Quelques petits problèmes concernant le discours d’Aurélien Barrau (par Nicolas Casaux)

En à peine quelques semaines depuis que son appel a été dif­fu­sé sur le site du jour­nal Le Monde, Auré­lien Bar­rau est deve­nu la coque­luche de l’écologie grand public. S’il énonce des choses tout à fait justes, comme la néces­si­té pour l’humanité de ces­ser de s’étendre et même de lais­ser davan­tage d’espace aux autres espèces, et la néces­si­té de consom­mer moins, de décroître, de renon­cer au prin­cipe de crois­sance, son dis­cours pose pro­blèmes pour plu­sieurs rai­sons. Retour sur un engoue­ment tout à fait attendu.

Le 3 sep­tembre 2018, Le Monde publie une tri­bune inti­tu­lée « « Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité » : l’appel de 200 per­son­na­li­tés pour sau­ver la pla­nète ». Son sous-titre résume : « D’Alain Delon à Pat­ti Smith, tous ont répon­du à l’appel de Juliette Binoche et de l’astrophysicien Auré­lien Bar­rau pour une action poli­tique « ferme et immé­diate » face au chan­ge­ment cli­ma­tique. » Si Auré­lien Bar­rau par­vient à être publié dans Le Monde et à réunir autant de signa­tures de pro­fes­sion­nels de l’industrie de l’écervellement, c’est parce qu’il évo­lue aus­si dans ces milieux. Ain­si que M, le maga­zine du Monde nous l’apprend : « Si Auré­lien Bar­rau a réus­si à réunir autant de stars pour sa tri­bune, c’est grâce à Juliette Binoche, qui lui a ouvert son car­net d’adresses. Il s’est lié d’amitié avec elle il y a un an sur le tour­nage du pro­chain film de science-fic­tion de Claire Denis (High Life, sor­tie pré­vue en 2019). Il y offi­ciait en tant que conseiller scien­ti­fique sup­po­sé faire en sorte que trous noirs et voyages dans le temps, « choses abs­traites », deviennent « sen­sibles » pour les acteurs du film, Juliette Binoche, donc, et Robert Pat­tin­son. » Mais ce n’est pas la seule raison.

Une autre rai­son, et sans doute aus­si impor­tante, tient au fait que l’appel d’Aurélien Bar­rau — et son dis­cours plus géné­ra­le­ment — ne consti­tue une menace pour rien ni per­sonne. D’une briè­ve­té trou­blante, il com­mence par rap­pe­ler le désastre éco­lo­gique en cours, puis en vient au prin­ci­pal, que nous pour­rions résu­mer en quelques mots : « il faut que les hommes poli­tiques fassent ce qu’il faut ». For­mi­dable. Mais la naï­ve­té et l’incompréhension his­to­rique dont témoigne le dis­cours d’Aurélien Bar­rau ne se limitent pas à cela. Dans l’en­semble, il n’ose pas remettre en ques­tion le capi­ta­lisme, il affirme par exemple, dans une inter­view sur France Culture, qu’il « y a évi­dem­ment des pro­blèmes et des avan­tages au sys­tème capi­ta­liste », et ajoute, dans son inter­view chez Thin­ker­view, qu’il ne pense pas que le capi­ta­lisme soit le prin­ci­pal pro­blème. Son dis­cours a pour effet de sug­gé­rer qu’un capi­ta­lisme vert pour­rait sau­ver la situa­tion. Dans la vidéo qu’il a tour­née avec le média Brut (média inter­net, créé par des anciens de la télé­vi­sion, qui se spé­cia­lise dans les vidéos très courtes pour trai­ter de toutes sortes de sujets), il affirme :

« Donc la seule manière de nous sau­ver aujourd’hui, c’est que les diri­geants, c’est leur rôle, c’est pour ça que nous leur délé­guons notre pou­voir, c’est pour ça que nous les éli­sons, il faut donc qu’ils assument leur fonc­tion et qu’ils nous sauvent. Ils sont très exac­te­ment là pour ça. »

Et lors d’un pas­sage sur France 5 :

« Parce qu’on le sait nous sommes faibles, et moi le pre­mier, […] nous sommes tous col­lec­ti­ve­ment faibles, mais on est quand même suf­fi­sam­ment sages pour être capables de com­prendre que quand ça va plus il faut des lois, il faut que le droit et le poli­tique inter­viennent pour nous limiter. »

La pre­mière chose à rap­pe­ler, c’est que si « nous sommes faibles », cela n’a rien de natu­rel ou d’inéluctable. Il s’agit avant tout du résul­tat de décen­nies de condi­tion­ne­ment impo­sé par l’organisation sociale domi­nante et ses diri­geants. La socié­té de consom­ma­tion indus­trielle pro­duit les indi­vi­dus dont elle a besoin. Au fur et à mesure qu’il par­ve­nait à s’imposer, au cours des der­nières décen­nies — et l’on pour­rait pro­ba­ble­ment étendre cela aux der­niers siècles —, l’État et ses ins­ti­tu­tions se sont mis à usi­ner leurs sujets, afin de pro­duire le type d’individu dont ils avaient besoin pour fonc­tion­ner. C’est-à-dire le type d’individu sou­mis, confor­miste, croyant aux mythes néces­saires de l’État qui l’a for­mé (« démo­cra­tie », « pro­grès », etc.).

Ain­si que le for­mule l’anthropologue de Yale, James C. Scott :

« Une fois en place, l’État (nation) moderne a entre­pris d’homogénéiser sa popu­la­tion et les pra­tiques ver­na­cu­laires du peuple, jugées déviantes. Presque par­tout, l’État a pro­cé­dé à la fabri­ca­tion d’une nation : la France s’est mise à créer des Fran­çais, l’Italie des Ita­liens, etc.[1] »

Ce que cela sug­gère impli­ci­te­ment, et qu’Aurélien Bar­rau ne semble pas non plus réa­li­ser, c’est évi­dem­ment que l’État n’est pas une ins­ti­tu­tion démo­cra­tique. Nous ne choi­sis­sons pas de délé­guer notre pou­voir[2], d’élire, et le rôle des diri­geants éta­tiques n’a jamais été de prendre soin de nous. Ain­si qu’Howard Zinn s’évertuait à le rap­pe­ler : « L’État n’est pas notre ami ». Dans une socié­té véri­ta­ble­ment démo­cra­tique, les êtres humains pro­duisent les ins­ti­tu­tions dont ils ont besoin, et inver­se­ment, dans une socié­té non démo­cra­tique, les ins­ti­tu­tions pro­duisent les êtres humains dont elles ont besoin. Or, les régimes élec­to­raux modernes ne sont pas démo­cra­tiques[3], même s’ils s’auto-qualifient de « démo­cra­tie » (rap­pe­lons au pas­sage qu’une démo­cra­tie repré­sen­ta­tive, c’est un oxy­more). Le rôle de leurs diri­geants a tou­jours été de ser­vir une classe domi­nante au détri­ment de toutes les autres classes.

La pers­pec­tive d’Aurélien Bar­rau, bien trop cou­rante au sein d’une gauche par­ti­cu­liè­re­ment igno­rante, poli­ti­que­ment, sup­pose que la des­truc­tion de la pla­nète et l’exploitation orga­ni­sée des êtres humains par d’autres êtres humains, les mul­tiples oppres­sions et les inéga­li­tés qui carac­té­risent la civi­li­sa­tion indus­trielle, sont autant d’accidents de par­cours, d’effets indé­si­rables qui devraient pou­voir être jugu­lés. Ce n’est pas le cas. L’État capi­ta­liste repose, au même titre que la civi­li­sa­tion indus­trielle, sur le pillage et la des­truc­tion de la pla­nète, sur les hié­rar­chies sociales, sur l’exploitation sociale, les inéga­li­tés et les oppres­sions. Il s’agit de ce qu’implique son fonc­tion­ne­ment nor­mal, et non pas d’une erreur qui pour­rait être rectifiée.

