Les « pronoms préférés », c’est du Rohypnol (par Barra Kerr)

Note de la tra­duc­trice : Si vous lisez mes tra­duc­tions et mes textes depuis un moment, vous savez que je ne parle pas de « femmes trans » ou de « trans­femmes », mais d’« hommes tran­si­den­ti­fiés », et que je genre les accords et les pro­noms en fonc­tion du sexe réel et non de l’identité de genre lorsque je tra­duis ou rap­porte des faits, des crimes, des his­toires qui s’additionnent en concou­rant à la des­truc­tion des droits des femmes. Je vous pro­pose une tra­duc­tion com­men­tée d’un texte fon­da­men­tal sur le sujet, ini­tia­le­ment publié début 2019, en anglais, à l’a­dresse sui­vante, et qui a contri­bué à ren­for­cer mon choix.

[« Rohyp­nol » est le nom com­mer­cial d’un médi­ca­ment appe­lé flu­ni­tra­zé­pam, de la famille des ben­zo­dia­zé­pines. Il s’agit d’un tran­quilli­sant, ou « hyp­no­tique séda­tif », envi­ron dix fois plus puis­sant que le Valium, éga­le­ment uti­li­sé comme agent d’induction des anes­thé­sies géné­rales, mais qui n’est plus pres­crit en France. Il a été sur­nom­mé « la drogue du viol » bien que d’autres ben­zo­dia­zé­pines soient plus fré­quem­ment impli­qués dans les cas d’agressions sexuelles — et de manière sous-esti­mée. Toutes les notes entre cro­chets comme celles-ci sont des notes de la traductrice.]


La ques­tion des pro­noms, ou, plus pré­ci­sé­ment, la ques­tion des pro­noms « pré­fé­rés », fait l’objet de nom­breuses dis­cus­sions en ce moment. On entend géné­ra­le­ment par cette expres­sion les pro­noms qu’une per­sonne sou­hai­te­rait que d’autres per­sonnes emploient lorsqu’elle est le sujet de leur dis­cus­sion. [En fran­çais, il s’agit du pro­nom per­son­nel à la troi­sième per­sonne et d’accords gen­rés pour par­ler de quelqu’un au fémi­nin ou au masculin.]

Le fait de décli­ner ses pro­noms pré­fé­rés signi­fie : « Lorsque vous par­lez de moi, voi­ci com­ment vous devez faire réfé­rence à moi. »

Le plus sou­vent, les per­sonnes qui demandent, ou plu­tôt qui exigent, que les autres parlent d’elles en uti­li­sant des pro­noms spé­ci­fiques demandent des pro­noms [et des accords] asso­ciés au sexe oppo­sé au leur.

Une simple politesse. Une courtoisie.

J’ai enten­du de nom­breuses per­sonnes me dire que cela ne les déran­geait pas d’employer les pro­noms pré­fé­rés des gens qui le demandent. Qu’elles le font par cour­toi­sie, même si cela demande une cer­taine gym­nas­tique men­tale lorsque vous avez conscience du sexe réel de votre inter­lo­cu­teur mais devez vous appli­quer à sys­té­ma­ti­que­ment uti­li­ser les pro­noms et accords asso­ciés au sexe oppo­sé. Il s’agit d’un choix per­son­nel. Je res­pecte les rai­sons pour les­quelles cer­taines per­sonnes le font.

J’ai éga­le­ment enten­du de nom­breuses per­sonnes décla­rer que qui­conque ne se conforme pas à ce choix (géné­ra­le­ment, il s’agit d’une femme) n’est qu’une odieuse et méchante per­sonne, hos­tile et désa­gréable. Le « mégen­rage » serait un dis­cours de haine. C’est en tout cas ce qu’ils [les tran­sac­ti­vistes et leurs com­plices] disent.

En ce qui me concerne, je refuse d’employer « elle » et d’accorder au fémi­nin pour faire réfé­rence à un homme, quel qu’il soit. Parce que les pro­noms sont comme du Rohypnol.

