Préface : Un coup d’état contre la nature – dirigé par le complexe industriel non-lucratif
Il est quelque peu ironique, alors que les activistes climatiques anti-REDD (réduction des émissions de la déforestation et de la dégradation des forêts), les organisations (des organisations populaires légitimes existent) et les environnementalistes autoproclamés, qui se considèrent progressistes, s’expriment contre la marchandisation des ressources naturelles, qu’ils fassent simultanément la promotion de la campagne de désinvestissement. La campagne de désinvestissement résultera (et y parviendra) en une injection colossale de monnaie vers les portfolio lourdement investi, et donc dépendant de, la marchandisation intense et la privatisation des dernières forêts de la terre (via REDD), de l’eau, etc. (les « marchés » environnementaux). Ce tour de force sera effectué avec une précision chirurgicale sous couvert de gestion environnementale et « d’internalisation des externalités négatives à travers une tarification appropriée » (Sustainable Capitalism, February 15, 2012, Generation Investment Management LLP). Par conséquent, ironiquement (ne serait-ce qu’en apparence), le plus grand essor dans l’ultime capture corporatiste des dernières ressources de la Terre est en cours, et sera accompli, par ces mêmes environnementalistes et groupes environnementaux qui prétendent s’opposer à une telle domination et capture corporatiste.
Au-delà de leurs dons en milliards (exempt d’impôt) de dollars (c’est-à-dire d’investissements) aux plus accommodants du complexe industriel non-lucratif via leurs fondations, les corporations n’ont presque rien à faire ; l’exploit est accompli à la fois par les faux environnementalistes et les légitimes en tandem avec une populace crédule, ne se doutant de rien. (Une populace avec presque aucune compréhension de 1. La magnitude de notre crise écologique, 2. Les causes profondes de la crise planétaire, 3. L’utilisation du complexe industriel non-lucratif comme instrument d’hégémonie.)
La marchandisation des biens communs représentera le plus important et le plus habile coup d’État de l’histoire de la domination corporatiste – un fait accompli extraordinaire, d’une échelle, et avec des répercussions pour l’humanité et toute la vie, sans précédent.
De plus, il importe peu que l’argent soit ou pas déplacé des investissements directs dans les compagnies de combustibles fossiles vers les soi-disant « investissements socialement responsables ». Le fond du problème c’est que toutes les corporations de la planète (et donc, tous les investissements de la planète) requièrent et continueront à requérir des quantités massives d’énergie (dont des combustibles fossiles) pour continuer à croître et à s’étendre à l’infini – ce que requiert le système économique du capitalisme industrialisé.
Les éoliennes et les panneaux solaires servent d’images (marketing) magnifiques, et pourtant sont quelque peu illusoires – le vernis de la marchandisation des biens communs, qui est l’objectif fondamental de Wall Street, eux qui sont les conseillers de la campagne de désinvestissement.
Nous nous retrouvons par conséquent peu disposés à reconnaître la nécessité de démanteler le système économique du capitalisme industrialisé, préférant à la place embrasser une illusion conçue par le pouvoir corporatiste.
L’objectif de cette série d’investigations est d’illustrer (et véritablement, de prouver) ce prémisse.
« Par une récente après-midi de semaine, trois hommes sortirent des bureaux du fonds de défense de l’environnement de Manhattan, pour aller déjeuner ensemble. À gauche, un économiste en chef d’EDF. À droite un expert environnemental du gouvernement soviétique. Entre, un homme d’affaires, trader dans l’initiative récente d’achat et de vente de droits de pollution. Ensemble ce trio illustre comment le nouvel environnementaliste se met en place : mondiale, plus coopératif que conflictuel – et avec le business au centre. »
— ENVIRONMENTALISM : THE NEW CRUSADE, CNNMoney Fortune, February 12, 1990
Une marée de rapports, apparemment urgents, fut divulguée en vague sur le mois de novembre 2012. Ceci afin de faire naître un sentiment d’urgence, de signaler implicitement, la lancée de « l’économie verte » à la société civile. Le rôle du complexe industriel non-lucratif, dans le dévoilement de l’illusoire économie verte au monde, n’a jamais été aussi essentiel. Car il n’y a qu’à travers ces institutions qu’il est possible de manipuler la société civile, afin qu’elle embrasse un modèle suicidaire qui enfermera une fois pour toutes, le monde dans une trajectoire écologique catastrophique et irréversible. Le complexe industriel non-lucratif, en tandem avec le complexe des médias-entreprises, permet aux euro-américains de continuer collectivement, avec leurs addictions fétichisées et leurs idéologies racistes implicites, sans relâche – en échange du sacrifice de nos propres enfants pour apaiser les Dieux Entreprises.