Ain­si que le for­mule le socio­logue états-unien Charles Der­ber, l’État capi­ta­liste est une enti­té socio­pa­thique : ses struc­tures sociales pro­duisent des indi­vi­dus socio­pa­thiques en encou­ra­geant des com­por­te­ments socio­pa­thiques (au tra­vers et à cause de la com­pé­ti­tion, de l’exploitation sociale géné­ra­li­sée, la ser­vi­tude impo­sée qu’on appelle sala­riat, de la pro­prié­té pri­vée, du mili­ta­risme, des inéga­li­tés, etc.). Donc attendre de l’État, de ses ins­ti­tu­tions et de ses diri­geants qu’ils nous sauvent, et qu’ils sauvent la pla­nète, qu’ils fassent donc ce qu’ils ne sont pas cen­sés faire — et même le contraire de ce qu’ils sont cen­sés faire —, c’est se four­voyer dra­ma­ti­que­ment, et se condam­ner, et la pla­nète avec, à un péril certain.

On com­prend alors que son dis­cours témoigne de la réus­site du condi­tion­ne­ment d’État, qui est en effet par­ve­nu à infan­ti­li­ser la plu­part, à les per­sua­der que la seule chose qu’ils peuvent faire, c’est deman­der à Papa‑l’État d’intervenir et de sau­ver la situa­tion. C’est ce qui amène Auré­lien Bar­rau à affir­mer, sur France Culture : « Il me semble que les pré­si­dents de la répu­blique […] doivent endos­ser leur cos­tume de super-héros et mettre en marche cette révo­lu­tion indis­pen­sable à notre survie. »

Seule­ment, l’État, en tant qu’or­ga­ni­sa­tion sociale non démo­cra­tique, n’est pas la solu­tion, mais bien le pro­blème. De même que Mur­ray Book­chin, il nous semble incon­ce­vable de pen­ser l’écologie sans la démo­cra­tie. Comme lui, nous consi­dé­rons que « l’obligation faite à l’homme de domi­ner la nature découle direc­te­ment de la domi­na­tion de l’homme sur l’homme », et que :

« Tant que la hié­rar­chie per­sis­te­ra, tant que la domi­na­tion orga­ni­se­ra l’humanité autour d’un sys­tème d’élites, le pro­jet de domi­na­tion de la nature conti­nue­ra et mène­ra iné­luc­ta­ble­ment notre pla­nète vers la catas­trophe écologique. »

***

Mais il n’y a pas que sur le plan poli­tique que le dis­cours d’Aurélien Bar­rau s’égare. S’il cite cor­rec­te­ment quelques symp­tômes du désastre éco­lo­gique en cours, sur les­quels il n’est pas utile de reve­nir, son diag­nos­tic, dans l’ensemble, est plus que dis­cu­table. Ain­si lorsqu’il affirme que la des­truc­ti­vi­té dont fait actuel­le­ment montre la civi­li­sa­tion indus­trielle serait « endé­mique à ce que nous sommes », puisque « on sait que, même dans un pas­sé loin­tain où nous étions encore chas­seurs-cueilleurs, dès qu’une zone de la pla­nète se trou­vait colo­ni­sée par les humains, la macro­faune était mas­si­ve­ment déci­mée. Sou­vent avec une volon­té expli­cite d’extermination » (cita­tion tirée de son appel publié sur Dia­cri­tik). Or, même en admet­tant qu’une par­tie des extinc­tions de la méga­faune (il écrit macro­faune, mais pense pro­ba­ble­ment à la méga­faune) du Pléis­to­cène soit par­tiel­le­ment impu­table à cer­tains groupes humains (et pas à tous, ain­si qu’il semble le sug­gé­rer, amal­ga­mant ain­si toute l’humanité dans un sim­plisme gros­sier), et sachant que nous res­tons ici dans le domaine de l’hypothèse, de l’incertitude, contrai­re­ment à ce que sug­gère son « on sait que », d’autant qu’une par­tie de la com­mu­nau­té scien­ti­fique for­mule une autre hypo­thèse selon laquelle le chan­ge­ment cli­ma­tique serait davan­tage à blâ­mer, il est fran­che­ment gro­tesque de par­ler de « volon­té expli­cite d’extermination », comme si les registres archéo­lo­giques disaient quoi que ce soit des volon­tés des humains de l’époque. En outre, dans plu­sieurs endroits du monde, la macro­faune n’a pas été anéan­tie, notam­ment dans cer­taines régions de l’Afrique et de l’Asie, mal­gré une très longue coha­bi­ta­tion avec l’espèce humaine. D’ailleurs, ceux qui tenaient à affir­mer que l’être humain est un tueur-né recou­raient sou­vent à l’argument selon lequel l’arrivée d’Homo sapiens coïn­ci­dait par­tout avec la dis­pa­ri­tion de la méga­faune qui s’y trou­vait. Seule­ment, les décou­vertes archéo­lo­giques récentes ne cessent de repous­ser les dates d’arrivée d’Homo sapiens ici et là, et l’on sait désor­mais qu’en Aus­tra­lie, par exemple, la méga­faune a coha­bi­té avec l’espèce humaine pen­dant au moins 17 000 ans[4]. La date d’arrivée d’Homo sapiens aux Amé­riques risque fort d’être repous­sée elle aus­si[5]. Bref, à par­tir d’une affir­ma­tion fausse il tire une conclu­sion fausse, selon laquelle la des­truc­ti­vi­té de la socié­té indus­trielle est « endé­mique à ce que nous sommes ». Conclu­sion qui lui per­met d’affirmer que le capi­ta­lisme n’est « pas le prin­ci­pal pro­blème », d’autant qu’il a « aus­si des ver­tus ». Et l’on retombe ici sur sa mau­vaise ana­lyse socio­po­li­tique du problème.

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Auré­lien Bar­rau en appelle à des mesures impo­pu­laires et coer­ci­tives — une sou­mis­sion à tou­jours plus d’embrigadement éta­tique pour rai­son éco­lo­gique, qui abou­ti­ra, selon toute pro­ba­bi­li­té, à l’éco-fascisme que décri­vait Ber­nard Char­bon­neau dans Le feu vert, ou René Rie­sel et Jaime Sem­prun dans Catas­tro­phisme, admi­nis­tra­tion du désastre et sou­mis­sion durable.

« Si la crise éner­gé­tique se déve­loppe, la pénu­rie peut para­doxa­le­ment pous­ser au déve­lop­pe­ment. Le pétrole manque ? Il faut mul­ti­plier les forages. La terre s’épuise ? Colo­ni­sons les mers. L’auto n’a plus d’avenir ? Misons sur l’électronique qui fera faire au peuple des voyages ima­gi­naires. Mais on ne peut recu­ler indé­fi­ni­ment pour mieux sau­ter. Un beau jour, le pou­voir sera bien contraint de pra­ti­quer l’écologie. Une pros­pec­tive sans illu­sion peut mener à pen­ser que le virage éco­lo­gique ne sera pas le fait d’une oppo­si­tion dépour­vue de moyens, mais de la bour­geoi­sie diri­geante, le jour où elle ne pour­ra plus faire autre­ment. Ce seront les divers res­pon­sables de la ruine de la terre qui orga­ni­se­ront le sau­ve­tage du peu qui en res­te­ra, et qui après l’abondance gére­ront la pénu­rie et la sur­vie. Car ceux-là n’ont aucun pré­ju­gé, ils ne croient pas plus au déve­lop­pe­ment qu’à l’écologie : ils ne croient qu’au pouvoir.

Pour contrô­ler les dan­gers de moyens de plus en plus puis­sants et fra­giles parce que com­plexes, gérer un espace et des res­sources qui s’épuisent, pré­voir et maî­tri­ser les réac­tions humaines qui empê­che­raient de le faire, on est obli­gé de ren­for­cer l’organisation. L’éco-fascisme a l’avenir pour lui, et il pour­rait être aus­si bien le fait d’un régime tota­li­taire de gauche que de droite sous la pres­sion de la nécessité. »

— Ber­nard Char­bon­neau, Le feu vert (1980)

Pour bien com­prendre en quoi cet appel à davan­tage de coer­ci­tions éta­tiques pour nous sau­ver consti­tue une chi­mère indé­si­rable, il faut com­prendre que ceux qui détiennent le pou­voir, les diri­geants éta­tiques et cor­po­ra­tistes, n’agissent et n’agiront jamais à l’encontre de leurs propres inté­rêts, sans y être for­cés. Et dans for­cés, il y a force. Parce qu’il faut bien com­prendre que l’arrêt du désastre éco­lo­gique en cours nui­ra for­cé­ment à ceux qui l’ont pré­ci­pi­té, qui l’organisent et qui en tirent pro­fit actuel­le­ment. Les diri­geants éta­tiques et cor­po­ra­tistes n’ont pas inté­rêt à ce que les popu­la­tions consomment moins, à ce que cesse l’étalement urbain, le « déve­lop­pe­ment », etc.