La « cour­toi­sie » en matière de pro­noms et de noms pré­fé­rés entrave la lutte pour les droits des femmes. [Et la poli­tesse, la gen­tillesse et la cour­toi­sie sont très atten­dues de la part des femmes, natu­rel­le­ment gen­tilles, sou­mises et altruistes jusqu’au sacri­fice, n’est-ce pas ?] Les gens sous-estiment sérieu­se­ment l’impact psy­cho­lo­gique que l’obéissance à cette exi­gence pro­duit sur eux-mêmes ain­si que sur les autres.

Les pronoms sont comme du Rohypnol pour l’autodéfense intellectuelle

Vous dou­tez peut-être. N’est-ce pas absurde ? Votre force men­tale est impla­cable. Cela ne vous res­semble pas de vous lais­ser influen­cer par de telles futi­li­tés. Je me trompe sans doute. Oui, je com­prends. Accom­pa­gnez-moi un peu dans mon rai­son­ne­ment, au cas où.

Et essayez cette petite expérience :

1) Ce que vous coûte l’EMPLOI des pronoms préférés :

Avez-vous déjà enten­du par­ler du test de Stroop ?

Définition | Effet Stroop | Futura Santé

Il s’agit d’un phé­no­mène psy­cho­lo­gique bien connu de type « nom­mez cette cou­leur ». Une expé­rience simple et rapide. Il s’agit sim­ple­ment de dire la cou­leur des mots écrits devant vous. Sauf que la vitesse et la pré­ci­sion de vos réponses sont for­te­ment influen­cées par la concor­dance ou la dis­cor­dance qu’il peut y avoir entre la cou­leur que vous voyez et le mot lui-même.

Essayez ICI [en anglais, sinon, en fran­çais ici], si vous aimez les tests inter­ac­tifs amu­sants. Il vous fau­dra moins d’une minute pour le faire. Com­pa­rez la dif­fé­rence de temps entre la pre­mière et la deuxième par­tie de l’expérience. Vous consta­te­rez que vous allez, à chaque fois, devoir lut­ter volon­tai­re­ment contre la dis­so­nance cog­ni­tive due au « conflit » entre les infor­ma­tions contra­dic­toires qui entrent dans votre cer­veau. Cela vous per­tur­be­ra, vous serez dis­traite, plus lente, cela pour­rait aus­si vous frus­trez et vous fatiguez.

For­cer notre cer­veau à igno­rer l’évidence que nos yeux voient, nos per­cep­tions immé­diates, est une opé­ra­tion men­tale qui nous affecte. Il s’agit d’ignorer un conflit entre ce que nous voyons — que nous savons être vrai — et ce que nous sommes cen­sés dire [tout haut. Et c’est quelque chose que les femmes sont habi­tuées à faire très tôt : les adultes forcent les petites filles à accep­ter les « bisous » d’autres adultes lorsqu’elles ne veulent pas être tou­chées. On leur fait com­prendre que poser des limites est mal poli. On leur dit que lorsque les gar­çons sont méchants avec elles, c’est parce qu’ils les aiment bien. Une grande majo­ri­té de filles ont été éle­vées dans le gas­ligh­ting et le déni de leurs propres per­cep­tions et res­sen­tis. (NdLT)]

Employer les pro­noms pré­fé­rés des autres a le même effet. Cette opé­ra­tion altère votre atten­tion, votre vitesse de trai­te­ment de l’information, vos auto­ma­tismes [de sur­vie]. Vous pou­vez consta­ter que cela vous rend anxieuse. Vous prê­tez moins atten­tion à ce que vous vou­lez dire et consa­crez davan­tage d’énergie men­tale à ce que l’on attend de vous. Cela vous ralen­tit, vous per­turbe, vous rend moins réac­tive. Ce n’est pas une bonne chose.

