fé­rents sur les mâles et les femelles ? Le dosage appro­prié d’un médi­ca­ment dépend-il du sexe ou de l’i­den­ti­té de genre du patient ?

Et qu’est-ce, au juste, que cette « iden­ti­té de genre » cen­sée être le véri­table déter­mi­nant médi­cal du sexe ? Adkins la défi­nit comme « le sen­ti­ment inté­rieur d’une per­sonne d’ap­par­te­nir à un genre par­ti­cu­lier, tel que mâle ou femelle ». [Mâle et femelle sont des sexes, pas des genres, mais la confu­sion est sys­té­ma­tique chez ces idéo­logues, NdT] 

Notez le « tel que », qui sug­gère que les options ne se limitent pas néces­sai­re­ment à mâle ou femelle. D’autres mili­tants admettent plus volon­tiers que l’i­den­ti­té de genre ne doit pas se limi­ter au choix binaire entre homme ou femme, mais peut inclure les deux ou aucun. L’A­me­ri­can Psy­cho­lo­gi­cal Asso­cia­tion, par exemple, défi­nit « l’i­den­ti­té de genre » comme « le sen­ti­ment interne d’une per­sonne d’être un homme, une femme ou autre chose ».

Adkins affirme que le fait d’être trans­genre n’est pas un trouble men­tal, mais sim­ple­ment « une varia­tion nor­male du déve­lop­pe­ment ». Elle affirme en outre que les pro­fes­sion­nels de la méde­cine et de la san­té men­tale spé­cia­li­sés dans le trai­te­ment de la dys­pho­rie de genre sont d’ac­cord avec ce point de vue.

Catéchisme transgenre

Ces idées sur le sexe et le genre sont désor­mais ensei­gnées aux jeunes enfants. À cet effet, des mili­tants ont conçu des gra­phiques pour enfants, tels que la « Per­sonne Gin­genre ». La « Per­sonne Gin­genre » enseigne aux enfants qu’en matière de sexua­li­té et de genre, les humains pos­sèdent cinq carac­té­ris­tiques dif­fé­rentes, cha­cune d’entre elles cor­res­pon­dant à un spectre.

Il y a d’abord l’« iden­ti­té de genre », qui désigne « la façon dont vous défi­nis­sez votre genre dans votre tête, en fonc­tion de votre ali­gne­ment (ou non) sur ce que vous consi­dé­rez comme les options en matière de genre ». L’in­fo­gra­phie énu­mère « 4 (par­mi une infi­ni­té) » pos­si­bi­li­tés d’i­den­ti­té de genre : « femme », « homme », « bi-spi­ri­tuel » ou « inter­genre » [aus­si appe­lé « gen­re­queer » ou « queer­genre » en fran­çais, NdT].

La deuxième carac­té­ris­tique est « l’ex­pres­sion du genre », qui désigne « la manière dont vous mani­fes­tez votre genre, à tra­vers vos actions, votre habille­ment et votre com­por­te­ment ». En plus de « fémi­nin » ou « mas­cu­lin », les options sont « butch », « fem », « andro­gyne » ou « neutre ».

La troi­sième carac­té­ris­tique, le « sexe bio­lo­gique », cor­res­pond aux « carac­té­ris­tiques sexuelles à votre nais­sance et pen­dant votre crois­sance, incluant les organes sexuels, la forme du corps, le ton de la voix, la pilo­si­té, les hor­mones, les chro­mo­somes, etc. »

Les deux der­nières carac­té­ris­tiques concernent l’o­rien­ta­tion sexuelle : « atti­rance sexuelle envers » et « atti­rance émo­tion­nelle envers ». Les options com­prennent « femmes/féminine/féminité » et « hommes/masculin/masculinité ». Ce qui semble plu­tôt binaire.

La Per­sonne Gin­genre situe ces cinq carac­té­ris­tiques à dif­fé­rents endroits du corps : l’i­den­ti­té de genre dans le cer­veau, l’at­ti­rance sexuelle et émo­tion­nelle dans le cœur, le sexe bio­lo­gique dans le bas­sin, et l’ex­pres­sion de genre partout.

L’image ci-des­sus cor­res­pond à la ver­sion 3.3 de la Per­sonne Gin­genre. Elle incor­pore des ajus­te­ments effec­tués en réponse aux cri­tiques des ver­sions pré­cé­dentes. Cepen­dant, elle conti­nue de vio­ler le dogme actuel. Cer­tains mili­tants se sont plaints du fait que la Per­sonne Gin­genre semble trop mas­cu­line. Plus grave encore, d’autres mili­tants déplorent l’u­ti­li­sa­tion de l’ex­pres­sion « sexe bio­lo­gique ». Le Time s’est atti­ré des cri­tiques pour la même trans­gres­sion en 2014 après avoir publié un pro­fil de Laverne Cox, la « pre­mière per­sonne ouver­te­ment trans » à figu­rer en cou­ver­ture du pres­ti­gieux magazine.