« Toutes les forces de cooptation, ayant participé à l’élection et à la réélection d’Obama, se rassemblent maintenant dans une grande cohésion, un grand financement, du haut vers le bas. Ces amis pensent détenir la stratégie pour sauver la planète, et cela coïncide merveilleusement avec le remplumage de leurs propres nids ! The Insider pourrait sembler être un problème mineur, mais comme Counterpunch lui-même, il ne le supporte pas, car cela les expose pour ce qu’ils sont vraiment, des petits chiens et des valets libéraux, chargés de relations publiques, financées, par ce que j’appelle les 1 % Dem. Cette connerie, de « construction d’un mouvement progressiste » de la foule de Van Jones, n’est pas un mouvement pour un changement radical. C’est un leurre destiné à maintenir le statu quo des libéraux-entreprises. Mais pour beaucoup, c’est dur à voir quand on a la tête baissée et qu’on ne pense qu’au financement ».
- John Stauber, auteur, répondant à un membre du Business Ethics Network (BEN) ayant réagi avec indignation, et feignant la confusion après la citation de Stauber, lui-même cité dans un article de Counterpunch. La punition de Stauber fut l’expulsion du BEN.
La plus récente campagne de 350.org c’est sa tournée du désinvestissement, « faites le calcul ». L’objectif identifié de la campagne, qui apparaît en ligne comme projet débarrassé du fossile [2], c’est de mettre la pression sur les institutions religieuses et éducatives, les gouvernements municipaux et d’états, et les autres institutions qui servent le bien public, afin qu’ils désinvestissent les combustibles fossiles. L’identité de l’individu qui s’est enregistré sur le site Web, est listée comme privé. De telles campagnes (qui diffèrent peu des courses électorales, d’où le nom de « campagne ») sont conçues, et donc destinées, non pas à remettre en question, l’hégémonie de l’industrie du combustible fossile, de façon pratique, mais plutôt de manière théorique. Les campagnes de relations publiques aussi sophistiquées que celle-ci, sont assez brillantes, pour une multitude de raisons. Camouflées sous couvert de s’attaquer aux racines profondes de la crise climatique mondiale, de telles campagnes ne changent rien. Au contraire, elles s’assurent que la populace participe à ce qu’elle pense être une action significative – et rien de plus.
350.org « Faites le Calcul »
Le leader de 350.org, Bill McKibben, nous raconte que « ça n’est pas acceptable de profiter du saccage de la planète », mais il ne nous dira pas que la violence sans précédent, qui s’abat sur la planète et ses habitants les plus vulnérables, est intrinsèquement liée au système de capitalisme industrialisé. Il ne vous rappellera pas le simple fait que chaque jour, où l’on permet à ce système de continuer, représente un jour de profits de plus, sur le saccage de la planète, et nous rapproche de l’annihilation mondiale partagée. De plus, McKibben sape toute campagne qui chercherait à mettre ce problème critique en première ligne du débat mondial.