[Soyons hon­nêtes deux secondes : je suis inca­pable de dire « elle » en par­lant d’O***** C****. Il s’agit d’un homme trou­blé et détes­table. De même avec N***** C**, il s’agit d’un auto­gy­né­phile enti­tré et mani­pu­la­teur bête comme ses pieds. C’est plus com­pli­qué avec cer­tains trans­sexuels old school. Lorsque je les entends par­ler, que je dis­cute avec eux, je les « per­çois » dans un entre deux, mon trai­te­ment de leur parole, de leur ton, de leur pro­pos se situe dans la val­lée de l’étrange. Je leur dis « elle », mais cela me laisse une impres­sion de malaise, de tris­tesse et de culpa­bi­li­té. Parce que je n’ai rien contre ces per­sonnes, et que j’apprécie même leur per­son­na­li­té, leur carac­tère, et que leur his­toire me touche. Tou­te­fois, l’effet dont il est ques­tion est là : je suis plon­gée dans l’embarras.]

Au Royaume-Uni, cet homme qui se dit femme est qua­li­fié de « femme trans », les médias parlent de lui en employant le pro­nom « elle ». Il est incar­cé­ré pour des faits de vio­lence. Son trans­fert dans une pri­son pour femmes avait été vali­dé, mais n’a pas eu lieu parce qu’il y a quelques jours, le gou­ver­ne­ment écos­sais a déci­dé de mettre en pause tous les trans­ferts de déte­nus « transgenres ».

2) Le coût d’ENTENDRE ou de LIRE les pronoms préférés des autres :

Essayez l’expérience sui­vante. Pen­dant une semaine, retra­dui­sez tous les articles et com­men­taires tran­sac­ti­vistes que vous trou­vez en reve­nant aux pro­noms, noms et noms ori­gi­naux basés sur le sexe réel. Réécri­vez-les pour reve­nir à la véri­té brute, puis reli­sez-les. Vous pou­vez aus­si faire cet exer­cice de tête, mais l’éditer sur un sup­port (un écran par exemple) est préférable.

Conver­tis­sez les pro­noms fémi­nins en pro­noms mas­cu­lins, uti­li­sez les noms de famille au lieu des pré­noms, et conver­tis­sez des mots tels que « femmes trans » en « hommes » [ou « homme tran­si­den­ti­fié »].

Mieux encore, si vous connais­sez le pré­nom d’origine de la per­sonne, uti­li­sez-le, que ce soit David, Rhys, Ash­ton ou Jona­than [Réfé­rence à Jes­si­ca « Jona­than » Yaniv, le per­vers pédo­phile qui a per­du son pro­cès contre les salons d’épilation non mixtes qui refu­saient de lui épi­ler les couilles, et qui se ques­tionne sur com­ment aider les jeunes filles à insé­rer leurs tampons].

Que vous appe­liez une « rose » sous un autre nom ne chan­ge­rait rien à son odeur, pas vrai ? Cela ne devrait pas avoir d’importance. Per­sonne d’autre ne sera bles­sé ou affec­té par cette expé­rience pri­vée. Cela se passe uni­que­ment entre vous et votre esprit résilient.

(Essayez de ne pas être ban­nie de Face­book ou de Twit­ter lorsque vous faites cette expérience).

Main­te­nant, reli­sez votre ver­sion traduite.

Si ces petits actes cour­tois de confor­mi­té aux pro­noms pré­fé­rés ne sont vrai­ment que d’insignifiantes conces­sions (en dépit d’un ban­nis­se­ment poten­tiel des réseaux sociaux pour avoir appor­té des preuves contra­dic­toires), que vous faites par poli­tesse envers les autres, et sans aucun coût ni pour vous ni pour les autres femmes, alors cet exer­cice pri­vé ne chan­ge­ra rien, ne vous coû­te­ra rien et n’affectera per­sonne. Vous repar­ti­rez en vous disant : « Oui, c’est bien ce que je pen­sais, tout ça, c’est juste des his­toires pour pas grand-chose. »

Exemple d’extrait d’article concer­nant une « femme trans » condam­née à des tra­vaux d’intérêts géné­raux en réin­sé­rant les pro­noms mas­cu­lins de l’agresseur mâle :

