Traduction d’un article de Colin Wright, biologiste de l’évolution, initialement paru (en anglais) sur son site internet, le 1er février 2021.
De plus en plus de personnes se disent « trans » ou « non-binaires » et remettent en question des réalités biologiques élémentaires, encouragées en cela par des activistes qui prétendent que la perception commune des hommes et des femmes en tant qu’entités biologiques réelles est obsolète. Certains affirment qu’il n’existe ni mâles ni femelles (ni hommes ni femmes), mais uniquement des degrés variables de « masculinité » et de « féminité ». Ils en concluent que la ségrégation d’un espace ou d’un sport basée sur une catégorisation binaire du sexe est illégitime, étant donné que si aucune ligne claire ne peut être tracée, qui peut affirmer qu’un prétendu « homme » n’est pas plutôt une femme ? Beaucoup vont même jusqu’à prétendre que nous devrions laisser les gens décider eux-mêmes de leur sexe, comme s’il s’agissait d’une question de choix personnel.
L’idée selon laquelle le sexe serait un spectre n’est plus confinée aux élucubrations d’universitaires des sciences humaines et à des communautés hermétiques de l’Internet. Elle a fait une percée considérable dans la culture dominante, notamment grâce à un environnement médiatique très favorable. Même des revues scientifiques prestigieuses comme Nature ont donné la parole à des auteurs qui affirment que « l’idée qu’il n’existe que deux sexes est simpliste » et que « les biologistes pensent maintenant qu’il existe un spectre plus vaste que cela ». Un autre éditorial de Nature proclame que les tentatives de classifier le sexe d’un individu au moyen de l’anatomie et de la génétique « n’ont aucun fondement scientifique ». Un livre récemment paru, intitulé The Spectrum of Sex : The Science of Male, Female, and Intersex (« Le spectre du sexe : la science du mâle, de la femelle et de l’intersexualité »), défend cette position de bout en bout. Son éditeur, une maison d’édition universitaire canadienne, déclare triomphalement que « ce guide transformateur détruit complètement notre compréhension actuelle du sexe biologique ».
En février 2020, j’ai cosigné un éditorial du Wall Street Journal sur ce sujet, intitulé The Dangerous Denial of Sex (« Le dangereux déni du sexe »). Avec ma coauteure, la biologiste du développement Emma Hilton, nous y mettions en lumière les dangers que la représentation pseudoscientifique spectrale du sexe posait pour les groupes vulnérables, notamment les enfants, les femmes, les gays et les lesbiennes. Étant donné que nous étions limités par le format d’un éditorial de journal, Hilton et moi-même ne pouvions pas discuter en détail de la science réelle du sexe biologique et exposer le caractère pseudoscientifique de l’idéologie du spectre sexuel. Tel est ce que cet essai se propose de faire.
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Deux principaux arguments sont généralement avancés pour défendre l’idée selon laquelle le sexe serait un attribut non binaire existant sur un « spectre ». Le premier se fonde sur l’existence de l’intersexualité, c’est-à-dire de personnes présentant des caractères sexuels intermédiaires ou indéterminés. Selon cet argument, le sexe ne saurait être binaire étant donné que certains individus possèdent une anatomie sexuelle qui semble se situer quelque part entre l’homme et la femme. Cet argument est fréquemment illustré par des figures représentant les types d’intersexualité le long d’un axe continu allant de « femme typique » à « homme typique » — comme ce diagramme très partagé, tiré d’un article du Scientific American paru en 2017 et intitulé « Visualiser le sexe comme un spectre ».
Le second argument généralement avancé afin de défendre la théorie du spectre sexuel repose sur les organes et caractères sexuels secondaires. Les organes sexuels secondaires comprennent tous les éléments de notre anatomie reproductive, à l’exception des gonades, qui sont les organes sexuels primaires. Les caractères sexuels secondaires, quant à eux, sont des éléments anatomiques liés au sexe qui se différencient au cours de la puberté, comme l’augmentation du volume des seins et l’élargissement des hanches chez les femmes, et la pilosité faciale, la voix grave, la musculature et les épaules plus larges chez les hommes. Et comme la distribution de ces caractères sexuels secondaires n’est pas parfaitement hétérogène entre hommes et femmes, puisque les caractères sexuels secondaires des hommes et des femmes se recoupent partiellement, l’on nous dit que nous devrions considérer le sexe biologique comme un continuum.