De nombreuses insuffisances, à la fois dans la science et la logique, ont déjà été clairement identifiées par des activistes renommés. Le 24 juillet 2012, 3 réponses à l’article du 19 juillet 2012 de McKibben dans le Rolling Stone magazine [« la nouvelle équation terrifiante du réchauffement climatique : trois nombres simples qui s’ajoutent à la catastrophe mondiale – ne laissent aucun doute sur la véritable identité de l’ennemi »], par Anne Petermann, Dr. Rachel Smolker, et Keith Brunner furent publiés sur le projet écologique de justice mondiale. En voici quelques extraits :
Anne Petermann écrit :
« Ces mêmes marchés qui nous ont conduit aujourd’hui au bord du précipice, peuvent-ils maintenant nous fournir un parachute ? McKibben souligne que dans ce système, ceux qui ont l’argent, ont le pouvoir. Alors pourquoi essayons nous de réformer ce système ? Pourquoi ne le transformons-nous pas ? […] Si on se concentre seulement sur l’élimination des combustibles fossiles, sans changer le système sous-jacent, alors des choses très mauvaises se produiront, étant donné que le système lui-même est insoutenable. C’est un système conçu pour transformer le « capital naturel » et le travail humain en des profits gargantuesques pour une petite élite : les soi-disant 1%. Qu’il fonctionne grâce aux combustibles fossiles, aux biocarburants ou même à de massives installations solaires et éoliennes, le système continuera à dévorer les écosystèmes, à déplacer les communautés vivant dans les forêts, les peuples indigènes et les agriculteurs vivriers de leurs terres, à écraser les syndicats de travailleurs, et plus généralement à faire de la vie un enfer pour la grande majorité des gens de la planète. Voilà ce qu’il fait. »
Keith Brunner writes :
« Bill offre une campagne de désinvestissement, à la South Africa, comme stratégie préférée pour s’attaquer financièrement aux compagnies de combustibles fossiles. Ça a l’air très bien, sauf quand vous regardez les tendances des dernières années, des grands investisseurs institutionnels – comme les fonds de pension et les dotations universitaires – qui déplacent leur argent (souvent via un intermédiaire de capital privé) vers, entre autres choses, les « marchés émergents » de ressources naturelles et les infrastructures, facilitant l’accaparement de terres et de ressources dans le sud. C’est ce que les gestionnaires de fonds « progressistes » conscients de la crise climatique (commes les gens du CERES) défendent, et c’est un problème. Et c’est une autre raison pour laquelle il passe à côté du problème : oui, les corporations de combustibles fossiles sont le grand méchant loup, mais tout aussi problématique, il y a le système d’investissement et de retour qui nécessite une croissance économique (ça s’appelle le capitalisme). Que le gérant de la dotation universitaire d’Harvard ait comme « responsabilité fiduciaire » d’obtenir un certain retour annuel, signifie qu’ils vont devoir investir leur argent de façon à obtenir une croissance, dans des fonds, ou des firmes, ou des états, (quelle différence de toute façon?), qui croissent à travers l’exploitation des gens, et le démantèlement des écosystèmes. Ce n’est pas par l’investissement que nous allons arriver à une planète habitable. Nous devons nous concentrer sur les causes premières, et les fausses solutions, mettre en avant les solutions communautaires, et pousser les grands groupes verts à devenir plus holistiques dans leurs analyses, afin qu’ils ne nous tirent pas tous dans le pied ».
Une apparence de lâches
Ce point de vue, soutenu par la plupart des activistes, même les plus remarquables, selon lequel nous devons « pousser les grands groupes verts à devenir plus holistiques dans leurs analyses, afin qu’ils ne nous tirent pas tous dans le pied », est basé sur la naïveté collective, et le faux postulat selon lequel les O.N.G. environnementales corporatistes peuvent être poussées à « faire la bonne chose », par persuasion morale. Le refus inébranlable des vrais activistes et des vrais groupes populaires, de reconnaître et d’exposer résolument le complexe industriel non-lucratif comme le gardien de l’hégémonie dominante, représente le plus grave et le plus important échec du mouvement.
Ils ne nous tirent pas « tous dans le pied », mais directement dans la tête – à bout portant.
Aussi surréaliste que ça puisse paraître, le soi-disant mouvement pour le climat a saboté toute chance d’atténuation de l’effondrement écologique mondial, et a au contraire ouvert la voie au profit corporatiste, à la déforestation, au financement et à l’omnicide total. Collectivement, cette faction des 1 % a plus d’estime pour ses privilèges que pour la vie elle-même.
Le tour de désinvestissement de 350.org vous est proposé par Wall Street
« Les efforts, pour contrôler les impacts destructeurs des corporations, doivent porter en eux une critique du pouvoir corporatiste, et une volonté de démanteler le pouvoir corporatiste, sinon ils ne font que renforcer, plutôt que remettre en question, les structures du pouvoir, et sapent les luttes populaires pour l’autonomie, la démocratie, les droits humains et la soutenabilité environnementale ».