Pour exemple, citons Jeff Bezos, PDG d’Amazon :

« Nous ne vou­lons pas vivre dans un monde rétro­grade. Nous ne vou­lons pas vivre sur une Terre où nous devrions geler la crois­sance de la popu­la­tion et réduire l’utilisation d’énergie. Nous pro­fi­tons d’une civi­li­sa­tion extra­or­di­naire, ali­men­tée par de l’énergie, et par la popu­la­tion. […] Nous vou­lons que la popu­la­tion conti­nue à croître sur cette pla­nète. Nous vou­lons conti­nuer à uti­li­ser plus d’énergie par personne. »

On entend de plus en plus par­ler de l’idée d’un lob­by citoyen, et pour­quoi pas, mais il fau­drait avant tout que ce lob­by vise à redis­tri­buer le pou­voir, et non pas à deman­der des lois pour ci ou ça. En effet, la plu­part des gens, ne réa­li­sant pas l’ampleur de ce qui pose pro­blème dans la civi­li­sa­tion indus­trielle — à peu près tout —, semblent croire que les petites mesures « impo­pu­laires » et « coer­ci­tives » qui pour­raient effec­ti­ve­ment être approu­vées ou accep­tées par ceux au pou­voir parce qu’elles ne menacent les inté­rêts d’aucun capi­taine d’industrie, comme la limi­ta­tion de vitesse pas­sant de 90 à 80 km/h, comme le ban­nis­se­ment de cer­tains objets en plas­tique, et même, ima­gi­nons, l’imposition à l’ensemble de la socié­té des petits gestes de l’écocitoyen modèle par le biais de la légis­la­tion, pour­raient véri­ta­ble­ment faire une dif­fé­rence. Ce n’est pas le cas. Dans l’ensemble, cela ne chan­ge­rait rien[6].

Il importe alors de rap­pe­ler que contrai­re­ment à ce que sug­gèrent les éco­los grand public comme Cyril Dion, Isa­belle Delan­noy, etc., une civi­li­sa­tion indus­trielle verte, un indus­tria­lisme vert — et qui plus est, démo­cra­tique —, ça n’existe pas. Et ça ne peut pas exis­ter, par défi­ni­tion, étant don­né que sur le plan social, l’industrialisme en géné­ral et les hautes tech­no­lo­gies en par­ti­cu­lier impliquent une orga­ni­sa­tion éten­due, très hié­rar­chi­sée, avec d’importantes spé­cia­li­sa­tion et divi­sion du tra­vail : autant de carac­té­ris­tiques peu com­pa­tibles avec la démo­cra­tie (directe, cela s’entend). Sur le plan éco­lo­gique, face à l’idée trop répan­due selon laquelle le rem­pla­ce­ment des éner­gies fos­sile et nucléaire par les éner­gies dites « renou­ve­lables » per­met­trait de la rendre « verte », rap­pe­lons que la civi­li­sa­tion indus­trielle ravage la pla­nète par son éta­le­ment urbain, son agri­cul­ture, sa sur­ex­ploi­ta­tion de toutes les res­sources (renou­ve­lables et non renou­ve­lables), la frag­men­ta­tion des biomes qu’imposent ses infra­struc­tures, ses innom­brables acti­vi­tés indus­trielles pol­luantes, des­truc­trices du monde natu­rel, et pas SEULEMENT par la manière dont elle pro­duit ou obtient l’éner­gie qu’elle uti­lise. Même si l’on par­ve­nait à obte­nir toute l’éner­gie qu’elle consomme par des pro­cé­dés véri­ta­ble­ment res­pec­tueux du monde natu­rel, c’est-à-dire même si les éner­gies dites « vertes » ou « renou­ve­lables » l’é­taient vrai­ment et inté­gra­le­ment — ce qu’elles ne sont pas[7], et ce qui n’est pas pos­sible, mais admet­tons — seule une petite par­tie du pro­blème aurait été réso­lue. Dans l’en­semble, la civi­li­sa­tion indus­trielle conti­nue­rait de détruire le monde, de le béton­ner, de l’ar­ti­fi­cia­li­ser, de le sur­ex­ploi­ter, de le pol­luer, de le conta­mi­ner, etc., bref : une civi­li­sa­tion indus­trielle verte ça n’existe pas. Mettre un terme à la des­truc­tion de la nature, c’est arrê­ter toutes les acti­vi­tés et pra­tiques qui la détruisent (ce n’est pas bien com­pli­qué à com­prendre). Mettre un terme à toutes les acti­vi­tés et pra­tiques qui la détruisent, c’est arrê­ter la qua­si-tota­li­té des acti­vi­tés indus­trielles (sau­riez-vous citer une seule indus­trie qui ne soit pas pol­luante, ou qui ne repose pas sur des infra­struc­tures et des pra­tiques nui­sibles de quelque façon pour le monde natu­rel ?). C’est arrê­ter la socié­té industrielle.

Et jamais les capi­taines d’industrie qui la dirigent n’accepteront de se tirer une balle dans le pied sans y être for­césdeman­der ou faire du lob­bying citoyen n’y suf­fi­ra jamais — en déman­te­lant l’ensemble du sys­tème indus­triel, en redis­tri­buant le pou­voir au peuple, en encou­ra­geant le démem­bre­ment des conur­ba­tions et des méga­lo­poles au pro­fit de la recréa­tion de micro­so­cié­tés à taille humaine, auto­nomes, démo­cra­tiques et éco­lo­giques, repo­sant donc sur l’utilisation de tech­no­lo­gies démo­cra­tiques (de basses tech­no­lo­gies, ou low-tech, ou d’outils convi­viaux), etc.

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Auré­lien Bar­rau affirme, dans son inter­view chez Thin­ker­view, ne pas croire au solu­tion­nisme tech­no­lo­gique. Pour­tant, peu après, il affirme que des solu­tions sont à cher­cher du côté d’une « amé­lio­ra­tion de l’efficacité éner­gé­tique », d’une meilleure iso­la­tion ther­mique des bâti­ments et d’une trans­for­ma­tion de « notre mode de pro­duc­tion d’énergie » — selon toute pro­ba­bi­li­té, il fai­sait ici réfé­rence aux éner­gies dites « vertes » ou « renou­ve­lables ». On com­prend ain­si que par solu­tion­nisme tech­no­lo­gique il n’entendait que la géo-ingénierie.

L’amélioration de l’efficacité éner­gé­tique ne résou­drait rien du tout, bien au contraire[8] — cela fait des décen­nies que l’efficacité éner­gé­tique des pro­ces­sus indus­triels qui consti­tuent la civi­li­sa­tion indus­trielle aug­mente. Mani­fes­te­ment, cela n’a pas même frei­né le désastre éco­lo­gique qui, sur la même période, n’a ces­sé d’empirer.

Fina­le­ment, le pro­blème du dis­cours d’Aurélien Bar­rau est double, parce qu’il pousse les gens à croire, d’une part, que le désastre éco­lo­gique en cours ne pour­ra être réso­lu que par ceux qui sont en train de le cau­ser et qui en béné­fi­cient le plus — et qui plus est, qu’il pour­rait être réso­lu indé­pen­dam­ment de la ques­tion démo­cra­tique ; et d’autre part, que quelques révi­sions à la baisse de nos niveaux de consom­ma­tion, dans les pays riches, cou­plées à quelques évo­lu­tions tech­no­lo­giques et tech­niques — les éner­gies dites « renou­ve­lables », la neu­tra­li­té car­bone et tout le tra­la­la de l’industrialisme vert[9] —, per­met­traient de le résoudre.