Au moins, les gens du Time ont eu le mérite d’es­sayer d’être « de bons alliés, en expli­quant ce que beau­coup consi­dèrent comme une ques­tion com­pli­quée », a écrit Mey Rude dans un article inti­tu­lé « Il est temps pour les gens d’ar­rê­ter d’u­ti­li­ser la construc­tion sociale du “sexe bio­lo­gique » pour défendre leur trans­mi­so­gy­nie ». (Il est dif­fi­cile de suivre l’é­vo­lu­tion du moment transgenre).

Mais le Time a été jugé cou­pable d’u­ti­li­ser « une com­pré­hen­sion sim­pliste et dépas­sée de la bio­lo­gie pour per­pé­tuer des idées très dan­ge­reuses sur les femmes trans­genres », et de ne pas recon­naître que le sexe bio­lo­gique « n’est pas quelque chose avec lequel nous nais­sons réel­le­ment, c’est quelque chose que les méde­cins ou nos parents nous assignent à la naissance ».

Aujourd’­hui, les « alliés » trans­genres en règle n’u­ti­lisent pas la Per­sonne Gin­genre dans leurs classes, mais optent pour la « licorne du genre », créée par Trans Student Edu­ca­tio­nal Resources (« une asso­cia­tion basée aux États-Unis qui cherche à mettre fin à la dis­cri­mi­na­tion à l’en­contre de l’i­den­ti­té de genre et de l’ex­pres­sion de genre dans l’é­du­ca­tion »). La forme de son corps ne res­semble ni à un homme ni à une femme, et plu­tôt qu’un « sexe bio­lo­gique », elle pos­sède un « sexe assi­gné à la naissance ».

Ce sont là les prin­ci­paux chan­ge­ments appor­tés à la Per­sonne Ginenre, afin que le nou­veau gra­phique « repré­sente plus fidè­le­ment la dis­tinc­tion entre le genre, le sexe assi­gné à la nais­sance et la sexua­li­té ». Selon l’association Trans Student Edu­ca­tion Resources, « le sexe bio­lo­gique est un mot ambi­gu qui n’a ni échelle ni signi­fi­ca­tion, si ce n’est qu’il est lié à cer­taines carac­té­ris­tiques sexuelles. Il est éga­le­ment pré­ju­di­ciable aux per­sonnes trans. Nous pré­fé­rons par­ler de “sexe assi­gné à la nais­sance” qui consti­tue une des­crip­tion plus pré­cise de ce que “sexe bio­lo­gique” tente peut-être d’exprimer. »

Autre ver­sion (fran­çaise) de la licorne du genre.

La licorne du genre est le gra­phique que les enfants sont sus­cep­tibles de ren­con­trer à l’é­cole. Il leur pré­sente les dogmes du caté­chisme trans­genre qu’ils sont encou­ra­gés à apprendre.

D’un côté, les mili­tants affirment que les pos­si­bi­li­tés d’i­den­ti­té de genre sont plu­tôt éten­dues (homme, femme, les deux, ni l’un ni l’autre) ; de l’autre, ils pré­tendent éga­le­ment que l’i­den­ti­té de genre est innée, ou éta­blie à un très jeune âge, et par la suite immuable.

Le Dr George Brown, pro­fes­seur de psy­chia­trie et trois fois membre du conseil d’ad­mi­nis­tra­tion de l’As­so­cia­tion pro­fes­sion­nelle mon­diale pour la san­té des trans­genres (WPATH, World Pro­fes­sio­nal Asso­cia­tion for Trans­gen­der Health), a affir­mé, dans sa décla­ra­tion à la cour fédé­rale de Caro­line du Nord, que l’i­den­ti­té de genre « est géné­ra­le­ment éta­blie tôt dans la vie, vers l’âge de 2 ou 3 ans ».

S’a­dres­sant au même tri­bu­nal, Adkins a affir­mé que « les preuves sug­gèrent for­te­ment que l’i­den­ti­té de genre est innée ou fixée à un jeune âge et que l’i­den­ti­té de genre a une base bio­lo­gique solide ». (Dans toute sa décla­ra­tion d’ex­pert, elle ne cite pas la moindre source pour une seule de ses affirmations).