« Il a été condam­né à 3 ans de tra­vaux d’intérêts géné­raux par la Cour du She­riff de Kir­kal­dy en jan­vier. En février der­nier, il avait fil­mé à l’aide de son télé­phone por­table une jeune fille pen­dant qu’elle était aux toi­lettes, par-des­sus la cloi­son de sépa­ra­tion. Un mois plus tard, il a pous­sé une autre jeune fille dans le box de toi­lettes, lui a sai­si la tête et lui a ordon­né de quit­ter son pantalon. »

Après tout, rien n’était cen­sé « chan­ger » par la seule modi­fi­ca­tion des pro­noms et des noms, n’est-ce pas ? Vous savez déjà au fond quel est le sexe réel de l’agresseur dans l’histoire. Les pro­noms, mas­cu­lins ou fémi­nins, n’ajoutent aucune infor­ma­tion sup­plé­men­taire. Com­ment de simples pro­noms peuvent-ils, de quelque manière que ce soit, modi­fier votre per­cep­tion ou vous influen­cer alors que vous connais­sez déjà tous les faits ? Les pro­noms n’importent pas, c’est une simple petite conces­sion à faire. Ça ne mérite pas d’être pris en consi­dé­ra­tion, c’est sans impor­tance, pas vrai ?

Sur le plan cog­ni­tif, vous devriez être immu­ni­sée contre les effets d’un tel tra­ves­tis­se­ment lin­guis­tique. Les pro­noms ne sont pas impor­tants, alors vous les concé­dez faci­le­ment étant don­né qu’ils n’ont pas le pou­voir de vous influen­cer, puisque vous y voyez déjà clair, non ?

(Et vous pou­vez vous confes­ser ici, ça ira. Vous pen­sez peut-être déjà que les femmes qui refusent de se plier aux pro­noms sont juste des imbé­ciles, inca­pables de pen­ser stra­té­gi­que­ment [et un peu d’automisogynie dans le mix] et qui ne savent pas quand lâcher l’affaire, sont pro­ba­ble­ment des extré­mistes. Elles ne se rendent pas ser­vice, et même qu’elles nuisent à leur propre « cause ». Quelle déraison.)

Mais ten­tez l’expérience. Tra­dui­sez les pro­noms, les accords et les réfé­rences au mas­cu­lin. Insé­rez des « noms morts » ou « mori­noms » [en anglais dead name, il s’agit du nom ori­gi­nel d’un homme tran­si­den­ti­fié, et comme pour les démons, si vous le connais­sez, le TRA [Trans Rights Acti­vist, le mili­tant trans] n’a plus aucun pou­voir sur vous] ou uti­li­sez leurs noms de famille. (Per­sonne ne le sau­ra, sauf vous). Reli­sez encore une fois et soyez hon­nête avec vous-même.

Est-ce que ça vous semble dif­fé­rent en le lisant de cette façon ?

Réagis­sez-vous dif­fé­rem­ment ? Com­ment est votre anxié­té, votre confu­sion ? Êtes-vous plus en colère ? Avez-vous plus peur ? Votre sens de l’injustice est-il éveillé ? À quel point vos défenses intel­lec­tuelles se sont-elles déclenchées ?

Vous décou­vri­rez peut-être que, mal­gré vous, vous avez réagi de manière vis­cé­ra­le­ment dif­fé­rente à ce que vous avez sous les yeux. [Au départ, vous visua­li­siez une femme en train d’agresser une fille. Main­te­nant, vous voyez la réa­li­té : un homme per­vers et pédo­phile qui agresse sexuel­le­ment des jeunes filles.] 

C’est pour­tant la même his­toire, avec les mêmes pro­ta­go­nistes et les mêmes faits.

Pro­noms dif­fé­rents, réac­tion différente.

Les pronoms préférés, c’est du Rohypnol.

Ils émoussent vos défenses. Ils altèrent vos inhi­bi­tions. Ils sont faits pour ça. Toute votre vie, vous avez appris à être atten­tive et sur vos gardes vis-à-vis de « lui », et déten­due et en confiance avec « elle ».

Pour de très bonnes rai­sons. Cette réac­tion ins­tinc­tive vous pro­tège. Ce n’est même pas quelque chose de conscient. C’est comme si les petits che­veux de votre nuque se héris­saient. Vos rou­tines per­cep­tives sub­cons­cientes vous aident à ne pas vous faire dévo­rer par le tigre à dents de sabre que vos yeux n’ont pas encore perçu.

