Effondrement du système : point zéro (par Chris Hedges)

chris_hedgesArticle ori­gi­nal publié en anglais sur le site Adbus­ters, le 8 février 2010.
Chris­to­pher Lynn Hedges (né le 18 sep­tembre 1956 à Saint-Johns­bu­ry, au Ver­mont) est un jour­na­liste et auteur amé­ri­cain. Réci­pien­daire d’un prix Pulit­zer, Chris Hedges fut cor­res­pon­dant de guerre pour le New York Times pen­dant 15 ans. Recon­nu pour ses articles d’analyse sociale et poli­tique de la situa­tion amé­ri­caine, ses écrits paraissent main­te­nant dans la presse indé­pen­dante, dont Harper’s, The New York Review of Books, Mother Jones et The Nation. Il a éga­le­ment ensei­gné aux uni­ver­si­tés Colum­bia et Prin­ce­ton. Il est édi­to­ria­liste du lun­di pour le site Truthdig.com.


Nous sommes à l’o­rée d’un des moments les plus dan­ge­reux de l’humanité…

Alek­san­dr Her­zen, s’a­dres­sant, il y a un siècle, à un groupe d’a­nar­chistes qui vou­laient ren­ver­ser le Tsar, leur rap­pe­la qu’il n’é­tait pas de leur devoir de sau­ver un sys­tème mou­rant, mais de le rem­pla­cer : « Nous pen­sons être les méde­cins. Nous sommes la mala­die ». Toute résis­tance doit admettre que le corps poli­tique et le capi­ta­lisme mon­dia­li­sé sont morts. Nous devrions arrê­ter de perdre notre éner­gie à ten­ter de les réfor­mer ou à les sup­plier de bien vou­loir chan­ger. Cela ne signi­fie pas la fin de la résis­tance, mais cela implique de toutes autres formes de résis­tance. Cela implique d’u­ti­li­ser notre éner­gie pour construire des com­mu­nau­tés sou­te­nables qui pour­ront affron­ter la crise qui se pro­file, étant don­né que nous serons inca­pables de sur­vivre et de résis­ter sans un effort coopératif.

Ces com­mu­nau­tés, si elles se retirent de façon pure­ment sur­vi­va­liste sans tis­ser de liens entre elles, à tra­vers des cercles concen­triques for­mant une com­mu­nau­té éten­due, seront aus­si rui­nées spi­ri­tuel­le­ment et mora­le­ment que les forces cor­po­ra­tistes déployées contre nous. Toutes les infra­struc­tures que nous édi­fions, tels les monas­tères du Moyen-âge, devraient cher­cher à main­te­nir en vie les tra­di­tions artis­tiques et intel­lec­tuelles qui rendent pos­sible la socié­té civile, l’hu­ma­nisme et la pré­ser­va­tion du bien com­mun. L’ac­cès à des par­celles de terres culti­vables devien­dra essen­tiel. Nous devrons com­prendre, comme les moines médié­vaux, que nous ne pou­vons pas alté­rer la culture plus large, qui nous englobe, au moins à court terme, mais que nous devrions être en mesure de conser­ver les codes moraux et la culture pour les géné­ra­tions qui vien­dront après nous. La résis­tance sera réduite à de petits et sou­vent imper­cep­tibles actes de déso­béis­sance, comme l’ont décou­vert ceux qui ont conser­vé leur inté­gri­té durant les longues nuits du fas­cisme et du com­mu­nisme du 20ème siècle.

Nous sommes à la veille d’une des périodes les plus sombres de l’his­toire de l’hu­ma­ni­té, à la veille de l’ex­tinc­tion des lumières d’une civi­li­sa­tion, et nous allons enta­mer une longue des­cente, qui dure­ra des décen­nies, sinon des siècles, vers la bar­ba­rie. Les élites nous ont effec­ti­ve­ment convain­cu du fait que nous ne sommes plus aptes à com­prendre les véri­tés révé­lées qui nous sont pré­sen­tées, ou à com­battre le chaos entrai­né par la catas­trophe éco­no­mique et envi­ron­ne­men­tale. Tant que la masse de gens effrayés et déso­rien­tés, gavée d’i­mages per­met­tant son hal­lu­ci­na­tion per­pé­tuelle, demeure dans cet état de bar­ba­rie, elle peut pério­di­que­ment se sou­le­ver avec une furie aveugle contre la répres­sion éta­tique crois­sante, la pau­vre­té éten­due et les pénu­ries ali­men­taires. Mais la capa­ci­té et la confiance néces­saires pour remettre en ques­tion et défier à petite et grande échelle les struc­tures de contrôle lui feront défaut. Le fan­tasme des révoltes popu­laires éten­dues et des mou­ve­ments de masse ren­ver­sant l’hé­gé­mo­nie de l’É­tat capi­ta­liste n’est que ça : un fantasme.