Contradictions transgenres

Si les affir­ma­tions pré­sen­tées dans cet essai vous semblent dérou­tantes, vous n’êtes pas seul. La pen­sée des mili­tants trans­genres est intrin­sè­que­ment confuse et truf­fée de contra­dic­tions internes. Les acti­vistes ne recon­naissent jamais ces contra­dic­tions. Au lieu de cela, ils choi­sissent de manière oppor­tu­niste l’affirmation qui les arrange au moment opportun.

Je parle ici des acti­vistes trans­genres. La plu­part des per­sonnes qui souffrent de dys­pho­rie de genre ne sont pas des acti­vistes, et beau­coup d’entre elles rejettent les reven­di­ca­tions des mili­tants. Beau­coup d’entre elles peuvent être consi­dé­rées comme des vic­times des mili­tants, ain­si que je le montre dans mon livre. Beau­coup de celles et ceux qui sont mal à l’aise avec leur sexe savent qu’ils ne sont pas vrai­ment du sexe oppo­sé, et ne sou­haitent pas de « tran­si­tion ». Ils sou­haitent qu’on les aide à s’i­den­ti­fier à leur corps afin de l’ac­cep­ter. Ils ne pensent pas que leur dys­pho­rie de genre défi­nisse la réalité.

Mais les mili­tants trans­genres le pensent. Qu’ils s’i­den­ti­fient comme « cis­genres » ou « trans­genres », ces mili­tants défendent une vision du monde hau­te­ment sub­jec­tive et inco­hé­rente. D’une part ils affirment que le vrai soi dif­fère du corps phy­sique, dans une nou­velle forme de dua­lisme gnos­tique, mais d’autre part ils embrassent une phi­lo­so­phie maté­ria­liste dans laquelle seul le monde maté­riel existe. Ils affirment que le genre est une pure construc­tion sociale, tout en affir­mant qu’une per­sonne peut être « pié­gée » dans le mau­vais genre.

Ils affirment qu’il n’existe pas de dif­fé­rences signi­fi­ca­tives entre l’homme et la femme, mais s’ap­puient sur des sté­réo­types sexuels rigides pour affir­mer que « l’i­den­ti­té de genre » est réelle, cepen­dant que l’in­car­na­tion humaine ne l’est pas. Ils pré­tendent que la véri­té est ce que n’importe quelle per­sonne dit qu’elle est, mais pensent qu’il y a un vrai soi à décou­vrir à l’in­té­rieur de cette personne.

Ils pro­meuvent un indi­vi­dua­lisme expres­sif radi­cal dans lequel les gens sont libres de faire ce qu’ils veulent et de défi­nir la véri­té comme ils l’en­tendent, mais tentent inexo­ra­ble­ment de for­cer l’adhésion à l’i­déo­lo­gie transgenre.

Ces posi­tions contra­dic­toires semblent dif­fi­ci­le­ment conci­liables. Tirez sur un des fils de l’i­déo­lo­gie trans­genre, et c’est toute la tapis­se­rie qui se délite. Voi­ci quelques ques­tions à poser :

Si le genre est une construc­tion sociale, com­ment l’i­den­ti­té de genre peut-elle être innée et immuable ? Com­ment une construc­tion sociale (l’i­den­ti­té de genre d’une per­sonne) peut-elle être déter­mi­née par la bio­lo­gie dans l’u­té­rus ? Com­ment l’i­den­ti­té d’une per­sonne peut-elle être inchan­geable (immuable) tout en étant une construc­tion sociale en constante évo­lu­tion ? Et si l’i­den­ti­té de genre est innée, com­ment peut-elle être « fluide » ?

La dif­fi­cul­té, pour les mili­tants, consiste à pro­po­ser une défi­ni­tion plau­sible du genre et de l’i­den­ti­té de genre qui soit indé­pen­dante du sexe corporel.

Existe-t-il ou non une bina­ri­té de genre ? Appa­rem­ment, selon les mili­tants trans­genres, la réponse est à la fois oui et non. Si les caté­go­ries « homme » et « femme » sont suf­fi­sam­ment objec­tives pour que les gens puissent s’i­den­ti­fier comme, et être, des hommes et des femmes, com­ment le genre peut-il aus­si être un spectre, où les gens peuvent s’i­den­ti­fier comme, et être, les deux, ou aucun, ou quelque part entre les deux ?