« Marche comme si trois hommes mar­chaient der­rière toi. » (Oscar de la Renta)

À l’origine, Oscar n’avait pro­ba­ble­ment pas l’intention de pro­vo­quer la réac­tion fémi­nine ins­tinc­tive que ses mots ont suscitée.

Les pro­noms dis­cor­dants font éga­le­ment tra­vailler votre cer­veau beau­coup plus dur [et inuti­le­ment, gas­pillant de l’attention pour rien et volant vos res­sources pour quand vous en aurez réel­le­ment besoin, pour vous battre pour les droits des femmes, par exemple], non seule­ment quand vous les employez, mais aus­si lorsque vous les rece­vez comme infor­ma­tion. Votre cer­veau traite et retraite en conti­nu l’information pour que l’histoire soit claire dans votre tête. Homme ou femme ? Qui est l’agresseur déjà ? Cela exige de vous un effort de concen­tra­tion plus intense. Un effort pour igno­rer vos intui­tions, igno­rer vos instincts.

Et tout cela ne concerne que vous. Vous êtes déjà au cou­rant de toutes les infor­ma­tions per­ti­nentes, vous êtes déjà avi­sée, vous savez ce dont il retourne, vous n’êtes pas née de la der­nière pluie.

Pour­tant, l’emploi et la lec­ture des pro­noms et des accords gen­rés [qui ne cor­res­pondent pas à la réa­li­té], des pré­noms dis­cor­dants, vous affectent sur les plans émo­tion­nel et ins­tinc­tif. Mal­gré vos efforts. Vous n’êtes pas immu­ni­sée contre cet effet. Même en sachant par­fai­te­ment le sexe réel d’un homme don­né, vous réagi­rez et le per­ce­vrez dif­fé­rem­ment si quelqu’un l’appelle « elle » au lieu de lui.

Quel est donc l’impact sur toutes celles et ceux qui n’en sont même pas encore conscients, qui n’ont pas encore plei­ne­ment com­pris ce qui se passe ?

Les pronoms préférés, c’est du Rohypnol.

Ils changent notre per­cep­tion des autres [et du dan­ger], nous font bais­ser notre garde, nous font réagir dif­fé­rem­ment, modi­fient la réa­li­té qui se pré­sente à nous.

[« Par exemple, la Bri­tish Psy­cho­lo­gi­cal Socie­ty a décla­ré que les psy­cho­logues qui tra­vaillent avec des patients en méde­cine légale sont conscients qu’il existe un cer­tain nombre de cas dans les­quels des hommes délin­quants sexuels se sont sciem­ment fait pas­ser pour des “femmes trans­genres” lorsqu’il n’en était rien. Ils ont agi ain­si a) pour démon­trer qu’ils ne repré­sentent pas une sérieuse menace à la socié­té et obte­nir ain­si une libé­ra­tion condi­tion­nelle ; b) pour expli­quer leur délin­quance sexuelle autre­ment que par leurs moti­va­tions sexuelles (par exemple, vou­loir “exa­mi­ner” les jeunes filles [parce qu’ils n’ont pas eu une enfance “en tant que fille (NdLT)]) ; c) ou pour sépa­rer leur moi délin­quant sexuel (homme) de leur moi futur (femme) ; d) dans de rares cas, les psy­cho­logues ont jugé que l’homme en ques­tion cher­chait à accé­der plus faci­le­ment aux femmes et aux jeunes enfants en se pré­sen­tant sous une appa­rence fémi­nine. » Isi­do­ra San­ger, Born in the right body.

Mais, bien enten­du, rien ne per­met objec­ti­ve­ment de dif­fé­ren­cier un homme qui pré­tend sin­cè­re­ment être une femme trans d’un homme qui le pré­tend abu­si­ve­ment. Une grande par­tie de l’absurdité de la chose se retrouve ici.]

Il s’agit de l’objectif de l’emploi des « pro­noms pré­fé­rés ». Ils anes­thé­sient nos défenses. Ils nous rendent confuses. Ils sup­priment nos réac­tions ins­tinc­tives de sécurité.