Mon ana­lyse se rap­proche de celles de nom­breux anar­chistes. Mais il y a une dif­fé­rence cru­ciale. Les anar­chistes ne com­prennent pas la nature de la vio­lence [Pas d’ac­cord du tout avec ce pas­sage et ces décla­ra­tions sur « la vio­lence » et « les anar­chistes », la vio­lence (défi­nit comme l’u­ti­li­sa­tion de la force, ou la lutte armée) est une tac­tique de lutte, elle peut être com­plé­men­taire de la non-vio­lence, les deux ne s’ex­cluent pas mutuel­le­ment, Chris Hedges se contre­dit d’ailleurs puisque dans plu­sieurs articles très récents il incite à l’in­sur­rec­tion et à des « formes de résis­tance phy­sique », NdT]. Ils com­prennent l’é­ten­due de la putré­fac­tion de nos ins­ti­tu­tions cultu­relles et poli­tiques, ils com­prennent la néces­si­té de sec­tion­ner les ten­ta­cules du consu­mé­risme, mais pensent naï­ve­ment que cela peut être accom­pli par des formes de résis­tance phy­sique et des actes de vio­lence. Il y a des débats au sein du mou­ve­ment anar­chiste — comme celui sur la des­truc­tion de la pro­prié­té — mais lorsque vous com­men­cez à uti­li­ser des explo­sifs, des inno­cents com­mencent à mou­rir. Et lorsque la vio­lence anar­chique com­mence à per­tur­ber les méca­nismes de gou­ver­nance, l’é­lite au pou­voir uti­li­se­ra ces actes, aus­si ano­dins soient-ils, comme une excuse pour déployer une quan­ti­té dis­pro­por­tion­née et impi­toyable de force contre des agi­ta­teurs sus­pec­tés et avé­rés, ce qui ne fera qu’a­li­men­ter la rage des dépossédés.

Je ne suis pas un paci­fiste. Je sais qu’il y a des périodes, et j’ad­mets qu’il est pos­sible que celle-ci en soit une, où les êtres humains sont obli­gés de ripos­ter contre la répres­sion crois­sante par la vio­lence. J’é­tais à Sara­je­vo durant la guerre de Bos­nie. Nous savions exac­te­ment ce que les forces serbes entou­rant la ville nous feraient si elles par­ve­naient à per­cer les défenses et sys­tèmes de tran­chées de la ville assié­gée. Nous connais­sions l’exemple de la val­lée de Dri­na ou de la ville de Vuko­var, ou un tiers des habi­tants musul­mans avaient été tués, et le reste regrou­pé dans des camps de réfu­giés ou de dépla­cés. Il y a des moments où le seul choix qui reste, c’est de prendre les armes pour défendre votre famille, votre quar­tier, votre ville. Mais ceux qui se sont avé­rés les plus aptes à défendre Sara­je­vo pro­ve­naient inva­ria­ble­ment des milieux cri­mi­nels. Lors­qu’ils ne tiraient pas sur les sol­dats serbes, ils pillaient les appar­te­ments des Serbes eth­niques de Sara­je­vo, les exé­cu­taient par­fois, et ter­ro­ri­saient leurs cama­rades musul­mans. Lorsque vous ingé­rez le poi­son de la vio­lence, même au nom d’une juste cause, cela vous déforme, vous cor­rompt, vous per­ver­tit. La vio­lence est une drogue, c’est peut-être même le plus puis­sant nar­co­tique qui soit pour l’es­pèce humaine. Les plus accros à la vio­lence sont ceux qui ont accès à des armes et un pen­chant pour la force. Et ces tueurs émergent à la sur­face de tout mou­ve­ment armé et le conta­minent à l’aide du pou­voir toxique et sédui­sant qui accom­pagne la capa­ci­té de détruire. J’ai obser­vé cela, guerre après guerre. Lorsque vous emprun­tez ce che­min, vous finis­sez par confron­ter vos monstres aux leurs. Et le sen­sible, l’hu­main et le gen­til, ceux qui ont une pro­pen­sion à pro­té­ger et prendre soin de la vie, sont mar­gi­na­li­sés et sou­vent tués. La vision roman­tique de la guerre et de la vio­lence est pré­va­lente chez les anar­chistes et la gauche pro­fonde, comme dans la culture domi­nante. Ceux qui résistent par la force ne ren­ver­se­ront pas l’É­tat capi­ta­liste, et ne sou­tien­dront pas les valeurs cultu­relles qui doivent être défen­dues, si nous vou­lons un futur qui vaille le coup d’être vécu.

De mes nom­breuses années en tant que cor­res­pon­dant de guerre au Sal­va­dor, au Gua­te­ma­la, à Gaza et en Bos­nie, j’ai appris que les mou­ve­ments de résis­tance armés sont tou­jours des pro­duits mutants de la vio­lence qui les a engen­drés. Je ne suis pas naïf au point de pen­ser qu’il aurait été pos­sible pour moi d’é­vi­ter ces mou­ve­ments armés si j’a­vais été un pay­san sans terre du Sal­va­dor ou du Gua­te­ma­la, un Pales­ti­nien de Gaza ou un Musul­man de Sara­je­vo, mais cette réponse vio­lente à la répres­sion est et sera tou­jours tra­gique. Elle doit être évi­tée, mais pas au prix de notre propre survie.