– Corporate Watch
Les gens pourraient se demander pourquoi les financiers de la destruction du climat en auraient quelque chose à foutre du climat. On pourrait bien se demander pourquoi, McKibben et ses amis sont allés voir les milliardaires de Wall Street, pour solliciter leur apport (et leur permission) précisément sur le type exact de désinvestissement, qui leur serait le plus acceptable. Cependant, la réponse est étonnamment simple : le tour de désinvestissement « faites le calcul » n’est pas une campagne visant à perturber (et encore moins à détruire) Wall Street, le lobby énergétique, ou le capital financier – c’est plutôt une campagne stratégique de relations publiques, une nouvelle distraction, magistralement orchestrée, pour les masses.
Un élément-clé au sein du complexe industriel non-lucratif, c’est que les « mouvements » sont créés du haut vers le bas. Dans le cas des organisations de Rockfeller 350.org1Sky, le fonctionnement est simple : les groupes locaux de 350.org reçoivent leurs ordres de marche directement de leurs supérieurs (350.org international), tandis que « les supérieurs » (McKibben etc.) reçoivent leurs ordres de marche directement de leurs donateurs – et dans le cas du tour « faites le calcul » de 350.org, ces donateurs sont des investisseurs de Wall Street.
McKibben, ainsi que le staff principal de 350.org, a développé la campagne de désinvestissement en consultation avec les investisseurs du CERES – qu’ils appellent affectueusement leurs « amis de Wall Street ».
De telles loyautés sont normales dans le monde environnemental corporatiste où les businessman de Wall Street sont appelés « nos amis de Wall Street ». Qu’importe si Wall Street est la véritable cause de nos multiples crises écologiques et économiques, sans parler de la crise alimentaire mondiale. Ces crises ne sont pas vraiment des « crises » dans le sens spontané de la chose, elles sont plutôt des stratégies visant à faire perdurer les profits des corporations insatiables.
Le communiqué du tour de désinvestissement de 350.org stipule :
« Ce sont de simples mathématiques : nous pouvons encore brûler 565 gigatonnes de carbone, et rester en dessous de la limite des 2 °C de réchauffement – au-delà de cette limite, c’est la catastrophe pour la vie sur Terre. Le seul problème ? Les corporations de combustibles fossiles ont actuellement en leur possession 2795 gigatonnes, plus de cinq fois la limite maximale. Et ils comptent tout brûler – sauf si on les en empêche. » [Emphases d’origine.]
Ce que McKibben et les « verts progressistes » ne vous diront pas
Le communiqué de 350.org ci-dessus est incroyablement dangereux et trompeur parce qu’il implique deux choses :
1- que l’on peut continuer à brûler des combustibles fossiles pendant un certain temps ;
2- qu’il n’y a qu’au-delà des 2 °C que l’on risque la catastrophe pour la vie sur Terre
Il oublie de mentionner un troisième fait : celui que nous sommes déjà certains d’atteindre les 2,4 °C d’augmentation de température (Ramanathan & Feng), même en arrêtant aujourd’hui de brûler tout combustible fossile.
« [mais] nous devrions accepter le fait que nous avons déjà rayé de la carte certaines communautés de l’hémisphère sud pour avoir choisi cette limite de 2° centigrades. »
« … nous avons besoin de réductions urgentes et radicales au-delà de tout ce que nous avons été préparés à affronter, nous avons attendu trop longtemps pour mettre en place une limite de 2 °C ».
– Professeur Kevin Anderson
Mettons de côté le fait qu’en 1990 le « groupe de conseils sur les gaz à effet de serre » avait averti qu’une augmentation globale de la température « au-delà d’1 degré Celsius pourrait provoquer rapidement, des événements imprévisibles et non-linéaires, qui entraîneraient des dommages étendus sur les écosystèmes », tandis qu’une augmentation de température de 2 °C était perçue comme « une limite supérieure, au-delà de laquelle les risques de graves dommages aux écosystèmes, et de réactions non-linéaires, augmenteraient rapidement ». La disparition de ce papier représente peut-être le plus important camouflage de l’histoire, sans parler de crime contre l’humanité. Ce rapport fut calmement et délibérément enterré par les O.N.G. telles que Greenpeace, les amis de la Terre, la communauté scientifique et les gouvernements. La croissance économique, sacro-sainte, trompe la vie elle-même.