En atten­dant, ce que l’on peut tous obser­ver, c’est qu’au nom du sau­ve­tage de la pla­nète (et sur­tout, désor­mais, du sau­ve­tage « du cli­mat »), plu­sieurs indus­tries soi-disant « vertes » viennent s’ajouter aux exis­tantes, et l’on pro­duit tou­jours plus d’énergie chaque année : des cen­trales solaires, des parcs éoliens, des cen­trales à bio­masse et des bar­rages sont construits un peu par­tout, sans pour autant que des cen­trales à char­bon, ou au gaz natu­rel, ou nucléaires, soient fer­mées — au contraire, il s’en construit tou­jours plus. Le monde natu­rel, lui, comme tou­jours, en paie le prix. Rap­pe­lons, pour exemple, le cas de la cen­trale solaire de Ces­tas, en France, près de Bor­deaux, la plus grande d’Europe, qui a néces­si­té l’abattage de 250 hec­tares de pinède ; un pro­jet du consor­tium Eif­fage, Schnei­der Elec­tric, Krin­ner (l’occasion aus­si de rap­pe­ler que les indus­tries des éner­gies dites « vertes » sont, très logi­que­ment, domi­nées par d’immenses entre­prises mul­ti­na­tio­nales, et que toutes sortes de mul­ti­na­tio­nales, de Vin­ci à Total, y inves­tissent afin de faire du pro­fit). Cen­trale solaire dont l’électricité per­met­tra d’alimenter des smart­phones, des télé­vi­sions, des ordi­na­teurs, des réfri­gé­ra­teurs, etc. For­mi­dable. La pla­nète et le cli­mat nous remer­cient. Tout cela fait que, dans l’ensemble, la consom­ma­tion de com­bus­tibles fos­siles conti­nue d’augmenter — ou plu­tôt, d’empirer. Au même titre que tous les indi­ca­teurs éco­lo­giques : les océans sont de plus en plus sur­ex­ploi­tés, vidés, les zones humides dis­pa­raissent trois fois plus vite que les forêts, qui dis­pa­raissent aus­si très rapi­de­ment — l’année 2017 a consti­tué une année record pour la défo­res­ta­tion —, et ain­si de suite.

Les choses empirent et conti­nue­ront d’empirer au cours des décen­nies à venir. Les faux espoirs doivent être expo­sés pour ce qu’ils sont. Pour avoir une chance de mettre un terme à la catas­trophe, nous avons besoin d’un véri­table mou­ve­ment de résis­tance — à la manière de ce que pro­pose le livre Deep Green Resis­tance, que nous publions ce mois-ci (cou­rant octobre 2018).

Nico­las Casaux

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P.S. : 1. Lorsqu’on lui a deman­dé son avis sur les agis­se­ments d’une per­sonne qui s’était mise à faire une sorte de cam­pagne de sha­ming (jeter l’opprobre sur des indi­vi­dus) via inter­net à pro­pos des dépu­tés qui avaient voté contre l’interdiction du gly­pho­sate, Auré­lien Bar­rau a répon­du : « Je ne suis pas com­plè­te­ment en phase avec la chasse aux sor­cières, il faut quand même faire atten­tion, toutes les armes ne sont pas for­cé­ment bonnes, il faut quand même, je pense, gar­der un peu de dignité. »

Voi­là jusqu’où l’astrophysicien qui veut sau­ver la pla­nète est prêt à aller. Une cam­pagne basée sur des images dif­fu­sées sur inter­net visant à nom­mer et à cou­vrir de honte des dépu­tés pour leurs mau­vais agis­se­ments, c’est déjà trop pour lui.

2. Je ne reviens pas sur l’idée selon laquelle son dis­cours ser­vi­rait à « éveiller les consciences ». Il me semble que cela revient, au moins en par­tie, à inter­ver­tir la cause et l’effet. C’est pos­si­ble­ment parce que les gens savent que ça ne va pas, et parce qu’ils ne com­prennent pas bien pour­quoi, que des indi­vi­dus comme Auré­lien Bar­rau font le buzz. Quoi qu’il en soit, ain­si que j’ai essayé de le mon­trer, il n’aide pas les consciences à s’éveiller aux réa­li­tés poli­tiques, éco­no­miques et tech­no­lo­giques de la civi­li­sa­tion industrielle.


  1. https://partage-le.com/2015/01/la-standardisation-du-monde-james-c-scott/
  2. Quand Auré­lien Bar­rau affirme que les diri­geants éta­tiques que nous avons sont « le reflet de notre fai­blesse », il affirme que nous avons les diri­geants que nous méri­tons. Encore une fois, cela témoigne d’une très mau­vaise com­pré­hen­sion du sys­tème poli­tique domi­nant et de la manière dont il s’est impo­sé. On lui recom­man­de­ra, entre autres choses, la lec­ture du livre Pro­pa­gan­da d’Eward Ber­nays, le père des Rela­tions Publiques (la pro­pa­gande offi­cielle), ou le vision­nage de la série docu­men­taire en quatre volets d’Adam Cur­tis, inti­tu­lée Le siècle du moi, en plus de la lec­ture du livre de Fran­cis Dupuis-Déri, Démo­cra­tie : his­toire poli­tique d’un mot aux États-Unis et en France.
  3. https://www.youtube.com/watch?v=KVW5ogGDlts et https://partage-le.com/2018/08/de-la-royaute-aux-democraties-modernes-un-continuum-antidemocratique-par-nicolas-casaux/.
  4. https://www.theguardian.com/australia-news/2017/jan/12/megafauna-and-indigenous-australians-coexisted-with-for-at-least-17000-years
  5. https://www.theguardian.com/science/2017/apr/26/could-history-of-humans-in-north-america-be-rewritten-by-broken-mastodon-bones
  6. Voir : https://partage-le.com/2015/03/oubliez-les-douches-courtes-derrick-jensen/ & : https://partage-le.com/2018/09/la-consomaction-un-moyen-pour-les-puissants-degarer-la-resistance-par-george-monbiot/
  7. https://partage-le.com/2017/02/lecologie-du-spectacle-et-ses-illusions-vertes/
  8. Voir : https://partage-le.com/2018/06/pourquoi-lefficacite-energetique-ne-resout-rien-bien-au-contraire-par-max-wilbert/
  9. Pour un autre exemple de l’absurdité de l’industrialisme vert, pro­mu par Cyril Dion & Co : https://partage-le.com/2018/07/si-vous-allez-a-san-francisco-vous-y-verrez-des-seringues-et-de-la-merde-par-nicolas-casaux/

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  1. Ouii. Un mou­ve­ment de resis­tance. Mais : quoi?comment ? Avec quelle gou­ver­nance démo­cra­tique qui ne se trans­forme pas en foire a la sau­cisse et… quels moyens sachant que le pro­blème est planetaire?.…

  2. J’ai jus­te­ment enten­du ce même rai­son­ne­ment dans la bouche d’U­sul ( du côté de media­part ) et il y a quelque chose qui m’échappe.
    L’in­dus­trie ne pol­lue pas  » gra­tui­te­ment « , elle pol­lue pour nous four­nir tout un tat de services/produits et en fina­li­té amas­ser un maxi­mum d’argent.
    J’ai l’im­pres­sion d’en­tendre  » Ne des­cen­dons pas de notre branche, scions la à sa base !  » c’est plus radi­cale et prag­ma­tique comme solu­tion mais à terme ca implique de chan­ger notre mode de vie de toute façon non ??

  3. Excellent article.
    En enten­dant Bar­rau sur Thin­ker­view, je me suis comme vous immé­dia­te­ment rap­pe­lé la cita­tion de Char­bon­neau dans Feu Vert : l’ap­pel à la « dic­ta­ture verte » qui sau­ve­ra le monde. Vous avez rai­son de dénon­cer ce genre de rai­son­ne­ment qui sert les inté­rêts en place.
    Il est quand même hal­lu­ci­nant d’en­tendre aujourd’­hui encore ce genre de per­son­nage, sans doute très intel­li­gent, pré­tendre que les « éco­no­mies d’éner­gie » sont la solu­tion, alors que l’on sait depuis très long­temps qu’elles ne servent qu’à déga­ger de l’éner­gie pour déve­lop­per de nou­veaux usages, ce qui au final accroît la consom­ma­tion totale (c’est le fameux « effet rebond » que Bihouix décrit abon­dam­ment dans son livre sur les Low Techs).