La démo­cra­tie, un sys­tème idéa­le­ment conçu pour défier le sta­tu quo, a été cor­rom­pue et domp­tée, afin de ser­vir ser­vi­le­ment le sta­tu quo. Nous avons connu, comme l’é­crit John Ral­ston Saul, un coup d’É­tat au ralen­ti, et ce coup est ter­mi­né. Ils ont gagné. Nous avons per­du. L’é­chec lamen­table des acti­vistes ayant ten­té de pous­ser les États capi­ta­listes indus­tria­li­sés à entre­prendre des réformes envi­ron­ne­men­tales sérieuses, à entra­ver l’a­ven­tu­risme impé­ria­liste, ou à construire une poli­tique humaine vis-à-vis des masses pauvres du monde, témoigne d’une inca­pa­ci­té à sai­sir les nou­velles réa­li­tés du pou­voir. Le para­digme du pou­voir a été irré­vo­ca­ble­ment modi­fié, c’est pour­quoi le para­digme de la résis­tance doit l’être aussi.

Trop de mou­ve­ments de résis­tance conti­nuent à croire en toute la mas­ca­rade de la poli­tique élec­to­rale, des par­le­ments, des consti­tu­tions, des décla­ra­tions de droits, du lob­bying et de l’a­vè­ne­ment d’une éco­no­mie ration­nelle. Les leviers de pou­voir sont tel­le­ment conta­mi­nés que les besoins et les voix des citoyens n’ont plus aucun poids. L’é­lec­tion de Barack Oba­ma était un nou­veau triomphe de la pro­pa­gande sur la réa­li­té, et une mani­pu­la­tion habile dou­blée d’une tra­hi­son du public par les mass-médias. Nous avons confon­du le style et l’eth­ni­ci­té — une tac­tique publi­ci­taire ini­tiée par The Uni­ted Colors of Benet­ton et Cal­vin Klein — avec la poli­tique pro­gres­siste et le chan­ge­ment véri­table. Nous avons confon­du nos émo­tions avec la connais­sance. Mais le but, comme pour toutes les marques, était de faire confondre par des consom­ma­teurs pas­sifs une marque avec une expé­rience. Oba­ma, aujourd’­hui célé­bri­té mon­diale, est une marque. Il n’a­vait qua­si­ment aucune expé­rience, à part deux petites années au Sénat, n’a­vait aucun code moral et a été ven­du, comme n’im­porte quel objet que l’on sou­haite vendre aux gens. La cam­pagne Oba­ma a été qua­li­fiée de cam­pagne mar­ke­ting de l’an­née 2008 par Adver­ti­sing Age, devan­çant Apple et Zappos.com. Croyez les pro­fes­sion­nels. La marque Oba­ma est le rêve ultime des gens du mar­ke­ting. Le pré­sident Oba­ma fait une chose, et la marque Oba­ma vous fait croire l’in­verse. Voi­là l’es­sence d’une publi­ci­té à suc­cès. Vous ache­tez ou faites ce que sou­haite le publi­ci­taire en rai­son de com­ment ils vous font vous sentir.

La marque appe­lée « Obama »

Nous vivons dans une culture carac­té­ri­sée par ce que Ben­ja­min DeMott appe­lait la « poli­tique pou­belle ». La poli­tique pou­belle n’exige ni jus­tice ni répa­ra­tion des droits. Elle per­son­na­lise les pro­blèmes plus qu’elle ne les cla­ri­fie. Elle exclut le vrai débat au pro­fit des scan­dales fabri­qués, des potins mon­dains et du spec­tacle. Elle fait la pro­mo­tion d’un opti­misme éter­nel, van­tant sans cesse notre force morale et notre carac­tère, et com­mu­nique dans le lan­gage miel­leux du « je-res­sens-ta-dou­leur ». Le résul­tat de la poli­tique pou­belle, c’est que rien ne change jamais, « ce qui signi­fie zéro inter­rup­tion dans les pro­ces­sus et les pra­tiques qui ren­forcent les sys­tèmes de ver­rouillage exis­tants d’a­van­tages socioé­co­no­miques ».

La croyance cultu­relle selon laquelle nous pou­vons faire adve­nir les choses en y pen­sant, en les visua­li­sant, en les sou­hai­tant, en fai­sant appel à notre force inté­rieure, ou en com­pre­nant que nous sommes des êtres excep­tion­nels, n’est que pen­sée magique. Nous pour­rions faire tou­jours plus d’argent, aug­men­ter nos quo­tas, consom­mer plus de pro­duits et faire pro­gres­ser notre car­rière en ayant assez de foi. Cette pen­sée magique, que l’on nous inculque à tra­vers le spectre poli­tique, via Oprah, les spor­tifs célèbres, Hol­ly­wood, les gou­rous du déve­lop­pe­ment per­son­nel et les déma­gogues chré­tiens, est lar­ge­ment res­pon­sable de notre effon­dre­ment éco­no­mique et éco­lo­gique, puisque toute Cas­sandre l’ayant vu venir a été écar­tée en rai­son de sa « néga­ti­vi­té ». Cette croyance, qui per­met aux hommes et aux femmes de se com­por­ter et d’a­gir comme des enfants, dis­cré­dite les inquié­tudes et anxié­tés légi­times. Elle exa­cerbe le déses­poir et la pas­si­vi­té. Elle nour­rit un état d’au­to-aveu­gle­ment. Le but, la struc­ture et l’ob­jec­tif de l’É­tat capi­ta­liste ne sont jamais vrai­ment remis en ques­tion. Ques­tion­ner, s’en­ga­ger dans une cri­tique du col­lec­tif cor­po­ra­tiste, c’est être obs­truc­tion­niste et néga­tif. Cela a éga­le­ment per­ver­ti la façon dont nous nous per­ce­vons, dont nous per­ce­vons notre pays et le monde natu­rel. Le nou­veau para­digme du pou­voir, asso­cié à son idéo­lo­gie étrange de pro­grès infi­ni et de bon­heur impos­sible, a trans­for­mé des pays entiers, dont les USA, en monstres.