350.org nous explique que les corporations de combustibles fossiles « prévoient de tout brûler – à moins qu’on ne les arrête ». Mais qu’on les arrête en faisant quoi ? En demandant à Obama ? En signant des pétitions sur 350.org ? En demandant à nos universités de ne pas investir dedans ? Au lieu de s’attaquer à la réalité (capitalisme, impérialisme, militarisme, etc.) 350.org continue à guider la fabrique d’espoir, pour l’industrie de l’espoir. 350.org garantit l’acceptation du public, la séduction des masses, avec leur marque, précisément parce qu’il ne dit pas à leur audience-cible, qu’il sera absolument nécessaire d’abandonner leurs privilèges, si nous voulons sauver une planète propice à la vie, tandis que nous entrons dans l’ère de l’anthropocène en chute libre. [4] 350.org garantit à leur public qu’il n’est pas nécessaire de remettre en question (et encore moins de démanteler) notre système économique (suicidaire), étant donné que la catastrophe climatique « réelle » est encore loin, très loin. 350.org, c’est le soma du XXIe siècle.
« Une fausse conscience de la nature du libéralisme américain a été l’arme idéologique la plus puissante que le capitalisme américain ait utilisée pour maintenir son hégémonie ».
– James Weinstein
Il est important de remarquer l’obsession de 350.org envers les combustibles fossiles, exclusivement. Avec certitude, 350.org, en tandem avec le complexe industriel non-lucratif, prépare stratégiquement la populace, à accepter ce que Guy McPherson appelle la « troisième révolution industrielle ». Cet agenda de « richesse climatique » inclura de fausses solutions comme la biomasse, le consumérisme « vert » débridé, les mécanismes de compensation carbone du marché comme le REDD, etc. Parmi ce qu’il n’inclura pas : la nécessité urgente de détruire l’empire militaire en expansion, d’abandonner/démanteler notre système économique actuel, d’affronter l’élevage industriel, de massivement décroître et de conserver, d’employer des tactiques d’autodéfense par tous les moyens nécessaires, tout ce qu’il est impératif d’affronter si nous voulons atténuer l’omnicide total. En gros, l’agenda n’inclura pas tout ce qui menacerait réellement le système. Il s’agit toujours de diviser pour mieux régner, avec ces O.N.G. corporatistes financées par l’élite. Il s’agit de s’assurer que les masses mènent des combats insignifiants, et ne « relient jamais les points entre eux », pour utiliser l’expression de 350.org. Comme le fondateur d’Avaaz, MoveOn.org, 350.org induit brillamment le consentement.
Le langage fait tout dans le monde du fantasme et des relations publiques. Examinons la déclaration de McKibben exprimant la surprise, après que son article « des maths terrifiantes » ait été « étonnamment virale » dans le Rolling Stone magazine. C’est loin d’être le cas. Dans le complexe industriel non-lucratif, toute « communication » est évaluée avant sa publication, afin de mesurer la réponse du public et son maintien du statu quo. La plupart des communiqués ne sont pas écrits par des soi-disant activistes, mais plutôt par des responsables de relations publiques hautement qualifiés, qui aident l’industrie de l’espoir à distribuer leur campagne inoffensive aux réseaux sélectionnés/coopératifs.