Que signi­fie le fait d’a­voir un sen­ti­ment interne de genre ? À quel sen­ti­ment le genre cor­res­pond-il ? Quel sens pou­vons-nous don­ner au concept de sexe ou de genre — et donc quel « sen­ti­ment » interne pou­vons-nous avoir du genre — qui ne soit pas lié au fait d’a­voir un corps sexué ?

S’il ne s’agit pas d’avoir un corps de mâle, à quel « sen­ti­ment » ou « res­sen­ti » cor­res­pond l’idée de « se sen­tir homme » ? S’il ne s’agit pas d’avoir un corps de femme, à quel « sen­ti­ment » ou « res­sen­ti » cor­res­pond l’idée de « se sen­tir femme » ? À quel « sen­ti­ment » ou « res­sen­ti » cor­res­pond l’impression d’être à la fois un homme et une femme, ou d’être ni l’un ni l’autre ?

La dif­fi­cul­té, pour l’activiste en faveur du trans­gen­risme, consiste à expli­quer ce que sont ces sen­ti­ments, et com­ment quel­qu’un pour­rait savoir s’il se « sent » comme le sexe oppo­sé, ou ni l’un ni l’autre, ou les deux.

Même si les mili­tants trans­genres pou­vaient répondre à ces ques­tions sur les sen­ti­ments, cela ne résou­drait pas le pro­blème de la réa­li­té maté­rielle. Pour­quoi le fait de se sen­tir homme — quoi que cela puisse vou­loir dire — fait-il de quel­qu’un un homme ? Pour­quoi nos sen­ti­ments déter­minent-ils la réa­li­té en ce qui concerne le sexe, mais pas dans d’autres domaines ? Nos sen­ti­ments ne déter­minent pas notre âge ou notre taille. Et peu de gens adhèrent à la pré­ten­tion de Rachel Dole­zal, qui pré­tend être une femme noire, pour la bonne rai­son qu’elle n’est clai­re­ment pas une femme noire.

Si les per­sonnes qui s’i­den­ti­fient comme trans­genres sont le sexe auquel elles s’i­den­ti­fient, pour­quoi cela ne s’ap­plique-t-il pas aux autres attri­buts ou caté­go­ries onto­lo­giques (ayant trait à l’être) ? Qu’en est-il des per­sonnes qui s’i­den­ti­fient comme des ani­maux, ou des per­sonnes valides qui s’i­den­ti­fient comme han­di­ca­pées ? Toutes ces iden­ti­tés auto­pro­cla­mées déter­minent-elles la réa­li­té ? Sinon, pourquoi ?

Et ces per­sonnes devraient-elles rece­voir un trai­te­ment médi­cal pour trans­for­mer leur corps de manière à ce qu’il s’accorde avec leur esprit ? Pour­quoi accep­ter la « réa­li­té » trans­genre, mais pas la réa­li­té trans-raciale, trans-espèce et trans-handicap ?

La dif­fi­cul­té, pour les mili­tants, consiste à expli­quer pour­quoi le « vrai » sexe d’une per­sonne est déter­mi­né par une « iden­ti­té de genre » interne, tan­dis que l’âge, la taille, l’appartenance eth­nique [la race des Anglo-saxons, NdT] et l’es­pèce ne sont pas déter­mi­nés par un sen­ti­ment interne d’identité.

Bien sûr, un mili­tant pro-trans pour­rait répondre qu’une « iden­ti­té » est, par défi­ni­tion, juste un sen­ti­ment interne du soi. Mais si tel est le cas, l’i­den­ti­té de genre n’est qu’une expres­sion de ce que l’on res­sent. Dire qu’une per­sonne est trans­genre signi­fie donc uni­que­ment que cette per­sonne a le sen­ti­ment d’être du sexe opposé.

L’i­den­ti­té de genre, ain­si com­prise, n’a aucune inci­dence sur la signi­fi­ca­tion du mot « sexe » ou de n’importe quoi d’autre. Mais les mili­tants trans­genres affirment que l’« iden­ti­té de genre » d’une per­sonne est son « sexe ».

La dif­fi­cul­té, pour les acti­vistes pro-trans, consiste à expli­quer pour­quoi le simple fait de se sen­tir homme ou femme (ou les deux ou aucun des deux) fait de quel­qu’un un homme ou une femme (ou les deux ou aucun des deux).

L’i­den­ti­té de genre évoque par­fois beau­coup l’i­den­ti­té reli­gieuse, qui est déter­mi­née par des croyances. Mais ces croyances ne déter­minent pas la réa­li­té. Une per­sonne qui s’i­den­ti­fie comme chré­tienne croit que Jésus est le Christ. Une per­sonne qui s’i­den­ti­fie comme musul­mane croit que Maho­met est le der­nier pro­phète. Mais Jésus est ou n’est pas le Christ, et Maho­met est ou n’est pas le der­nier pro­phète, indé­pen­dam­ment de ce que cha­cun croit.