Nous pou­vons mar­cher à Copen­hague. Nous pou­vons rejoindre Bill McKib­ben et son jour de pro­tes­ta­tion mon­diale pour le cli­mat. Nous pou­vons com­pos­ter dans nos jar­dins et étendre notre linge au soleil pour le sécher. Nous pou­vons écrire des lettres à nos élus et voter pour Oba­ma, mais l’é­lite au pou­voir est imper­méable à la mas­ca­rade de la par­ti­ci­pa­tion démo­cra­tique. Le pou­voir est entre les mains de para­sites intel­lec­tuels et moraux qui créent impi­toya­ble­ment un sys­tème de néo-féo­da­lisme, et détruisent les éco­sys­tèmes qui per­mettent l’exis­tence de l’es­pèce humaine. Faire appel à la bon­té en eux, ou cher­cher à influen­cer les leviers internes du pou­voir n’au­ra désor­mais plus aucune utilité.

Nous n’é­chap­pe­rons pas, par­ti­cu­liè­re­ment ici, aux USA, à notre Göt­terdäm­me­rung [Cré­pus­cule des dieux]. Oba­ma, comme le Pre­mier ministre cana­dien Ste­phen Har­per et les autres diri­geants des pays indus­tria­li­sées, s’est avé­ré être un ins­tru­ment de l’É­tat capi­ta­liste aus­si veule que George W. Bush. Notre sys­tème démo­cra­tique a été trans­for­mé en ce que le phi­lo­sophe poli­tique Shel­don Wolin appelle le « tota­li­ta­risme inver­sé ». Le tota­li­ta­risme inver­sé, contrai­re­ment au tota­li­ta­risme clas­sique, ne tourne pas autour d’un déma­gogue ou d’un chef cha­ris­ma­tique. Il trouve son expres­sion dans l’anonymat de l’État des patrons. Il pré­tend ché­rir la démo­cra­tie, le patrio­tisme, une presse libre, les sys­tèmes par­le­men­taires et les consti­tu­tions, alors qu’il mani­pule et cor­rompt les leviers internes pour ren­ver­ser et contre­car­rer les ins­ti­tu­tions démo­cra­tiques. Les can­di­dats poli­tiques sont élus dans des votes popu­laires par les citoyens, mais sont régis par des armées de lob­byistes d’en­tre­prises à Washing­ton, Otta­wa ou dans les autres capi­tales du monde. Les médias com­mer­ciaux contrôlent à  peu près tout ce que nous lisons, regar­dons ou écou­tons et ils imposent une uni­for­mi­té insi­pide de l’opinion. La culture de masse, déte­nue et dif­fu­sée par les entre­prises pri­vées, nous diver­tit avec des futi­li­tés, des spec­tacles et des potins mon­dains. Dans les régimes tota­li­taires clas­siques, tels que le nazisme ou le com­mu­nisme sovié­tique, l’économie était subor­don­née à la poli­tique. « Sous le tota­li­ta­risme inver­sé, l’inverse est vraie », écrit Wolin. « L’économie domine la vie poli­tique – et avec cette domi­na­tion viennent diverses formes de bes­tia­li­té ».

Le tota­li­ta­risme inver­sé exerce un pou­voir total sans recou­rir aux gros­sières formes de contrôle comme les gou­lags, les camps de concen­tra­tion ou la ter­reur des masses. Il exploite la science et la tech­no­lo­gie pour atteindre ses sombres buts. Il impose l’uniformité idéo­lo­gique en uti­li­sant des sys­tèmes de com­mu­ni­ca­tion de masse pour incul­quer la consom­ma­tion débau­chée comme une pul­sion inté­rieure et il nous fait prendre nos illu­sions sur nous-mêmes pour la réa­li­té. Il ne réprime pas les dis­si­dents avec force, tant que ces dis­si­dents res­tent inef­fi­caces. Et en même temps qu’il détourne notre atten­tion, il déman­tèle la base indus­trielle, dévaste les com­mu­nau­tés, déclenche des vagues de misère humaine et délo­ca­lise les emplois vers des pays où fas­cistes et com­mu­nistes savent faire mar­cher les tra­vailleurs au pas. Il fait tout cela tout en bran­dis­sant le dra­peau et chan­tant des slo­gans patrio­tiques. « Les USA sont deve­nus la vitrine de la manière dont la démo­cra­tie peut être gérée sans avoir l’air d’a­voir été sup­pri­mée », écrit Wolin.