350.org et ses amis servent un objectif vital. Ces organisations garantissent, avec succès, que le public se sente bien. Simultanément, ils garantissent l’obéissance et la passivité à l’état, afin de sécuriser les structures de pouvoir en place et de les garder intactes. Comme toujours, de telles campagnes se concentrent sur l’établissement de listes, pour ceux qui bénéficient et profitent des listings d’e-mails, etc. Cela se fait au prétexte de « la construction de mouvement ». Pas besoin d’être un scientifique de haut niveau, pour comprendre rationnellement, que des organisations, financées par les fonds des frères Rockefeller, ne feront jamais rien de significatif, qui s’attaquerait vraiment aux causes profondes de la crise climatique. C’est un jeu cynique joué par ceux qui financent les O.N.G. au sein du complexe industriel non-lucratif. Les coûts sont élevés, avec plus de 400 000 personnes qui meurent chaque année des désastres liés au climat. Heureusement pour l’oligarchie, un racisme profondément ancré qui ronronne comme un chaton, résonnant sur le vernis du mouvement, garantie que ces morts n’aient aucune signification. [27 septembre 2012 : « près de 1000 enfants par jour meurent à cause du changement climatique, selon une étude hors du commun publiée mercredi (PDF), et le total annuel s’élève à 400 000 personnes par an, à travers le monde »].
L’auteur Christian Parenti soulève de nombreuses questions clés à considérer, dans son article « problème avec les maths : « la campagne de désinvestissement du carbone de 350 est-elle complète ? », publié le 29 novembre 2012 :
« La version officielle du capitalisme stipule que les marchés boursiers existent, afin d’aider les firmes à engranger de la monnaie pour l’investissement. Mais une étude empirique révèle que l’opposé est plus souvent le cas. En réalité, le marché boursier, bien que culturellement puissant, n’est pas particulièrement important pour comprendre, comment le capitalisme crée véritablement la richesse (et la pollution).
« Donc, comment, abandonner des actions Exxon menacera-t-il ses revenus, c’est-à-dire, son fonctionnement ? Cela pourrait, d’ailleurs, améliorer le ratio cours/bénéfices de la compagnie, rendant les actions plus attrayantes pour les acheteurs immoraux. Ou cela pourrait permettre à la firme de racheter plus facilement ses actions (ce qu’elle fait massivement depuis cinq ans) afin de conserver une plus grande part de ses bénéfices et de développer ainsi plus de gisements pétroliers ».
Il faut souligner que la campagne de désinvestissement de Wall Street 350.org sert un autre objectif vital. Nous avons désormais atteint le moment critique où les corporations vont commencer le processus d’abandon de leurs avoirs toxiques, tout en préparant une nouvelle vague sans précédent, de « richesses climatiques ». Nous allons assister à la transition mondiale vers de fausses solutions rentables, sous couvert « d’économie verte », associée à la marchandisation/privatisation complète des biens communs de l’humanité, par les corporations les plus puissantes du monde. Tout cela pendant qu’elles se Greenwasheront elles-mêmes en nobles intendantes de la Terre. L’épisode de fin de l’espèce humaine, sera le plus grand mensonge jamais vendu raconté.
On ne peut comprendre le présent qu’en ayant bien comprit le passé. C’est pourquoi, afin de comprendre la présente campagne de désinvestissement de 350.org, nous devons regarder à la conception/création du partenaire de 350.org : la coalition pour des économies écologiquement responsables (CERES).
CERES 2013 : Les invités : 350, PG&E, Bloomberg & GM

Qu’est-ce que le CERES :
Qu’est-ce que le CERES ? Le CERES sont les marionnettistes de Wall Street du XXIe siècle, qui, dernièrement, tire les ficelles derrière la campagne de désinvestissement de 350.org. Le CERES représente le cœur même du nexus : les millionnaires libéraux, leurs fondations, les « activistes » qu’ils gèrent, et, plus important, là où les ploutocrates investissent leur fortune personnelle et celle de leurs fondations. [« En tant qu’organisation non-lucrative, le CERES dépend de soutien des fondations, d’individus et d’autres donateurs afin d’accomplir sa mission d’intégration de la soutenabilité dans les pratiques de business quotidiennes, pour la santé de la planète et de ses habitants »]. (Source : Ceres 2010 Annual Report)
Au conseil d’administration du Ceres, nous retrouvons des partenaires d’O.N.G.clés : le conseil national de défense des ressources (NRDC), le Sierra Club, l’institut des ressources du monde (World Resources Institute), Ecological Solutions Inc. et Green America, pour n’en citer que quelques-uns.