  4. Il faut avoir fait au moins une fois le tour de cette cen­trale solaire de Ces­tas à pied ou à vélo pour com­prendre la mons­truo­si­té de la chose. De loin, vous pen­sez voir un éle­vage de pou­lets indus­triels, de près, vous n’en­ten­dez pas le moindre signe de vie au des­sus et au pied de ces struc­tures, pas un insecte, pas un oiseau, encore pire qu’au des­sus d’un champ de blé gly­pho­sa­té… Et on vous explique sur de grands pan­neaux à l’en­trée que de toute façon, la pinède qui a été cou­pée, c’é­tait de la forêt arti­fi­cielle, mais pas plus arti­fi­cielle que toute la forêt des Landes de Gas­cogne, plan­tée pour sta­bi­li­ser une zone humide seule­ment peu­plée de trou­peaux de mou­tons et de quelques ber­gers sur leur échasses. Il faut lire « vie et mort de Jean Cha­losse, der­nier mou­ton­nier des Landes », pour appré­hen­der un tout petit peu ce que pou­vait être ce pay­sage avant les plan­ta­tions. En tout cas, on espère que cette « gan­grène solaire » de Ces­tas ne va pas se répandre par­tout dans les Landes, sous pré­texte qu’il y a peu d’ha­bi­tants, que la forêt y est plan­tée, et que les Giron­dins conti­nuent à se faire construire des mai­sons à chauf­fage élec­trique. Je sais qu’il y a des détrac­teurs de Jean-Marc Jan­co­vi­ci, par ici, mais on ne peut pas lui enle­ver qu’il insiste lour­de­ment sur le fait que la « bonne éner­gie », c’est celle qu’on ne consomme pas.

    1. Bien d’ac­cord avec le fait que la seule éner­gie verte c’est celle que l’on ne consomme pas.
      Pour ce qui est de la forêt des landes, et de la forêt fran­çaise indus­trielle en géné­ral, je ne peux que vous recom­man­der chau­de­ment d’al­ler voir le film « le temps des forêts » qui devait à l’o­ri­gine s’ap­pe­ler « vert désert ».
      Peut-être qu’à l’o­ri­gine la forêt lan­daise était un maré­cage peu­plé de mou­tons, quoique l’ai­rial lan­dais était bien plus riche et divers que ça, mais au moins y avait-il de la vie là-dedans, énor­mé­ment de vie, comme dans toute zone humide. Allez voir ce film, écou­tez le silence de mort de cette « forêt » conscien­cieu­se­ment désher­bée au gly­pho­sate et arro­sée d’en­grais qui l’ont ren­due aus­si sté­rile qu’un champ de blé indus­triel. Nous débat­trons ensuite pour déter­mi­ner si la dif­fé­rence est si grande entre l’a­li­gne­ment au cor­deau des pins mari­times et l’a­li­gne­ment au cor­deau des pan­neaux photovoltaïques.
      Vous ver­rez aus­si dans le film que la pinède sté­rile ou le parc solaire ne sont pas une fata­li­té pour ces sols, ce que quelques trop rares pro­prié­taires lan­dais démontrent chaque jour, bien peu aidés par leur pré­sident de région (qui appa­raît dans le film), pour qui une forêt vivante est bien trop peu « inno­vante » et « disruptive ».

      1. Comme le sou­ligne sans doute ce film sur les forêts fran­çaises que je n’ai pas encore vu, il reste des coins des Landes mieux pré­ser­vés que d’autre, les pro­prié­taires de forêts là-bas sont tous rares, si on reprend votre expres­sion, puisque cha­cun pos­sède des cen­taines d’hec­tares 😉 Je ne pense pas avoir émis de juge­ment de valeur sur la forêt des Landes, à part avoir dit qu’elle était arti­fi­cielle, ce que vous confirmez.
        Toutes les pinèdes plan­tées par l’homme ne sont pas sté­riles, sur la pres­qu’Ile d’Ar­vert (17) où les plan­ta­tions de pins mari­times sont encore plus anciennes (XVIIIème siècle) et très peu modi­fiées par l’homme depuis, une belle diver­si­té de plantes s’est déve­lop­pée, là, il ne s’a­gis­sait pas d’as­sé­cher une zone humide, mais de conte­nir l’a­van­cée des dunes côtières qui avait chas­sé les habi­tants et consti­tuaient un petit Saha­ra en minia­ture. Les seuls arbres bien ali­gnés qu’on y trouve à pré­sent consti­tuent le « gre­nier à graines » de la forêt.
        Pour bien mettre des points sur les I, je pré­fère encore une forêt arti­fi­cielle, avec des arbres vivants, qu’un ali­gne­ment de métal qui grille toute vie au des­sus et en des­sous de lui. Oui, il y a une dif­fé­rence entre le vivant et ce qui est mort, ou entre l’a­ni­mé et l’inanimé.

  5. Mer­ci beau­coup pour cet article ! C’est vrai que ce n’est pas le « star sys­tem  » qui sau­ve­ra quoi que ce soit, que le ou la star soit issu du ciné­ma de la chan­son ou de la phy­sique. Son inter­ven­tion me fai­sait pen­ser au dis­cours bien pro d’un voya­geur de commerce.…toutes les véri­tés y sont ins­tru­men­ta­li­sées pour vendre le pro­duit qui marche.…et l’an­nonce du pro­duit vous fait l’ef­fet d’un sou­dain rétré­cis­se­ment de perspective.…un« flop » en somme. C’est là qu’il est néces­saire de conti­nuer à voir large et com­plexe ce qui est large et com­plexe et poin­tu ce qui est poin­tu. Auré­lien Bar­reau est sans doute poin­tu en phy­sique mais il était fran­che­ment vague.…

  6. Tout remettre en ques­tion, tout décons­truire, jeter tout le sys­tème actuel à la pou­belle… ça per­met de mieux pen­ser, d’a­van­cer, c’est une chose.
    Mais la réa­li­té, ce qui se trame, c’en est une autre.
    Auré­lien Bar­rau n’est pas spé­cia­liste de la ques­tion éco­lo­gique, sim­ple­ment un citoyen sen­sible au sujet, et le rap­pelle à chaque inter­view. Il est très loin d’être dog­ma­tique, ce qui n’est pas votre cas mal­heu­reu­se­ment… (c’est mon res­sen­ti et pas une véri­table « attaque », déso­lé, et peut-être suis-je à coté de la plaque hein, je ne vous connais pas !).
    Ce qui me cha­grine c’est que je ne vois de votre part aucune pro­po­si­tion… alors les « éco­los » grands publics sont peut-être naïfs, trop condi­tion­nés pour réflé­chir cor­rec­te­ment… mais au moins ils pensent à des solu­tions concrètes…
    Alors M. Casaux, votre article est bien construit, intéressant…

    Mais que faire ?

  7. Puisque vous abor­dez la ques­tion de la démo­cra­tie, il ne vous a pas échap­pé que pour ras­sem­bler le plus grand nombre, il faut faire consen­sus. C’est au moins le mérite que l’on peut accor­der à Aure­lien Barrau.
    Par ailleurs, lors de son dis­cours à Cli­max, il met les hommes poli­tiques au pied du mur, car pour beau­coup (trop) encore, l’é­co­lo­gie est un non sujet et recréé ain­si un contre pou­voir citoyen dont nous ver­rons, je l’es­père, les pre­miers effets aux européenes.
    La limite à mon sens de ce dis­cours trop consen­suel sera une forme de dis­so­cia­tion entre le dis­cours et les action effec­tives ou un empi­le­ment de mesures « cos­mé­tiques » visant à ras­su­rer les eco-citoyens en herbe..

  8. Article très inté­res­sant mais il y a un point qui me pose pro­blème. Quand vous dîtes : « Parce qu’il faut bien com­prendre que l’arrêt du désastre éco­lo­gique en cours nui­ra for­cé­ment à ceux qui l’ont pré­ci­pi­té, qui l’organisent et qui en tirent pro­fit actuel­le­ment. Les diri­geants éta­tiques et cor­po­ra­tistes n’ont pas inté­rêt à ce que les popu­la­tions consomment moins, à ce que cesse l’étalement urbain, le « déve­lop­pe­ment », etc. » n’ou­bliez-vous pas que cet arrêt nui­ra aus­si à la majo­ri­té de la popu­la­tion qui jouit sans frein de cette indus­tria­li­sa­tion ? Si l’on ren­verse le capi­ta­lisme, ce que je sou­haite aus­si, il y aura aus­si une forte coer­ci­tion qui se met­tra en place ne serait-ce qu’en­vers les indi­vi­dus consom­ma­teurs actuels. Le chan­ge­ment radi­cal ne se fera pas en dou­ceur ni pour les maîtres pos­ses­seurs mais encore moins pour les domi­nés que nous sommes puis­qu’il fau­dra bien chan­ger com­plè­te­ment notre mode de vie. Je ne sais pas si j’ai été clair.