[Et à pro­pos de « dis­si­dence inefficace »] 

La pra­tique et la psy­cho­lo­gie de la publi­ci­té, le règne des « forces du mar­ché » dans de nom­breux domaines autres que celui du mar­ché, l’es­ca­lade tech­no­lo­gique conti­nue qui encou­rage des fan­tasmes éla­bo­rés (jeux vir­tuels, ava­tars vir­tuels, voyage dans l’es­pace), la satu­ra­tion de tous les foyers par les mass-médias et leur pro­pa­gande, et la récu­pé­ra­tion des uni­ver­si­tés, font de la plu­part d’entre nous des otages. La putré­fac­tion de l’im­pé­ria­lisme, qui a tou­jours été incom­pa­tible avec la démo­cra­tie, voit les fabri­cants d’armes mono­po­li­ser 1 bil­lion de dol­lars par an en dépenses liées à la défense aux USA, bien que le pays soit mena­cé d’ef­fon­dre­ment éco­no­mique. L’im­pé­ria­lisme mili­ta­rise tou­jours les poli­tiques inté­rieures. Et cette mili­ta­ri­sa­tion, sou­ligne Wolin, se mélange aux fan­tasmes cultu­rels de culte des héros, et aux contes des prouesses indi­vi­duelles, de la jeu­nesse éter­nelle, de la beau­té par la chi­rur­gie, de l’ac­tion mesu­rée en nano­se­condes et d’une culture obsé­dée par le rêve du contrôle tou­jours plus éten­du, et de pos­si­bi­li­tés de cou­per d’im­por­tants seg­ments de la popu­la­tion de la réa­li­té. Ceux qui contrôlent les images nous contrôlent. Et bien que nous ayons été envoû­tés par les ombres sur le mur de la caverne de Pla­ton, ces forces cor­po­ra­tistes, glo­ri­fiant les béné­fices de la pri­va­ti­sa­tion, ont effec­ti­ve­ment déman­te­lé les ins­ti­tu­tions de la démo­cra­tie sociale (sécu­ri­té sociale, syn­di­cats, assis­tance publique, ser­vices de san­té publique et loge­ments sociaux) et ont font régres­ser les idéaux sociaux et poli­tiques du New Deal. Les par­ti­sans de la mon­dia­li­sa­tion déré­gu­lée du capi­ta­lisme ne perdent pas leur temps à ana­ly­ser les autres idéo­lo­gies. Ils ont une idéo­lo­gie, ou plu­tôt un plan d’ac­tion défen­du par une idéo­lo­gie, et le suivent ser­vi­le­ment. Nous, à gauche, avons des dou­zaines d’a­na­lyses et idéo­lo­gies en concur­rence sans aucun plan cohé­rent qui nous soit propre. C’est pour­quoi nous patau­geons tan­dis que les forces du capi­tal déman­tèlent impi­toya­ble­ment la socié­té civile.

Nous vivons un des grands phé­no­mènes sis­miques d’in­ver­sion de civi­li­sa­tion. L’i­déo­lo­gie de la mon­dia­li­sa­tion, comme toutes les visions uto­piques « inévi­tables », a été démas­quée comme la fraude qu’elle est. L’é­lite au pou­voir, per­plexe et confuse, s’ac­croche aux prin­cipes désas­treux de la mon­dia­li­sa­tion et de son lan­gage dépas­sé pour mas­quer le vacuum poli­tique et éco­no­mique immi­nent. L’i­dée absurde selon laquelle le mar­ché seul devrait déter­mi­ner les construc­tions éco­no­miques et poli­tiques a pous­sé les pays indus­tria­li­sées à sacri­fier d’autres domaines impor­tants — condi­tions de tra­vail, impôts, tra­vail des enfants, faim, san­té et pol­lu­tion etc. — sur l’au­tel du libre-mar­ché. Cela a plon­gé les pauvres du monde dans une situa­tion ter­rible et cela a lais­sé les USA avec les défi­cits les plus consé­quents — qui ne seront jamais rem­bour­sés — de l’his­toire de l’hu­ma­ni­té. Les ren­floue­ments mas­sifs, les plans de relance, les primes et les dettes à court-terme, ain­si que les guerres impé­riales que nous ne pou­vons plus payer, lais­se­ront les USA dans de beaux draps pour finan­cer les quelques 5 bil­lions de dol­lars de dette de cette année. Il fau­dra que Washing­ton vende aux enchères 96 mil­liards de dol­lars de dette par semaine. Une fois que la Chine et les États pétro­liers ne vou­dront plus ache­ter notre dette, ce qui fini­ra par se pro­duire un jour ou l’autre, la Fede­ral Reserve devien­dra l’a­che­teur du der­nier recours. La Fed a impri­mé peut-être près de 2 bil­lions de dol­lars ces deux der­nières années, et pour ache­ter autant de dette nou­velle, elle va, en consé­quence, en impri­mer des bil­lions de plus. Alors l’in­fla­tion, et plus vrai­sem­bla­ble­ment l’hy­per­in­fla­tion, trans­for­me­ra le dol­lar en chif­fon. Et c’est à ce moment-là que tout le sys­tème s’effondre.