Cette façon de concevoir le sexe biologique est aujourd’hui fréquemment présentée aux enfants à l’école à l’aide d’illustrations comme celle de la Personne Gingenre (ci-dessous). Dans la case violette intitulée « sexe biologique », vous remarquerez que les termes « homme » et « femme » ne sont pas utilisés. Au lieu de cela, des termes suggérant que le sexe constituerait un continuum — « masculinité » et « féminité » — sont choisis. Nombre des traits présentés comme indicatifs du degré de masculinité et de féminité d’une personne sont des organes et des caractères sexuels secondaires : morphologie des organes génitaux, forme du corps, ton de la voix et pilosité. Les organes sexuels primaires (gonades, c’est-à-dire les ovaires et les testicules, respectivement pour les femmes et les hommes) ou les fonctions typiques associées au sexe, comme les menstruations chez les femmes et l’éjaculation chez les hommes, sont manifestement absents de ce tableau. De même, aucune mention des ovules ou des spermatozoïdes (produits respectivement par les ovaires et les testicules). Ces deux arguments — le premier fondé sur les types d’intersexuation et le second sur les organes/caractères sexuels secondaires — découlent de malentendus fondamentaux sur la nature du sexe biologique, qui est liée au type de gamètes (cellules sexuelles) qu’un organisme produit. D’une manière générale, les mâles (les hommes) correspondent au sexe qui produit les petits gamètes (spermatozoïdes) et les femelles à celui qui produit les gros gamètes (ovules). Il n’existe pas de gamètes intermédiaires — pas de troisième type de gamètes —, c’est pourquoi le sexe n’est pas un « spectre ». Le sexe biologique, chez l’être humain, est un système binaire.
Il est toutefois essentiel de noter que le sexe des individus au sein d’une espèce ne se fonde pas sur leur aptitude effective à produire certains gamètes à un moment donné. Les mâles (hommes) prépubères ne produisent pas de spermatozoïdes et certains adultes des deux sexes ne produisent jamais de gamètes en raison de divers problèmes d’infertilité. Pourtant, il serait incorrect de dire que ces personnes ne possèdent pas de sexe discernable, puisque le sexe biologique d’un individu correspond à l’un des deux types d’anatomie reproductive évoluée (ovaires ou testicules) qui se développent en vue de produire du sperme ou des ovules, indépendamment de leur effectivité passée, présente ou future. Chez les humains — et les personnes dites « transgenres » ou « non binaires » ne font pas exception — l’anatomie reproductive est incontestablement mâle ou femelle dans 99,98 % des cas.
La distinction binaire entre ovaires et testicules comme critère déterminant le sexe d’un individu n’est ni arbitraire ni propre aux humains. La fonction évolutive des ovaires et des testicules consiste à produire respectivement des ovules ou des spermatozoïdes, qui se combinent dans le cadre de la reproduction sexuée. Si cela ne se produisait pas, il n’y aurait pas d’êtres humains. Si ces connaissances étaient probablement considérées comme avant-gardistes dans les années 1660, il est étrange que nous les considérions soudainement comme controversées en 2020.
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Dans 99,98 % des cas et non pas dans 100 % en raison des quelque 0,02 % de personnes intersexuées. (Le chiffre réel est estimé à environ 0,018 %.) Quoi qu’il en soit, ceux qui soutiennent que l’existence des intersexuations avalise la théorie du sexe spectrale confondent deux idées : celle selon laquelle « il n’existe que deux sexes » (qui est exacte) et celle selon laquelle « n’importe quel être humain peut être catégorisé sans ambiguïté comme étant un homme ou une femme » (qui est fausse). L’existence de seulement deux sexes ne signifie pas que le sexe n’est jamais ambigu. Mais les personnes intersexuées ne prouvent pas que le sexe est un spectre. Ce n’est pas parce que le sexe peut être ambigu pour certains qu’il est ambigu (et, comme certains commentateurs l’extrapolent, arbitraire) pour tous.
Imaginons que nous jouions à pile ou face pour choisir entre deux alternatives. Une pièce de monnaie possède deux faces. Mais une pièce de monnaie possède également une tranche, et lors d’un lancer sur 6 000 (0,0166 %) (avec une pièce de 5 cents), environ, c’est sur elle que la pièce retombe. Il s’agit à peu près de la chance qu’un être humain a de naître avec un trouble du développement sexuel (autre appellation de l’intersexuation). Presque tous les lancers de pièces de monnaie retombent soit sur pile soit sur face — et ces deux possibilités, pile et face, n’existent pas en degrés ou en mélanges, ou sur un spectre. Pile et face sont des résultats qualitativement différents et mutuellement exclusifs. L’existence d’occurrences lors desquelles la pièce retombe sur sa tranche ne change rien à cet état de fait. Pile et face, malgré l’existence de la tranche, demeurent des issues irréductibles.