  9. Il y a tout a inven­té ou a faire „ nous , huma­ni­té ‚chacun,e„doit ela­bo­rer indi­vi­duel­le­ment et collectivement„„penser et mettre en œuvre des solu­tions repro­duc­tibles se joindre à des elans ici ou ailleurs„, se confron­ter à soi-même„,en confron­tant à d autres ds des groupes ici et là nos moyens d oeu­vrer„ eco­mi­que­ment„ structurationnnnnnellement„,c tout qu il ous faut en per­ma­nence rebâ­tir„ car peut nous ai trans­mis „, resi­liance actuelle incon­tour­nable„, cf expé­rience de muni­ci­pa­lisme éco­lo­gique au Rojava, „

  10. J’en suis convain­cue, c’est exac­te­ment de cela que nous avons besoin : dés­in­dus­tria­li­ser la pla­nète. Mais le para­mètre « armée » entre là aus­si en jeu : qui est du côté du manche, cad qui a le pou­voir mili­taire ( et notam­ment nucléaire)? Les puis­sances indus­trielles, USA, Chine, Europe pour ne citer qu’elles. La bataille pas­se­ra for­cé­ment par la prise en main de ces outils de répres­sion, au prix de luttes héroïques aux­quelles il faut désor­mais se pré­pa­rer, mal­heu­reu­se­ment. J’ai­me­rais tel­le­ment me tromper…

    1. …luttes pas tant héroïques que vouées à l’é­chec, puisque la répres­sion, par essence déjà orga­ni­sée, sera prompte à tuer dans l’oeuf tout mou­ve­ment dont il est impos­sible qu’il se déve­loppe jus­qu’à atteindre l’ef­fi­ca­ci­té néces­saire. Cou­rage à tous. L’op­ti­misme en la matière me semble d’une naï­ve­té infinie.J’ai très peur pour mes enfants.

  11. Mer­ci, mer­ci, mer­ci pour ce brillant texte ! Tu illustres bien ton pro­pos et sur­tout le pro­blème de fond qui m’a aus­si gêné dans l’ap­pel d’Au­ré­lien Bar­reau (au pas­sage un brillant astro­phy­si­cien). Il faut éveiller le plus les conscience, et que les gens redé­couvre le vrai sens des MOTS poli­tique, démo­cra­tie, sou­ve­rai­ne­té, Etat, et j’en passe !

  12. Un article inté­res­sant sur le fond ; je par­tage cer­taines de vos affir­ma­tions sur les ver­rous sys­té­miques. Sur la forme, les argu­ments ab homi­nen me font sor­tir de votre pro­pos. Quelles pro­po­si­tions concrètes, ici et main­te­nant ? Pas grand chose à vous lire ici. Pas­se­ra-t-on d’un sys­tème à un autre en négli­geant les petits pas, les prises de conscience et les actes en conséquence ?

  13. Excellent article qui ana­lyse et résume très bien la situa­tion actuelle et montre qu’il y a au moins une alter­na­tive au cre­ti­nisme de masse que les media nous servent en continu

  14. Bon­jour Nico­las Casaux,
    Vous avez écrit un contre-article très intéressant…
    Mais alors, face au désastre ou tout au moins aux dif­fi­cul­tés annon­cées, que fait-on?…car le mou­ve­ment de résis­tance (dont je fais par­tie) reste pour le moment ultra minoritaire.
    Et il y a bien long­temps déjà une cita­tion attri­buée à Fran­cis Blanche disait : « Il vaut mieux pen­ser le chan­ge­ment que de chan­ger le pan­se­ment »…à méditer
    Oli­vier RIDET

    1. « que fait-on ? »
      .
      Des poules ‚des patates, des mira­dors, relire 1984 et des dis­cus­sions avec vos aînées.
      Dont le thème pour­rait être :
      .
      « Com­ment vivre dans une dic­ta­ture qui ne va pas man­quer de s’ins­tal­ler par réac­tion méca­nique aux troubles sociaux pro­chains (ceux actuels sont une blagues) et com­ment pho­to­co­pier les tickets de ration­ne­ment (1 ou 2 géné­ra­tions) puis ensuite…
      .
      Com­ment pré­pa­rer nos petits enfants pour sur­vivre dans, le choix est vaste :
      un hiver nucléaire,
      une guerre civile mon­dia­li­sée (fun !),
      une socié­té néandertalienne,
      Une dys­to­pie à votre conve­nance (lais­ser libre cours à votre imagination !)

      .
      Vous pou­vez aus­si pré­fé­rer « le grand soir », mais c’est plus ris­qué à court terme.

      Bon cou­rage !

  15. Il y a une ten­ta­tion dan­ge­reuse dans votre vision des choses : celle de croire que les déci­deurs éco­no­miques et poli­tiques sont d’une nature dif­fé­rente du « peuple citoyen » : eux mau­vais et avides, le peuple bon et rai­son­nable. Je ne déve­lop­pe­rai pas ici, il suf­fit de relire « La ferme des ani­maux » d’Or­well. Le niveau de conscience est col­lec­tif et nombre de déci­deurs agissent avec la convic­tion de faire le bien. La divi­sion de la socié­té entre cou­pables et vic­times est le pire des sce­na­rios pour la suite de notre histoire.

    1. Vous n’a­vez pas dû lire le pas­sage où je rap­pelle que dans une socié­té non démo­cra­tique, les ins­ti­tu­tions pro­duisent les gens dont elles ont besoin. Non, les gens ne sont pas de la même trempe que les diri­geants. (Vous oubliez par exemple ce détail que la gou­ver­nance moderne repose inté­gra­le­ment sur la pro­pa­gande, ain­si que toute gou­ver­nance éta­tique à tra­vers l’his­toire. Seule­ment, notre civi­li­sa­tion mon­dia­li­sée a déve­lop­pé une stu­pé­fiante indus­trie de la pro­pa­gande. Je vous ren­voie à Edward Ber­nays, et à l’u­ti­li­sa­tion de toutes sortes de tech­niques visant à mode­ler la psy­cho­lo­gie des foules).

      1. J’ai lu. Vous citez Howard Zinn dont vous repre­nez le pro­pos comme s’il s’a­gis­sait d’une véri­té recon­nue, alors que c’est seule­ment un bon sujet de débat. Mais votre ton pro­fes­so­ral « je rap­pelle que… », « vous oubliez que… » m’in­cite à pen­ser que le débat n’est pas votre tasse de thé. A mon avis, vous pré­fé­rez la propagande.

        1. Je vous cite :
          « …le peuple bon et raisonnable… »
          Nous n’a­vons pas lu le même article.
          Ou nous l’a­vons com­pris différemment.
          .
          Bonne journée

  16. J’ai lu avec inté­rêt votre tri­bune. Je l’ai décou­verte car il y a quelques semaines j’ai enten­du l’in­ter­ven­tion d’Au­ré­lien Bar­rau. Depuis je me docu­mente et prends plei­ne­ment conscience de la situa­tion mal­gré mon âge avan­cé. Si Auré­lien Bar­rau a ouvert la voie à d’autres comme moi, il a fait œuvre utile en per­met­tant entre autres de décou­vrir votre ana­lyse que je me per­mets de par­ta­ger. Cordialement

    1. Je suis d’ac­cord avec ce commentaire.
      Pour sau­ver notre pla­nète il serait bon que nous arrê­tions (enfin) de nous taper sur la gueule entre éco­lo­gistes. Toutes les entrées sont inté­res­santes, les pre­mières donnent accès un jour ou l’autre aux suivantes.
      Je milite depuis qua­rante ans comme éco­lo­giste. J’aime Auré­lien Bar­rau ET Nico­las Casaux. Pire : je ne pense même pas que les deux dis­cours soient contra­dic­toires, les niveaux de conscience sont sim­ple­ment différents.
      La véri­té n’é­chappe-t-elle pas à ceux et celles qui croient la déte­nir personnellement ?