Lors d’une crise éco­no­mique sévère, toutes les normes et croyances tra­di­tion­nelles sont bri­sées. L’ordre moral est mis sens des­sus-des­sous. Les hon­nêtes et beso­gneux sont balayés tan­dis que les gang­sters, les pro­fi­teurs et les spé­cu­la­teurs s’en tirent avec des mil­lions. L’é­lite se reti­re­ra, comme l’a écrit Nao­mi Klein dans La doc­trine du choc, dans des rési­dences pro­té­gées, où elle aura accès aux ser­vices, à l’a­li­men­ta­tion, aux équi­pe­ments de confort et à la sécu­ri­té dont le reste d’entre nous sera pri­vé. Com­men­ce­ra alors une période où l’hu­ma­ni­té ne sera com­po­sée que de maîtres et de serfs. Les forces cor­po­ra­tistes, qui cher­che­ront à s’al­lier avec la droite chré­tienne radi­cale et autres extré­mistes, uti­li­se­ront la peur, le chaos, la colère contre les élites diri­geantes et le spectre d’une dis­si­dence de gauche et du ter­ro­risme pour impo­ser des contrôles dra­co­niens visant à anéan­tir tous les mou­ve­ments d’op­po­si­tion. En paral­lèle, ils agi­te­ront le dra­peau US, les slo­gans et chants patriotes, en pro­met­tant la loi et l’ordre une croix chré­tienne ser­rée dans la main. Le tota­li­ta­risme, a sou­li­gné George Orwell, n’est pas tant une ère de foi qu’une ère de schi­zo­phré­nie. « Une socié­té devient tota­li­taire à par­tir du moment où ses struc­tures deviennent mani­fes­te­ment arti­fi­cielles », a écrit Orwell. « Autre­ment dit quand la classe domi­nante a per­du sa rai­son d’être mais réus­sit à gar­der le pou­voir par la force ou par la ruse ». Nos élites ont uti­li­sé la fraude. Ne leur reste que la force.

Notre élite médiocre en faillite tente déses­pé­ré­ment de sau­ver un sys­tème qui ne peut être sau­vé. Plus impor­tant encore, ils essaient de se sau­ver eux-mêmes. Toutes les ten­ta­tives de tra­vailler à l’intérieur de ce sys­tème pour­ri et cette classe de déten­teurs du pou­voir se révé­le­ront inutiles. La résis­tance doit répondre à la nou­velle et dure réa­li­té d’un ordre capi­ta­liste glo­bal qui s’accroche au pou­voir par des formes de répres­sion bru­tale et fla­grante tou­jours gran­dis­santes. Une fois que le cré­dit sèche pour le citoyen moyen, une fois que le chô­mage mas­sif aura créé une classe mar­gi­nale per­ma­nente et furieuse, que les pro­duits fabri­qués bon mar­chés qui sont deve­nus les opia­cés de base de notre culture dis­pa­raî­tront, nous allons pro­ba­ble­ment évo­luer vers un sys­tème qui res­semble davan­tage au tota­li­ta­risme clas­sique. Des formes plus vio­lentes et gros­sières de répres­sion devront être employées au fur et à mesure que les méca­nismes de contrôle plus souples favo­ri­sés par le tota­li­ta­risme inver­sé ces­se­ront de fonctionner.

Il n’est pas acci­den­tel que la crise éco­no­mique converge avec la crise envi­ron­ne­men­tale. Dans son livre La Grande Trans­for­ma­tion (1944), Karl Pola­nyi expose les consé­quences dévas­ta­trices — les dépres­sions, les guerres et le tota­li­ta­risme — du soi-disant libre-mar­ché auto­ré­gu­lé. Il a sai­si que « le fas­cisme, comme le socia­lisme, est ancré dans une socié­té de mar­ché qui refuse de fonc­tion­ner ». Il nous aver­tit du fait qu’un sys­tème finan­cier dérive tou­jours, sans contrôle gou­ver­ne­men­tal consé­quent, vers un capi­ta­lisme mafieux — et un sys­tème poli­tique mafieux — ce qui décrit bien notre struc­ture finan­cière et poli­tique. Un mar­ché auto­ré­gu­lé, écrit Pola­nyi, trans­forme les êtres humains et l’en­vi­ron­ne­ment en mar­chan­dises, une situa­tion qui garan­tit la des­truc­tion de la socié­té civile comme de l’en­vi­ron­ne­ment natu­rel. Le pos­tu­lat du libre-mar­ché selon lequel la nature et les êtres humains sont des objets dont la valeur est déter­mi­née par le mar­ché per­met de les exploi­ter jus­qu’à épui­se­ment ou effon­dre­ment. Une socié­té qui ne recon­nait plus la dimen­sion sacrée de la nature et de la vie humaine,  leur valeur intrin­sèque au-delà de leur valeur moné­taire, com­met un sui­cide col­lec­tif. De telles socié­tés se can­ni­ba­lisent jus­qu’à la mort. C’est ce que nous connais­sons actuellement.

Si nous construi­sons des struc­tures auto-suf­fi­santes, en les inté­grant à l’environnement autant que faire se peut, nous pour­rons sur­mon­ter l’effondrement qui s’en vient. Cette tâche sera accom­plie grâce à l’existence de petites enclaves phy­siques qui auront accès à une agri­cul­ture durable et qui seront donc capables de se dis­so­cier autant que pos­sible de la culture com­mer­ciale. Ces com­mu­nau­tés devront construire des murs contre la pro­pa­gande et la peur élec­tro­niques qui sub­mer­ge­ront les ondes. Le Cana­da sera pro­ba­ble­ment un lieu plus accueillant pour cela que les USA, compte tenu du fort cou­rant de vio­lence qui y règne. Mais dans tous les pays, ceux qui sur­vi­vront auront besoin de terres dans des zones iso­lées, à bonne dis­tance des zones urbaines dont les centres-villes se trans­for­me­ront en déserts ali­men­taires, ain­si que de la vio­lence sau­vage qu’entraînent des biens aux coûts pro­hi­bi­tifs et une répres­sion éta­tique croissante.