Ils fonc­tionnent.

Après avoir fait cette expé­rience, vous déci­de­rez peut-être de conti­nuer d’accepter de les uti­li­ser, ou d’employer des pro­noms fémi­nins et de gen­rer au fémi­nin pour par­ler des hommes de manière un peu plus pru­dente, mais en conscience de leur influence sur vous et les autres. C’est un choix que vous pou­vez faire. Au moins, désor­mais, vous réa­li­sez que vous pou­vez volon­tai­re­ment sup­pri­mer vos réponses ins­tinc­tives à cet emploi. Vos yeux sont plus ouverts.

Peut-être conti­nue­rez-vous à tra­duire men­ta­le­ment les pro­noms et les noms « pré­fé­rés » dans votre tête pour res­ter au contact de la réa­li­té, à chaque fois, comme je le fais. Nous nous don­nons ain­si de meilleure chance de com­prendre la réa­li­té de la situa­tion qui se pré­sente à nous. Cela devient plus facile avec la pra­tique. Je tiens à pré­ser­ver mon instinct.

Peut-être que vous haus­se­rez les épaules. Vous pou­vez vivre avec ce petit phé­no­mène. Peut-être que ça n’a pas mar­ché pour vous, que vous ne voyez tou­jours pas le problème.

Mais je vous en prie. Ne jugez pas si sévè­re­ment celles d’entre nous qui refusent de se sou­mettre, qui refusent de se confor­mer aux pro­noms pré­fé­rés. Nous avons de bonnes rai­sons de le faire, pour notre propre bien et pour celui des autres.

Les pronoms préférés, c’est du Rohypnol.

Je veux être vigi­lante. Je veux que les autres soient vigi­lantes. Je veux que les gens voient la réa­li­té, et je veux que ces réac­tions ins­tinc­tives, ces intui­tions que nous res­sen­tons lorsque quelque chose ne va pas, ne soient pas émous­sées, ni confon­dues par ce tour de passe-passe psy­cho­lo­gique de comp­toir, mais effi­cace. J’ai l’impression que je me dois ça à moi-même, et que je le dois abso­lu­ment aux autres femmes.

Et plus que tout, je le dois aux filles. Je ne veux pas par­ti­ci­per, même de manière minime, à les encou­ra­ger à négli­ger leurs ins­tincts de sur­vie et de pro­tec­tion. Ces ins­tincts sont là pour une rai­son. Pour les gar­der en sécu­ri­té. Elles ont besoin de leurs ins­tincts intacts et affûtés.

Et c’est pour­quoi je n’utiliserai pas les pro­noms pré­fé­rés. Se ser­vir du Rohyp­nol sur les autres n’est pas une courtoisie.

Bar­ra Kerr

Tra­duc­tion : Audrey A.

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  1. [ note au modé­ra­teur-ice : déso­lée je vou­lais com­men­ter cet article et non l’autre sur les pronoms !]
    Article très intéressant.
    J’ai une ques­tion que je me pose sou­vent et qui me revient à la lec­ture des ces pas­sages d’Au­drey A :
    « Mais, bien enten­du, rien ne per­met objec­ti­ve­ment de dif­fé­ren­cier un homme qui pré­tend sin­cè­re­ment être une femme trans d’un homme qui le pré­tend abu­si­ve­ment. Une grande par­tie de l’absurdité de la chose se retrouve ici. »
    « C’est plus com­pli­qué avec cer­tains trans­sexuels old school. Lorsque je les entends par­ler, que je dis­cute avec eux, je les « per­çois » dans un entre deux, mon trai­te­ment de leur parole, de leur ton, de leur pro­pos se situe dans la val­lée de l’étrange. »