De même, une per­sonne est ou n’est pas un homme, indé­pen­dam­ment de ce que qui­conque — y com­pris la per­sonne en ques­tion — croit. La dif­fi­cul­té, pour les acti­vistes trans­genres, consiste à pré­sen­ter un argu­ment expli­quant pour­quoi les croyances trans­genres déter­minent la réalité.

La déter­mi­na­tion de la réa­li­té est le cœur du pro­blème. Et ici aus­si nous consta­tons des contra­dic­tions. D’une part, les mili­tants trans­genres s’arrogent l’au­to­ri­té de la science lors­qu’ils for­mulent des affir­ma­tions méta­phy­siques, en pré­ten­dant que la science mon­tre­rait que l’i­den­ti­té de genre est innée et immuable. Mais d’autre part, ils nient que la bio­lo­gie soit un des­tin, insis­tant sur le fait que les gens sont libres d’être ce qu’ils veulent être.

Qu’en est-il ? Notre iden­ti­té de genre est-elle bio­lo­gi­que­ment déter­mi­née et immuable, ou bien créée par nous-mêmes et modi­fiable ? Dans le pre­mier cas, com­ment expli­quer que l’i­den­ti­té de genre d’une per­sonne change avec le temps ? Ces per­sonnes ont-elles une per­cep­tion erro­née de leur genre à un moment ou à un autre ?

Et si l’i­den­ti­té de genre est auto-créée, pour­quoi les autres per­sonnes doivent-elles l’ac­cep­ter comme une réa­li­té ? Si nous sommes libres de choi­sir notre propre réa­li­té de genre, pour­quoi cer­taines per­sonnes peuvent-elles impo­ser leur idée de la réa­li­té aux autres sim­ple­ment parce qu’elles s’i­den­ti­fient comme transgenres ?

La dif­fi­cul­té, pour l’ac­ti­viste trans­genre, consiste à arti­cu­ler une cer­taine concep­tion de la véri­té comme base de notre com­pré­hen­sion du bien com­mun et de la manière dont la socié­té devrait être ordonnée.

Ain­si que je le docu­mente abon­dam­ment dans When Har­ry Became Sal­ly (« Quand Har­ry devint Sal­ly »), les reven­di­ca­tions des mili­tants trans­genres sont dérou­tantes parce qu’elles sont phi­lo­so­phi­que­ment inco­hé­rentes. Ces mili­tants s’ap­puient sur des affir­ma­tions contra­dic­toires pour défendre leur posi­tion, mais leur idéo­lo­gie ne cesse d’é­vo­luer, de sorte que même les alliés et les orga­ni­sa­tions LGBT peuvent finir par perdre le fil avec le temps.

Au cœur de cette idéo­lo­gie se trouve l’af­fir­ma­tion radi­cale selon laquelle les sen­ti­ments déter­minent la réa­li­té. De cette idée découlent des exi­gences extrêmes visant à faire en sorte que la socié­té s’adapte à ces reven­di­ca­tions de réa­li­té sub­jec­tive. Les idéo­logues trans ignorent les preuves qui les contre­disent et les inté­rêts diver­gents, dénigrent les pra­tiques alter­na­tives, cherchent à étouf­fer les voix scep­tiques et à faire taire tout désaccord.

Le mou­ve­ment trans doit sans cesse rafis­to­ler et étayer ses croyances, sur­veiller les fidèles, contraindre les héré­tiques et punir les apos­tats, parce que dès l’instant où ses efforts fré­né­tiques fai­blissent ou que quel­qu’un réus­sit à s’y oppo­ser, toute la mas­ca­rade est dévoi­lée. C’est ce qui arrive lorsque vos dogmes contre­disent de manière si fla­grante des véri­tés évi­dentes, fon­da­men­tales et quotidiennes.

Le trans­gen­risme n’est pas le « bon côté de l’his­toire ». Pour­tant, les mili­tants ont convain­cu les sec­teurs les plus puis­sants de notre socié­té d’ac­quies­cer à leurs demandes. Bien que leurs affir­ma­tions soient mani­fes­te­ment fausses, il fau­dra un réel tra­vail pour empê­cher la pro­pa­ga­tion de ces idées néfastes.

Ryan T. Anderson


Tra­duc­tion : Nico­las Casaux

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