Le recours de plus en plus ouvert à la force par les élites pour main­te­nir le contrôle ne doit pas mettre fin aux actes de résis­tance. Les actes de résis­tance sont des actes moraux. Ils prennent vie parce que les gens conscients com­prennent l’impératif moral de remettre en ques­tion les sys­tèmes d’abus et le des­po­tisme. Ils devraient être menés non pas parce qu’ils sont effi­caces, mais parce qu’ils sont justes. Ceux qui ini­tient ces actes sont tou­jours peu nom­breux et reje­tés par ceux qui cachent leur lâche­té der­rière leur cynisme. Mais la résis­tance, bien que mar­gi­nale, conti­nue à affir­mer la vie dans un monde inon­dé par la mort. C’est l’acte suprême de la foi, la plus haute forme de spi­ri­tua­li­té et qui seul rend l’espoir pos­sible. Ceux qui ont com­mis des actes de résis­tance ont très sou­vent sacri­fié leur sécu­ri­té et leur confort, ont sou­vent pas­sé du temps en pri­son et dans cer­tains cas, ont été tués. Ils ont com­pris que vivre dans le plein sens du mot, exis­ter en tant qu’êtres humains libres et indé­pen­dants, même dans la nuit la plus sombre de la répres­sion d’État, signi­fie défier l’injustice.

Lorsque le pas­teur luthé­rien dis­si­dent Die­trich Bon­hoef­fer fut conduit hors de sa cel­lule de pri­son nazie à la potence, ses der­niers mots furent : « C’est pour moi la fin, mais aus­si le com­men­ce­ment ». Bon­hoef­fer savait que la plu­part de ses conci­toyens étaient com­plices, par leur silence, d’une vaste entre­prise de mort. Mais aus­si déses­pé­ré que cela ait pu sem­bler sur le moment, il a affir­mé ce que nous devons tous affir­mer. Il n’a pas évi­té la mort. Il n’a pas sur­vé­cu, en tant qu’in­di­vi­du. Mais il a com­pris que sa résis­tance et même sa mort étaient des actes d’a­mour. Il s’est bat­tu et est mort pour le sacré de la vie. Il a offert, même à ceux qui ne l’a­vaient pas rejoint, une autre his­toire, et son défi a fini par condam­ner ses bourreaux.

Nous devons conti­nuer à résis­ter, mais il faut main­te­nant le faire en ayant en tête l’i­dée incon­for­table que des chan­ge­ments signi­fi­ca­tifs ne se pro­dui­ront pro­ba­ble­ment pas de notre vivant. Cela rend la résis­tance plus dif­fi­cile. Cela déplace la résis­tance du domaine du tan­gible et de l’immédiat vers l’abstrait et l’indéterminé. Mais renon­cer à ces actes de résis­tance consti­tue une mort spi­ri­tuelle et intel­lec­tuelle. Cela revient à se sou­mettre à l’idéologie déshu­ma­ni­sante du capi­ta­lisme tota­li­taire. Les actes de résis­tance main­tiennent en vie un autre récit, ren­forcent notre inté­gri­té, et peuvent don­ner à d’autres, que nous ne ren­con­tre­rons peut-être jamais, la volon­té de se lever et de por­ter la flam­beau que nous leur pas­sons. Aucun acte de résis­tance n’est futile, que ce soit le refus de payer des impôts, la lutte pour une taxe Tobin, tra­vailler à chan­ger le para­digme éco­no­mique néo­clas­sique, révo­quer une charte d’entreprise, orga­ni­ser des votes mon­diaux sur inter­net ou uti­li­ser twit­ter pour cata­ly­ser une réac­tion en chaîne de refus contre l’ordre néo­li­bé­ral. Mais nous devrons résis­ter, et croire en l’u­ti­li­té de cette résis­tance, car nous n’altèrerons pas ins­tan­ta­né­ment la ter­rible confi­gu­ra­tion du pou­voir en place. Et dans cette longue, longue guerre, une com­mu­nau­té qui nous sou­tient émo­tion­nel­le­ment et maté­riel­le­ment sera la clé d’une vie de défi.

Le phi­lo­sophe Theo­dor Ador­no a écrit que la pré­oc­cu­pa­tion exclu­sive pour les pro­blèmes per­son­nels et l’indifférence à la souf­france des autres au-delà du groupe auquel on s’identifie est ce qui a fina­le­ment ren­du le fas­cisme et l’Ho­lo­causte pos­sibles. « L’in­ca­pa­ci­té de s’i­den­ti­fier aux autres fut la condi­tion psy­cho­lo­gique la plus impor­tante qui per­mit qu’Au­sch­witz existe dans une huma­ni­té à peu près civi­li­sée et pas trop nui­sible » (« Édu­quer après Ausch­witz », dans Modèles cri­tiques, p.216. ).