    Que pen­ser, avec un regard cri­tique du genre, de l’ar­gu­ment sou­vent avan­cé : que les hommes tran­si­den­ti­fiés subi­raient de la miso­gy­nie et divers effets du patriar­cat ? (Argu­ment avan­cé pour jus­ti­fier leur pré­sence aux sein de nos espa­cesn phy­siques et men­taux (comme le montre bien cet article, en modi­fiant notre rap­port au réel)
    Que les hommes puissent vou­loir signi­fier (et par­fois vio­lem­ment) leur dés­union d’a­vec ces hommes trop fémi­nins à leur goût me semble réel dans cer­tains cas. Après, est-ce simi­laire à ce que vivent les femmes, ça je suis convain­cue que non, ça me semble une évi­dence. Notam­ment toute la construc­tion dans l’en­fance, le rap­port au corps, la vie intime et par la suite le couple, l’é­le­vage des enfants etc… Mais quid de cer­taines per­sonnes trans ayant un phy­sique fai­sant illu­sion d’être une réelle femme ? Il se peut qu’ils souffrent d’être pris pour uen femme, si je puis for­muelr ain­si. C’est pour­quoi ils demandent cer­tains droits…
    En ça, j’ai quand même du mal à me dire que ce sont des hommes « stan­dards » vou­lant sim­ple­ment infil­trer les milieux fémi­nistes ou non-mixtes. Mais je en doute pas qu’il y en ait, mal­heu­reu­se­ment. Un homme « pré­ten­dant sin­cè­re­ment une femme » pour reprendre l’ex­pres­sion de la tra­duc­trice va faire un cer­tains nombre de modi­fi­ca­tions esthé­tiques, dont cer­taines vont le rayer défi­ni­ti­ve­ment d’une socia­li­sa­tion mas­cu­line typique, alors que l’autre, pure­ment oppor­tu­niste, ne va pas en faire (on voit bien sur les diverses pho­tos de vio­leurs tran­si­den­ti­fiés qu’ils ne font géné­ra­le­ment pas de tran­si­tion). Il va de soi que ça entraîne un cer­tain « coût », en régime patriar­cal. Mais de là à dire qu’ils sont des femmes, puisque qu’ils souffrent du patriar­cat… C’est un argu­ment auquel j’ai du mal à répondre.

    1. Mer­ci pour votre com­men­taire. J’ai d’ailleurs ajou­té, après avoir évo­qué la val­lée de l’étrange, que cela me lais­sait triste et dans l’embarras. Car je vois bien que dans ce cas pré­cis, je n’ai pas affaire à un homme pré­da­teur, tout au contraire, mais à un homme qui a beau­coup souf­fert et qui souffre encore beau­coup. Quan­ti­té d’hommes souffrent et ont beau­coup souf­fert, doit-on aus­si les accep­ter dans les espaces sexo-spé­ci­fiques des­ti­nés aux femmes et qui visent à pro­té­ger la grande majo­ri­té d’entre noues qui ont été vic­times d’au moins une forme d’agression sexuelle dans les espaces publics (86% des femmes subissent les agres­sions sexistes quo­ti­diennes qui les font être en hyper­vi­gi­lance constante dans les espaces publics, et 60% des femmes au cours des 12 der­niers mois) lorsque nous savons que 22% des hommes avouent avoir eu au moins un com­por­te­ment qua­li­fiant d’agression sexuelle envers au moins une femme en France (et ce chiffre repré­sente ceux qui osent l’avouer), tan­dis que le chiffre est de 25% pour les jeunes hommes à l’université (aux USA) ? Si l’on vous dit que 22% (chiffre le plus bas) des M&Ms sont de la merde enro­bée, allons-nous dire « #pas tous les M&Ns » et mettre la main au sala­dier avec une bonne foi optimiste ?