  17. Avant tout com­men­taires je tiens à pré­ci­ser tout de suite pour être clair que je suis un adepte de la décrois­sance et à mon modeste niveau que j’es­saie dans la mesure du pos­sible de mettre mes actes au niveau de mes convic­tions (notam­ment en pra­ti­quant le Low-tech et en fai­sant un maxi­mum de dépla­ce­ments à la force du mol­let entres autres petites choses quo­ti­diennes ) ceci étant dis je referme cette paren­thèse et en viens à l’es­sen­tiel de mon propos.Alors j’adhère tout à fait à votre article n’ap­pré­ciant guère vous vous en dou­tez le modèle néo-libé­ral et mon­dia­li­sé (habi­le­ment tein­té de Green­wa­shing illu­soire si l’on demeure dans ce contexte éco­no­mique can­ni­bale) en court actuellement(et il court vite le bougre),pour autant je vous trouve tout de même bien sévère avec le per­son­nage, d’a­bord parce-que vous com­men­cez votre cri­tique en évo­quant ses liens avec le show­bizz en citant notam­ment Juliette Binoche qui que je sache n’est pas (à mes yeux en tout cas) la plus infré­quen­table de ce milieu plu­tôt bobo dans l’en­semble je vous le concède ensuite vous dites qu’il a été for­mé par ceux-là même qu’il critique,je crains qu’il ne lui est été bien dif­fi­cile de faire autre­ment vous ne croyez pas ? et pour ne pas être trop long je trouve tout de même que ce type de per­son­nage est néces­saire de nos jours comme porte-voix(e) afin de ten­ter d’é­veiller les consciences sur la pro­blé­ma­tique cli­ma­tique de plus je pense qu’il a éga­le­ment rai­son lors­qu’il pré­tend que nous aurons besoin des poli­tiques pour faire accé­lé­rer les choses (même si l’on sait tous plus ou moins que ceci relève de l’illu­sion) car je se suis qua­si­ment per­sua­dé éga­le­ment que d’at­tendre que ce soit les popu­la­tions qui s’y mettent (de manière glo­bale j’en­tends) relève éga­le­ment de l’illusion(pour exemple ? un mil­lions de gugusses dans les rues pour la coupe du monde de foot…combien pour la marche du cli­mat ?)..mais tout ceci étant dit je sait éga­le­ment toute la limite de ce rai­son­ne­ment car admet­tons (comme hypo­thèse de tra­vail) que tout nos poli­tiques euro­péens et les popu­la­tions qu’ils managent habi­le­ment fassent les efforts nécessaires…s’imagine-on réel­le­ment que tous les diri­geants non occi­den­taux ( et LEURS popu­la­tions ) accep­te­ront de s’o­rien­ter dans ce qu’il faut bien appe­ler une décrois­sance pour eux?…Ceux-la-mêmes qui en sortent à peine et à d’autres qui y sont encore jus­qu’au cou …dans la décroissance ???.

  18. Bien que je sous­crive gran­de­ment à cette opi­nion selon laquelle la classe diri­geante qui pos­sède les inté­rêts et donc ne lut­te­ra contre ceux-ci que lors­qu elle en aura le besoin vital ( de vie ou de mort) je pense que des per­son­na­li­tés scien­ti­fiques comme lui sont cré­dibles et peuvent éveiller les consciences notam­ment celles du citoyen qui ne com­prend ou ne veut pas com­prendre qu’il va lui aus­si mou­rir de cette crise écologique
    C est aus­si pour­quoi je ne sous­cris pas au mou­ve­ment du 17 novembre : le pro­blème c est la voi­ture indi­vi­duelle entre autres

  19. Mais qu’est-ce qu’on fait alors ? Qui va enfin lan­cer un mou­ve­ment qui pour­rait avoir un vrai impact en France ? Quelles asso­cia­tions, réseaux ?

  20. Mer­ci pour votre article.

    M. Auré­lien Bar­reau a mon res­pect et mon atten­tion. Je n’ai pas le sen­ti­ment qu’il se pré­sente comme déten­teur du mono­pole de la véri­té d’un point de vue idéo­lo­gique et poli­tique. De ce que j’en­tends de ses inter­views, l’essentiel de son mes­sage n’est pas là. Très sen­sible et pré­oc­cu­pé par la cause éco­lo­gique et huma­ni­taire, je com­prends qu’il sou­haite mettre sa noto­rié­té à contri­bu­tion en ajou­tant sa voix à d’autres pour nous éveiller à l’ur­gence d’a­gir et vite. Nous sommes assis dans un train qui fonce droit dans le mur, mais sommes encore très nom­breux à ne pas le voir (ou vou­loir le voir). Ce n’est pas une mau­vaise chose de se faire bras­ser pour nous sor­tir de notre léthar­gie. Autant ten­ter une manœuvre pour sau­ver ce qui pour­ra l’être. Un bon coup de barre doit être donné. 

    Ce que j’en­tends dans les pro­pos d’Au­ré­lien Bar­reau, c’est que col­lec­ti­ve­ment nous n’a­vons pas encore atteint suf­fi­sam­ment de matu­ri­té pour faire les choix néces­saires et don­ner ce coup de barre — point sur lequel je suis assez d’ac­cord lors­qu’on regarde l’é­tat des lieux. Par consé­quent, un cadre (légis­la­tif par exemple) est mal­heu­reu­se­ment un com­pro­mis néces­saire devant l’ur­gence d’agir.

  21. Je viens de voir Auré­lien Bar­rau et Juliette Binoche chez Mou­loud Achour. Ces trois là dis­cu­taient de réduc­tion de la consom­ma­tion et de par­tage… devant un public d’une cin­quante de per­sonnes invi­tés à fer­mer leur gueule et à pol­luer encore pour ren­trer chez eux !
    Selon Bar­rau, pour convaincre les réfrac­taires d’adhé­rer à son dis­cours, il suf­fit de détes­ter les récal­ci­trants et de les affi­cher comme des pes­ti­fé­rés… beau programme !
    La mise en place d’un tel dis­po­si­tif de com­mu­ni­ca­tion démontre une chose : en réa­li­té, ces gens là se moquent com­plè­te­ment que tu sois d’ac­cord avec eux. Ils veulent juste être les seuls à par­ler dans le micro et gar­der la main sur le manche !
    Rou­ler en Fer­ra­ri n’a aucun inté­rêt si tout le monde roule en Ferrari…

    1. Je ne com­prends pas la logique de votre com­men­taire… appa­rem­ment dès lors qu’on pré­sente son point de vue, on est cou­pable de pen­sée uni­la­té­rale ? Vous en voyez beau­coup des émis­sions où on invite une per­sonne pour qu’elle pré­sente son tra­vail / sa thèse / ses idées et où on appelle le public à le contredire ?

  22. Bon­jour,

    Je ne suis ni autant éru­dit, ni aus­si culti­vé que vous, c’est cer­tain, je par­le­rai donc en tant que citoyen du monde (citoyen enga­gé), simplement.

    Je suis assez attris­té parce que je viens de lire, car, l’ur­gence (non négli­geable) ne devrait-elle pas nous ras­sem­bler ? Que l’on soit entiè­re­ment d’ac­cord ou non ?

    J’ai eu l’im­pres­sion, en lisant cet article, de voir le même bras­se­ment d’air inutile que l’on peut voir sur les pla­teaux poli­tiques. Ne gas­pille-t’on pas notre éner­gie à mon­trer nos désac­cords, au lieu, de la cana­li­ser à aller, ensemble, de l’avant ?

    Le mes­sage, qu’il soit de Mr Bar­rau ou vôtre, Mr Casaux, ou de qui que se soit d’autre, avec toutes les dif­fé­rences qu’il com­porte, n’a t’il pas, in fine, le même objectif ?

    Qu’il soit res­pon­sable de la dis­pa­ri­tion total de la méga­faune, ou macro­faune (peut importe, le mes­sage est com­pris), lors de son implan­ta­tion, ou qu’il soit res­pon­sable de 60%, 80% ou même 20% de ces dis­pa­ri­tions, le constat actuel, ne mène t’il pas à la même conclu­sion ? Home Sapiens ne doit-il pas pas­ser son tour ?