L’indifférence au sort d’autrui et l’élévation suprême du moi est ce que l’État-entreprise cherche à nous incul­quer. Il uti­lise la peur, ain­si que l’hédonisme, pour désar­ti­cu­ler la com­pas­sion humaine. Nous devons conti­nuer à com­battre les méca­nismes de la culture domi­nante, même si ce n’est que dans le but de pré­ser­ver notre huma­ni­té com­mune à tra­vers de petits, voire de minus­cules actes. Nous devons résis­ter à la ten­ta­tion du repli sur soi et de l’i­gno­rance de la cruau­té ne nous tou­chant pas direc­te­ment. L’espoir demeure dans ces actes de défi sou­vent imper­cep­tibles. Ce défi, cette capa­ci­té de dire non, c’est exac­te­ment ce que cherchent à éra­di­quer les psy­cho­pathes qui contrôlent nos sys­tèmes de pou­voir. Tant que nous serons prêts à défier ces forces, nous aurons une chance, si ce n’est pour nous-mêmes, du moins, ce sera pour ceux qui vien­dront après nous. Tant que nous défie­rons ces forces nous demeu­re­rons en vie. Et pour l’instant, c’est la seule vic­toire possible.

Chris Hedges

« L’histoire de la vie », fresque murale de l’artiste ita­lien Blu, Rome, Casal de’ Paz­zi, 2015

Tra­duit par  Nico­las Casaux
Edi­té par  Faus­to Giu­dice Фаусто Джудиче 
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  1. Ton ana­lyse est tota­le­ment celui que je fait au regard de mes propres expé­riences. Sauf que toi, tu sais les dire avec cette claire voyance qui me fait te remer­cier d’exis­ter pour m’être mon porte parole.
    Mais j’ai très peur…

  2. Trés bonne anna­lyse.. La résis­tance avance et ne ce lais­se­ra pas abbatre par leur sys­tème ; la liber­té est proche et le bon­heur en vue, libé­ré des entraves des maitres ! On nous traite de com­plo­tiste et de déran­ger mais nous savons que nos actions sont indis­pen­sables pour nos enfants et pour la Nature. L’es­poir est tou­jours la alors conti­nuons notre lutte

  3. Ce texte qua­si pro­phé­tique, grave, solen­nel, cris­tal­lise la rage, la luci­di­té et le der­nier espoir d’un humaniste.
    Tout semble lui don­ner rai­son. Plus ça va, plus il est trop tard. Il était trop tard hier, il sera beau­coup trop tard l’an­née pro­chaine. Le néo­féo­da­lisme est avé­ré, opé­ra­tion­nel. La vio­lence est natu­ra­li­sée. L’in­fan­ti­li­sa­tion est uti­li­sée avec exper­tise. La peur et la caresse, la carotte et le bâton, la lente habi­tua­tion à l’in­jus­tice, à la loi bar­bare qui fait fi de mil­lé­naires d’hu­ma­ni­sa­tion, jus­qu’à l’a­ban­don total du dis­cer­ne­ment et de l’u­to­pie civi­li­sa­trice (dans moins de 5 géné­ra­tions peut-être), la satis­fac­tion de 1 contre la souf­france ou l’ex­ploi­ta­tion de 1000000, la dis­pa­ri­tion de la conscience (déjà enta­mée), de notre envi­ron­ne­ment, et de la beau­té, se concré­tisent assez rapi­de­ment pour les craindre sérieusement.
    Oui je crois aus­si que nous sommes condam­nés à la para­ly­sie ins­ti­tu­tion­nelle tant que le capi­ta­lisme n’a pas implo­sé, car il se nour­rit du pire (c’est pré­ci­sé­ment ce qu’il prouve main­te­nant), il se nour­rit de sa propre mort en tant que prin­cipe de recy­clage lucra­tif de tout, prin­cipe de valo­ri­sa­tion lucra­tive du dés­équi­libre, jouis­sance du feu et du chaos, pul­sion de pou­voir sacralisé.
    La seule source de quoi que ce soit de propre et de beau est la fra­gi­li­té et la socia­bi­li­té néces­saire de l’es­pèce humaine. Il n’y a pas d’hu­main sans conscience de soi, pas de conscience de soi sans conscience de l’autre, pas de nais­sance sans pro­tec­tion, jus­tice et bon­té. Là est l’es­poir, s’il reste des humains.
    Sinon, advienne la machine ou rien.

  4. Ton ana­lyse est tota­le­ment celle que je fais, sauf que toi, tu sais dire les choses avec clair­voyance. Je te remer­cie d’exister.

  5. Cet article est très inté­res­sant et donne à réflé­chir. Mer­ci de l’a­voir publié.

    Par contre, la fresque murale « L’his­toire de la vie » n’a rien à faire dans le corps de l’ar­ticle. La théo­rie de l’é­vo­lu­tion est bidon et non scien­ti­fique. Cette fresque montre quelque chose de faux qui n’a jamais été démontré.
    Ce sont les « créa­tion­nistes » et ceux qui pro­posent le « des­sein intel­li­gent » qui ont com­pris l’im­pos­ture scien­ti­fique de la théo­rie dar­wi­nienne de l’é­vo­lu­tion. Il est temps que les éco­lo­gistes se réveillent et jettent cette théo­rie dans la pou­belle de l’his­toire. Nul besoin de cette escro­que­rie pour défendre l’é­co­lo­gie, décla­rer la gran­deur de la créa­tion suf­fit amplement.

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