Le réseau de compagnie du Ceres (le premier pilier) représente la crème de la crème (approximativement 70 corporations) du monde des entreprises. Par exemple on y retrouve Citi, Bloomberg, Coca-Cola, Ford Motor Company, General Motors, Suncor et Virgin. La coalition du Ceres (le second pilier) est composée de plus de 130 investisseurs institutionnels, groupes environnementaux et de « défense d’intérêts sociaux », et d’organisation d’intérêt public. On retrouve par exemple au sein de la coalition du Ceres, le sierra Club, les amis de la Terre, le fonds de gestion des actifs Rockfeller, le NRDC, le WWF (World Wildlife Fund), Rainforest Action Network, Service Employees International Union (SEIU — un des fondateurs d’Avaaz), et la Carbon Neutral Company.
Les premiers et 2 mai 2013 à San Francisco, en Californie, Bill McKibben a rejoint le partenaire de la campagne de désinvestissement de 350, le CERES, à leur conférence. D’après le communiqué du CERES :
« Bill McKibben rejoint le cercle des invités de la conférence du CERES ! Bill McKibben est l’auteur d’une douzaine de livres et est le fondateur de la campagne populaire pour le climat 350.org. Le Time Magazine l’appelle « le meilleur journaliste vert de la planète », et le Boston Globe a dit de lui en 2010 qu’il était « probablement l’environnementaliste le plus important du pays ».
McKibben a rejoint d’autres invités comme Ezra Garrett (vice-président des relations communautaires et responsable de la chaîne logistique du développement durable pour Pacific Gas et Electric Corporation), Curtis Ravenel (responsable international, groupe du développement durable, Bloomberg), Mike Robinson (vice-président pour l’environnement, les politiques de sûreté d’énergie, General Motors), et de nombreux autres impliqués dans la promotion et la croissance du « capitalisme vert ». Parmi les sponsors, Bank of America, PG&E, Bloomberg, Wells Fargo, Sprint, Baxter, Citi, Ford, GM, Brown-Forman, Walt Disney, Prudential, TimeWarner et nombre d’autres corporations parmi les plus puissantes de la planète. Le prix des tickets pour la conférence allait de 600 $ (tarif étudiant) à 1200 $, avec un prix promotionnel de 259 $ pour la nuit au Fairmont Hotel.
L’art du discours des O.N.G.
Des wagons-citernes au port de Coquitlam yard, à l’est de Vancouver, sur la côte pacifique canadienne. Photo by DARRYL DYCK. L’Economic Planning Associates (EPA) estime que les fabricants de wagons en ont reçus des commandes pour plus de 89 000 — un niveau sans précédent depuis le début des relevés en 1980. Les livraisons sont estimées atteindre les 58 000 unités en 2012 et se stabiliser à plus de 64 000 unités par an, sur les cinq prochaines années. À cause du manque de capacité de fabrication, le prix de l’unité augmente, et certaines indications suggèrent que les fabricants sont alors sélectifs, sur les commandes qu’ils prennent. [Source : Shale Oil and Gas : Revitalizing Inland Transportation Networks, Sept 2012]
« Mr. Rockefeller n’aurait pas trouvé meilleure garantie pour ses centaines de millions, qu’en investissant l’un d’entre eux dans le subventionnement de toutes les agences appelant au changement social et au progrès ».
– Frank Walsh, The Great Foundation
Et pendant que votre attention est habilement divertie du fait que des algues géantes prolifèrent, maintenant, sous une banquise arctique de plus en plus fine (18 juin 2012 : « d’abord, nous pensions : ‘ça n’est pas possible. Impossible que ça soit ce à quoi ça ressemble », a dit Kevin R. Arrigo, un océanographe biologiste à l’université de Stanford en Californie et auteur en chef de l’étude, à CBCNews.ca. « Ensuite on s’est demandé : ‘quelqu’un a déjà vu ça avant?‘ »)… et tandis que des crabes géants, de plus d’un mètre d’envergure, envahissent l’Antarctique en plein réchauffement, et tandis que les élites espèrent, que vous adhériez à la campagne de désinvestissement, qui ne nous donne en réalité pas la moindre chance d’éviter l’effondrement écologique planétaire, en pleine accélération, je vous laisse avec ça…
Le discours des O.N.G. en Amérique prend plusieurs formes. Dans les années 60, le mouvement révolutionnaire des black power reçut des subventions massives et prit alors la forme du black capitalism, et le produit de cette solution, c’est le statut actuel des Américains noirs, dont la situation est bien pire, qu’à presque n’importe quelle autre époque de leur histoire à tous points de vue. De la même façon, les conséquences désastreuses du développement et de la dégradation environnementale, résultant d’une consommation de masse effrénée, basée sur le modèle occidental, ouvre la voie pour le dialogue de l’illusoire « économie verte » comme solution. La nécessité de bannir la nourriture génétiquement modifiée devient une exigence classiste (qui sera ingéré par les pauvres, les ignorants et les enfants) d’étiquetage inefficace. [Les pauvres n’ont toujours pas le choix, l’étiquetage des produits ne sert qu’aux classes moyennes/aisées qui peuvent choisir leur nourriture, et n’a aucun effet de protection de l’environnement, parce que les produits sont labellisés n’entraine en rien l’arrêt de l’utilisation d’OGM/pesticides/herbicides/etc.]