De la même manière, le résultat du développement sexuel chez les êtres humains est presque toujours sans ambiguïté mâle ou femelle. Le développement des ovaires et celui des testicules, et donc des femelles (ou femmes) et des mâles (ou hommes), sont également des résultats qualitativement différents qui, pour l’immense majorité des humains, s’excluent mutuellement et ne se présentent pas sous forme de mélanges ou de degrés. Mâles (ou hommes) et femelles (ou femmes), malgré l’existence de différentes formes d’intersexuation, demeurent des issues irréductibles.
L’existence de l’intersexualité est souvent évoquée pour tenter de brouiller la frontière entre homme et femme par celles et ceux qui plaident en faveur de l’inclusion des « femmes trans » dans les sports féminins et dans d’autres contextes. Mais le transgenrisme n’a absolument rien à voir avec l’intersexualité. L’immense majorité des personnes qui revendiquent une identité trans ou non binaire ne sont pas atteintes par une forme d’intersexuation, leur sexuation n’est pas ambigüe. Ce sont les organes sexuels primaires, et non l’identité, qui déterminent le sexe d’une personne.
Par ailleurs, le principal défaut de l’argument fondé sur les organes/caractères sexuels secondaires est qu’il confond cause et effet. Souvenez-vous, les caractères sexuels secondaires sont des éléments anatomiques qui se différencient pendant la puberté. Chez les femmes, elles comprennent (entre autres) le développement des seins, des hanches plus larges et une tendance à stocker la graisse autour des hanches et des fesses. Chez les hommes, les caractères sexuels secondaires comprennent une voix plus grave, une taille moyenne plus élevée, une pilosité faciale, des épaules plus larges, une musculature accrue et une graisse davantage répartie autour de l’abdomen. Cependant, ces caractères sexuels secondaires — bien qu’évidents et indissociables de la façon dont la plupart des gens perçoivent les hommes et les femmes —, ne définissent pas réellement le sexe biologique d’une personne. Au contraire, ces caractères se développent généralement à cause du sexe de l’individu, en conséquence de différences hormonales produites par les testicules ou les ovaires pendant la puberté.
Les différentes trajectoires développementales des mâles (ou hommes) et des femelles (ou femmes) sont elles-mêmes le produit de millions d’années de sélection naturelle, puisque les caractères sexuels secondaires contribuent différemment à l’adaptabilité évolutive des mâles (ou hommes) et des femelles (ou femmes). Les femelles aux hanches plus étroites avaient plus de mal à mettre au monde des enfants à grosse tête, et celles aux hanches plus larges avaient donc un avantage évolutif. Ce n’était pas le cas pour les mâles, ce qui explique en partie pourquoi leurs corps ont tendance à être différents. Mais cela ne signifie pas que les hanches d’une personne — ou n’importe quel autre caractère sexuel secondaire, y compris la barbe et les seins — définissent son sexe biologiquement. Ces caractères, bien qu’ayant évolué sous l’effet de pressions de sélection propres à chaque sexe, ne permettent aucunement de définir le sexe biologique d’une personne.
Les analogies peuvent aider, alors permettez-moi de vous en proposer une autre. Les motards conduisent des motos et les cyclistes des vélos. Si ces deux véhicules présentent de nombreuses similitudes (deux roues, un guidon, une selle, des rayons, etc.), ils diffèrent au moins sur un point fondamental. Les motos sont propulsées par des moteurs et du carburant, tandis que les vélos sont propulsés par des jambes qui pédalent. Le seul critère permettant de déterminer si un individu est un motard ou un cycliste consiste à savoir s’il conduit une moto ou un vélo. Il s’agit de la principale caractéristique définitionnelle des motards et des cyclistes. Cependant, il existe également de nombreux caractères secondaires associés aux motards et aux cyclistes. Les motards, par exemple, sont plus susceptibles de porter des vestes en cuir, des jeans et des bandanas. Les cyclistes sont plus susceptibles de porter de l’élasthanne moulant. Les motards portent des casques lourds qui protègent toute la tête et comprennent un écran. Les cyclistes portent généralement des casques légers ne recouvrant que le dessus de leur tête.