    Qu’il s’a­gisse de notre éco­no­mie, de notre sys­tème démo­cra­tique, du capi­ta­lisme, du com­mu­nisme, du racisme, de notre nature humaine, etc (tout ce qui fait notre état). 

    N’est il pas l’heure d’é­vo­luer, entièrement ?

  23. Mer­ci ! Tout cela m’a­vait échap­pé. Je n’a­vais enten­du que le pre­mier dis­cours qui me parais­sait aller dans le sens d’un anti­ca­pi­ta­lisme. Que pen­sez-vous, du coup des pro­po­si­tions énon­cées dans l’ar­ticle dont je vous mets le lien. Elles me semblent elles, être anti­ca­pi­ta­listes puis­qu’elles pré­voient la fin de l’in­dus­trie auto­mo­bile, de la chi­mie agri­cole … https://www.novethic.fr/actualite/environnement/climat/isr-rse/infographie-interdiction-d-acheter-une-voiture-neuve-ou-de-prendre-un-long-courrier-couvre-feu-thermique-quotas-sur-les-produits-importes-les-mesures-chocs-pour-rester-sous‑1–5‑c-146877.html?fbclid=IwAR2eZXTTt3qqJ5RSXhMiCDji_d-qyXFz3PtG1_PxAB3Qiwo6epWJK8iiYkI

    1. Être contre le capi­ta­lisme, ce n’est pas ça. C’est s’op­po­ser à la manière dont la socié­té est fon­da­men­ta­le­ment orga­ni­sée (c’est s’op­po­ser à l’argent, au tra­vail abs­trait, à la mar­chan­dise, et à la valeur). l’in­fo­gra­phie de nove­thic c’est plu­tôt des conseils qui selon eux rédui­raient la nui­sance du capi­ta­lisme. Le pro­blème c’est qu’ils se trompent, parce qu’ils ne com­prennent pas les logiques intrin­sèques au capi­ta­lisme qui font que leurs mesures même si elles étaient appli­quées ne résou­draient rien (et qui font que leurs conseils ne peuvent pas être appliqués).

  24. Bon­jour, et mer­ci pour ce remar­quable article. 

    J’ai com­men­cé une longue réponse à ce mon­sieur sur une vidéo qui lui est consa­crée, mais n’ai pas eu l’oc­ca­sion de finir pour l’ins­tant. Cet article reprend ce que je comp­tais dire. Effec­ti­ve­ment, « L’État capi­ta­liste repose, au même titre que la civi­li­sa­tion indus­trielle, sur le pillage et la des­truc­tion de la pla­nète, sur les hié­rar­chies sociales, sur l’exploitation sociale, les inéga­li­tés et les oppres­sions. Il s’agit de ce qu’implique son fonc­tion­ne­ment nor­mal, et non pas d’une erreur qui pour­rait être rec­ti­fiée »… Et donc, « attendre de l’État, de ses ins­ti­tu­tions et de ses diri­geants qu’ils nous sauvent, et qu’ils sauvent la pla­nète, qu’ils fassent donc ce qu’ils ne sont pas cen­sés faire — et même le contraire de ce qu’ils sont cen­sés faire —, c’est se four­voyer dra­ma­ti­que­ment, et se condam­ner, et la pla­nète avec, à un péril certain ».

    Pour moi, j’en suis per­sua­dé, le mode de pro­duc­tion capi­ta­liste ne lais­se­ra pas Bar­rau lui bar­rer la route. Il conti­nue­ra à tout sac­ca­ger, jus­qu’à la des­truc­tion finale. Il est si per­vers que si par extra­or­di­naire, tel patron, telle entre­prise, étaient pris de scru­pules, renon­çaient à telle ou telle abjec­tion, il y aurait tou­jours une autre ins­tance pour com­mettre le mas­sacre à sa place. Je pense qu’au­cune prise de conscience, aucun mou­ve­ment, ini­tié par Bar­rau ou par qui que ce soit, ne pour­ra plus entra­ver notre marche vers l’ef­fon­dre­ment global. 

    Les rai­sons en sont, pour moi, d’a­bord le capi­ta­lisme et les bases mêmes de son fonc­tion­ne­ment, ain­si que le rap­pelle ce brillant article. Ensuite, la sur­po­pu­la­tion, que Mr Bar­rau a ten­dance à nier ou sous-esti­mer, il dit qu’elle va « se régu­ler natu­rel­le­ment ». Et puis, le mili­ta­risme, l’an­ta­go­nisme des nations, le fait que les peuples ne coopèrent nul­le­ment, mais sont tou­jours en train de vou­loir se dépas­ser mutuel­le­ment. Or, s’il n’y a pas, là, face à l’ur­gence, une coopé­ra­tion inter­na­tio­nale menée par des scien­ti­fiques, nous ne nous en sor­ti­rons pas.

    Je pense que pour l’hu­ma­ni­té, il n’y a plus aucune issue, c’est clair. Je n’i­ma­gine à aucun moment Homo « Sapiens » renon­cer au capi­ta­lisme, au pro­fit, aux courbes de ren­ta­bi­li­té, à la concur­rence effré­née, à l’ex­ploi­ta­tion de la nature, de l’homme par l’homme, au sac­cage du vivant, etc.
    Je ne l’i­ma­gine pas non plus renon­cer à se repro­duire de façon anar­chique, comme un lapin crétin.
    Je ne l’i­ma­gine pas non plus renon­cer à la guerre. 

    Pour toutes ces rai­sons, nous allons droit dans le mur, et pied au plan­cher. Et pen­dant que cer­tains, comme Bar­rau ou d’autres, ont com­pris, même éven­tuel­le­ment de façon mal­adroite ou inexacte, qu’il fal­lait chan­ger, nom­breux sont ceux qui estiment au contraire que la crois­sance ne va pas assez vite, que la tech­no­lo­gie peut tout arran­ger, estiment que notre démo­gra­phie stagne et que nous allons être « dépas­sés », « enva­his » par d’autres eth­nies, et autres consi­dé­ra­tions basées, comme tou­jours, sur l’an­ta­go­nisme, la com­pé­ti­tion, la concur­rence des peuples, au lieu de la coopération.

    Cette pla­nète est condam­née. Dans le meilleur des cas, l’homme sac­ca­ge­ra tout, s’au­to détrui­ra, de façon par­tielle ou totale, mais beau­coup d’es­pèces sur­vi­vront, et l’é­vo­lu­tion fera en sorte de peu à peu recréer de la bio diver­si­té. Dans le pire, si comme je le pense, à un moment don­né, une catas­trophe nucléaire se pro­duit (et toutes les condi­tions sont réunies), alors l’homme détrui­ra bien plus de vie, et je ne sais pas quelles espèces sur­vi­vront. Cer­tains insectes, peut-être ? Tout dépend du taux de radia­tions et de la vitesse à laquelle il s’é­ta­blit. Car on parle d’a­dap­ta­tion, certes, mais l’é­vo­lu­tion des espèces s’est faite len­te­ment, de géné­ra­tion en géné­ra­tion, il ne faut pas l’oublier.

    Quoi qu’il en soit, en ce qui concerne notre espèce, en res­tant lar­ge­ment opti­miste et en fai­sant l’im­passe sur le nucléaire, on obtien­dra, au mieux, la sur­vi­vance de quelques groupes humaines retour­nés à la barbarie.
    J’es­time, pour ma part, que notre ave­nir se décli­ne­ra quelque part entre Mad Max, et Soleil Vert.

  25. texte si bien argu­men­té, qu’on reste assom­mé par un tel pes­si­misme qui semble mal­heu­reu­se­ment très réaliste.
    Pour­riez-vous ajou­ter une petite pen­sée posi­tive pour faire naître une action utile

  26. Même posi­tion inte­nable chez EELV et Extinction/Rebellion : on veut faire de l’é­co­lo­gie sans remise en cause du capi­ta­lisme ni lutte des classes.
    Est-ce de la naï­ve­té (pour­tant Bar­rau a l’air d’un type intel­li­gent) ou de la tartufferie ?

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