La nécessité d’arrêter les exploitations de sables bitumineux dans leur totalité (comme annoncé audacieusement par les voix les plus conservatrices tel que le scientifique James Hansen – « Put the Brakes on Tar Sands, Feb 18, 2009 », et l’ancien dirigeant de l’IPCC, Rajendra Pachauri des Nations unies – “Canada’s oil sands should be shut down.” Sept. 21, 2009) a délibérément évolué en « stopper le Keystone XL ! » – Omettant commodément le fait que le pipeline Keystone était terminé aux 2/3 et opérait déjà, avant que la campagne KXL soit impulsée dans le domaine public. L’exigence originelle populaire de 2005 « d’arrêter les sables bitumineux » s’est évaporée, elle n’est plus qu’un lointain souvenir. Et tandis que 350.org s’exclame « stoppez le Keystone XL ! » (Un message bien relayé par les médias « progressistes » obéissants), l’industrie ferroviaire était occupée à construire les 40 000 wagons-citernes pétrolier, requis pour le transport du pétrole issu des sables bitumineux, et a presque fini. [4] L’argument de vente de cette méthode de transit, mis en avant par l’industrie, c’est qu’à moins d’avoir des munitions semi-perforantes, ces wagons ne fuiront pas même s’ils déraillent. Pendant ce temps-là, la construction des infrastructures pétrolières au Dakota du Nord (près des champs de fracking pétrolier de Bakken) s’est achevée. 8 trains de 110 wagons ont la même capacité de charge que le Keystone et que le KXL. BNSF Corp transporte maintenant approximativement 500 000 barils de pétrole chaque jour. Nulle part dans la campagne KXL il ne fut mentionné que le 3 novembre 2009, Berkshire Hathaway a annoncé que, à l’aide d’actions et de cash à hauteur de 26 milliards de dollars, elle ferait l’acquisition des 77,4 % restants de la Burlington Northern Santa Fe Corporation, parente de BNSF Railway, qu’elle ne possédait pas encore… ce fut la plus importante acquisition en date de l’histoire de Berkshire. [Further reading : Keystone XL : The Art of NGO Discourse | Part I]
Les magnats du pétrole mettent en place le meilleur des mondes. Ils trinquent à notre naïveté collective et à notre attitude servile.
La liste des discours d’O.N.G. à succès continu encore et encore. Des milliards de dollars ne sont pas investis dans le complexe industriel non-lucratif pour rien.
A venir : partie 2 : les amis de 350 à Wall Street – les « opportunistes de la richesse climatique » – Le CERES & le réseau des investisseurs sur le risque climatique (INCR)
[Cory Morningstar est une journaliste d’investigation indépendante, écrivaine et activiste environnementale, qui se concentre sur l’effondrement écologique mondial et les analyses politiques du complexe industriel non-lucratif. Elle réside au Canada. Ses écrits récents peuvent se retrouver sur différents sites (en anglais) : Wrong Kind of Green, The Art of Annihilation, Political Context, Counterpunch, Canadians for Action on Climate Change and Countercurrents. Vous pouvez la suivre sur Twitter :@elleprovocateur ] Article initialement publié sur le site de Cory Morningstar (en anglais).
Traduction : Nicolas CASAUX