Bon nombre des caractères secondaires des motards et des cyclistes ne sont pas arbitraires ou fortuits. À l’instar des caractères sexuels secondaires des hommes et des femmes, nous pouvons rattacher l’utilité des caractères secondaires des motards et des cyclistes à leurs caractères primaires. Les motards portent des habits résistants parce qu’ils se déplacent à des vitesses plus élevées. Ils ont donc besoin de vêtements de protection en cas d’accident et afin d’atténuer le refroidissement éolien. En ce qui les concerne, les cyclistes déploient un effort physique considérable en pédalant. Ils doivent mettre en mouvement leur propre poids ainsi que celui de leur véhicule, ce qui requiert des vêtements et des équipements de protection plus légers, respirants et coupe-vent. Et vu qu’ils se déplacent plus lentement, les accidents potentiels auxquels ils sont confrontés sont moins violents. Là encore, le choix d’un équipement de protection plus léger se justifie donc.
Cela étant, un individu conduisant une moto, mais habillé d’une combinaison en élasthanne et portant un casque léger ne devient pas un cycliste (ni moins un motard) pour la raison qu’il partage ces caractères secondaires communément associés aux cyclistes. Inversement, un individu à vélo, mais affublé d’un jean et d’une veste en cuir ne devient pas un motard (ni moins un cycliste) parce qu’il partage ces traits secondaires typiques des motards. De la même manière que ces traits secondaires ne constituent pas ce qui définit un motard ou un cycliste, les caractères sexuels secondaires ne constituent pas ce qui permet de déterminer si un individu est homme ou femme.
Mais la biologie étant complexe, les gens se laissent facilement influencer par des graphiques et des dessins, surtout lorsqu’ils visent à prouver ce qu’ils avaient envie de croire de toute façon — comme l’idée prétendument émancipatrice selon laquelle le sexe serait un spectre plutôt qu’un système binaire.
Le concept de spectre implique un axe quantitatif et conduit, lorsqu’il est pris au sérieux, à des conclusions préjudiciables. Une représentation graphique particulièrement populaire représente le sexe comme une distribution bimodale simple, avec deux maxima représentant la masculinité et la féminité, autour desquels la plupart des gens se situent. Un tweet viral de l’utilisateur de Twitter @ScienceVet2, qui compte maintenant plus de 17 000 retweets, promeut ce modèle du spectre sexuel bimodal à l’aide d’une figure similaire à celle ci-dessous.
On comprend facilement l’engouement pour ce type de représentation : elle étaye à notre intuition selon laquelle la plupart d’entre nous se rassemblent autour de deux pôles, mâles (hommes) et femelles (femmes), tout en suggérant qu’il existe un vaste continuum entre ces deux catégories. On suppose que l’on pourrait même procéder à diverses mesures afin de déterminer exactement où nous nous situons sur ce spectre.
Encore une fois, tout cela semble très progressiste en théorie. Mais en pratique, les conséquences de cette représentation sont régressives, étant donné que les critères de la masculinité et de la féminité invoqués par les sectateurs de la figuration spectrale du sexe seront nécessairement des stéréotypes sexistes, que nos grands-parents auraient reconnus comme tels.
Dans la figure adaptée ci-dessous, le mâle A est-il « plus » mâle que le mâle B ? La femelle D est-elle « plus » femelle que la femelle C ? Pendant des décennies, nous avons à juste titre enseigné à nos enfants que ce type de logique était insultant et nuisible — qu’une fille aux traits masculins était tout autant une fille que son amie dont le physique correspondait davantage au stéréotype féminin. Que l’axe des abscisses de la figure serve à évaluer la morphologie des organes génitaux ou un amalgame de traits ou de comportements sexuels secondaires, le diagramme suggère toujours que les hommes grands, agressifs, avec une barbe épaisse, une voix grave, un gros pénis et un taux de testostérone élevé sont « plus » masculins, plus hommes, que les hommes petits, avec une personnalité plus douce, répondant à la description inverse. De la même manière, les femmes ayant des seins plus gros, un rapport taille-hanche plus « féminin » et une pilosité plus faible seraient considérées comme « plus » féminines, plus femmes, que les femmes aux petits seins, moins galbées et plus poilues.
Si cette perspective du spectre sexuel vous semble terriblement similaire à celle d’une brute de cour de récréation, c’est parce que tel est effectivement le cas. Imaginez le scénario suivant : James, 16 ans, est un garçon très efféminé. Au lycée, il est victime d’un harcèlement incessant en raison de son apparence et de ses manières féminines. Ses camarades de classe le taquinent : « Quoi, tu es une fille ? ». Entendant cela, l’enseignant consulte son diagramme du spectre sexuel et répond à haute voix : « peut-être ».