      Je pense que les hommes sin­cè­re­ment « trans­sexuels » subissent bien des choses, mais en aucun cas ne subissent-ils la miso­gy­nie des hommes. La trans­mi­so­gy­nie est un mythe, il s’agit du tra­ves­tis­se­ment d’une réa­li­té bien plus pro­saïque. Les hommes fémi­nins ne sont pas oppres­sés « en tant que femmes » (en tant qu’ils « vivent comme des femmes » dans leur cas) comme nous le sommes parce que nous sommes des femmes, parce que nous sommes un corps femelle que les hommes se sentent légi­times de vio­ler et de s’approprier. Ils sont oppres­sés par les hommes parce qu’ils ne se conforment pas à la mas­cu­li­ni­té. Ils sont les vic­times de l’homophilie mas­cu­line viriar­cale qui exclut tous les hommes qui ne s’y conforment pas. La mas­cu­li­ni­té viriar­cale cultu­relle n’existe qu’en rela­tion à la fémi­ni­té qu’elle a construite, c’est-à-dire, l’ensemble des com­por­te­ments de sou­mis­sion impo­sés à l’autre sexe, le « sexe faible », et qui per­met aux hommes d’apparaître comme le « sexe fort ». Les hommes qui osent s’écarter de cette norme menacent bien plus la mas­cu­li­ni­té virile que les femmes qui sou­haitent la per­for­mer : les femmes tran­si­den­ti­fiées ne sont un dan­ger ni pour les hommes ni pour la mas­cu­li­ni­té virile. Elles n’ont ni la consti­tu­tion ni le pou­voir d’exercer un contrôle coer­ci­tif, qu’il soit pri­mi­ti­ve­ment phy­sique ou ins­ti­tu­tion­nel­le­ment orga­ni­sé, le second n’étant que l’évolution du pre­mier. Jamais un groupe d’hommes ne se sen­ti­ra mena­cé si une femme tran­si­den­ti­fiée entre dans leurs ves­tiaires. Au pire, cer­tains se mon­tre­ront aga­cés ou auront pitié, au mieux, ils lui seront sym­pa­thiques. Mais nul n’en aura peur. Car les femmes n’ont pas pour habi­tude mul­ti­mil­lé­naire d’exploiter les hommes et de les contrô­ler coer­ci­ti­ve­ment par le viol et tout l’éventail de com­por­te­ments contrô­lants et abu­sifs à leur dis­po­si­tion sous l’expression de « vio­lences faites aux femmes ».

      Le matriar­cat miroir du patriar­cat n’existe pas et n’a jamais exis­té. Les matriar­cats qui ont exis­té et existent encore sont des socié­tés éga­li­taires entre les sexes, avec un petit plus d’autorité poli­ti­co spi­ri­tuelle pour les femmes étant don­né que ce sont elles qui, eh bien, qui sacri­fient leur corps pour ame­ner de nou­velles vies sur terre. (Ce qui dans les spi­ri­tua­li­tés patriar­cales a été inver­sé en étant consi­dé­ré comme un crime – la Chute – et la preuve de leur infé­rio­ri­té, car le monde sen­sible est un « faux » monde, le « vrai » monde rési­dant dans le ciel ou dans les idées mathé­ma­tiques : ce sont les fon­de­ments de la civi­li­sa­tion occi­den­tale même).
      De même, la fémi­ni­té viriar­cale n’existe pas. Les femelles humaines ne des­cendent pas des hyènes. Les femelles humaines sont « vio­lables », les hyènes, par leur phy­sio­lo­gie sin­gu­lière dans le royaume des mam­mi­fères, ne le sont pas. Ce n’est pas aux femmes d’accommoder les dom­mages cor­ré­la­tifs mas­cu­lins de la mas­cu­li­ni­té viriar­cales. Nous devons nous battre pour for­cer les hommes à chan­ger, et nous ne pou­vons les « for­cer » à chan­ger qu’en refu­sant caté­go­ri­que­ment la reco­lo­ni­sa­tion de nos espaces et ne pas céder à leurs inti­mi­da­tions (leurs menaces de viols, de doxxing, etc.). Sur ce sujet : https://audreyaard.substack.com/p/oui-je-suis-du-mauvais-cote-de-lhistoire

      Pour aller plus loin je vous ren­voie à un texte sur la mas­cu­li­ni­té viriar­cale (https://www.partage-le.com/2022/11/27/la-binarite-des-sexes-nest-pas-une-construction-sociale-occidentale-contrairement-a-lidentite-de-genre-par-l-beatrice/)et à la vidéo de l’ITW de Julie Bin­del sous-titrée (https://www.facebook.com/763992522/videos/899814264366641/)

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