En outre, une intervention chirurgicale sur un nourrisson intersexué (on parle parfois de mutilation génitale intersexuée) pourrait modifier la position d’un individu sur ce spectre sexuel pseudoscientifique. Un parent pourrait alors être tenté d’opter pour d’autres interventions chirurgicales « correctives », parfois en contradiction avec le véritable sexe biologique (gonadique) du nourrisson, afin de rendre son enfant davantage homme ou femme — en tout cas « idéellement » (dans son esprit). Cela étant, force est de reconnaître que la plupart des défenseurs de la théorie du spectre sexuel désapprouvent le fait d’opérer les enfants intersexués (et à juste titre, selon moi). Le problème, c’est qu’ils ne tiennent pas compte de la façon dont leurs doctrines peuvent encourager de telles pratiques.
La croyance que véhicule la pseudoscience du spectre sexuel — à savoir que le sexe d’une personne est impossible à déterminer de manière définitive — possède évidemment un attrait intrinsèque pour celles ou ceux qui sont déjà aux prises avec des problèmes liés à leur identité. Il est valorisant d’imaginer que l’on puisse avoir un contrôle sur quelque chose d’aussi fondamental que le sexe. L’article Sex Redefined (« Le sexe redéfini »), paru en 2015 dans la revue Nature et rédigé par la Dr Claire Ainsworth, promotrice de la thèse du spectre sexuel, se termine sur le paragraphe suivant :
« “Mon sentiment est que, puisqu’aucun paramètre biologique ne prend le dessus sur tous les autres, en fin de compte, l’identité de genre semble être le paramètre le plus raisonnable”, explique Vilain. En d’autres termes, si vous voulez savoir si une personne est un homme ou une femme, il est peut-être préférable de lui poser la question. »
Le Dr Éric Vilain, clinicien et directeur du Centre de biologie basée sur le genre de l’université de Californie à Los Angeles, affirme que, puisque le sexe biologique ne saurait être réduit à « un paramètre biologique » (ce qui est faux), alors nous devrions abandonner la prise en compte du sexe au profit de celle de l’identité de genre, entièrement subjective. Cette conclusion est ahurissante, notamment parce que, même si la théorie du spectre sexuel était exacte, il ne s’ensuivrait nullement que l’on peut arbitrairement choisir où l’on se situe sur le spectre. En outre, dans l’interprétation que fait Ainsworth des affirmations de Vilain, nous constatons un glissement assez grossier entre l’affirmation selon laquelle le sexe serait un spectre et l’affirmation beaucoup plus extrême selon laquelle le sexe serait arbitraire et insignifiant. Comme si n’importe qui pouvait, grâce au pouvoir de l’imagination et au moyen d’une simple affirmation, inventer — ou décider de — sa biologie. Quel incroyable pouvoir les humains s’arrogent-ils. Si seulement il existait. Certains militants pour les « droits des personnes trans » se demandent pourquoi des gens comme moi se focalisent sur une question dont les enjeux semblent si faibles. En réalité, les enjeux sont considérables : si l’idée du sexe biologique peut être invalidée dans le domaine de la compétition sportive, là où les différences entre les hommes et les femmes sont les plus évidentes, alors le combat contre la pseudoscience du sexe spectral est sans doute perdu d’avance dans tous les autres domaines — de l’admission des hommes dans les prisons pour femmes et les centres d’aide aux victimes de viols, à la facilitation de la chirurgie [dite, mensongèrement, NdT] de changement de sexe pour les écoliers. Ainsi que Thomas Sowell le formule succinctement dans son livre The Quest for Cosmic Justice, « une société ne peut survivre que lorsque la divergence entre les théories qui y prévalent et l’immuable réalité est minime. Pourtant, il est peu probable que les théories de l’égalité soient réexaminées — ou examinées pour la première fois — lorsqu’elles servent de base au sentiment grisant d’être moralement supérieur à une “société” ignorante. »
Les défenseurs de la représentation spectrale du sexe avaient sans doute de bonnes intentions en l’élaborant. Après tout, qui s’opposerait à une explication de la biologie humaine qui puisse valider toutes nos perceptions changeantes de nous-mêmes ? Mais il devrait être évident qu’ils ont créé une théorie erronée de la biologie qui falsifie la nature humaine et nuit aux individus vulnérables. Lorsque l’on tente d’atteindre l’égalité et la justice en falsifiant la réalité, l’inégalité et l’injustice ne sont jamais éliminées, elles sont simplement déplacées.
Colin Wright
Traduction : Nicolas Casaux
Merci, les analogies (par ex. pile ou face et tranche de la pièce) sont très utiles pour « argumenter » ou répondre dans certaines situations. Exemple récent vécu dans une librairie LGBTQetc+ où je tentais de débattre sur le sujet :
— (moi) J’ai trois enfants : deux filles et un garçon, et …
— (la libraire, m’interrompant) Qu’est-ce que vous en savez ?
…