« L’extinction finale vers laquelle nous entraîne la perÂpéÂtuaÂtion de la sociéÂté indusÂtrielle est deveÂnue en très peu d’années notre aveÂnir offiÂciel. Qu’elle soit consiÂdéÂrée sous l’angle de la pénuÂrie énerÂgéÂtique, du dérèÂgleÂment cliÂmaÂtique, de la démoÂgraÂphie, des mouÂveÂments de popuÂlaÂtions, de l’empoisonnement ou de la stéÂriÂliÂsaÂtion du milieu, de l’artificialisation des êtres vivants, sous tous ceux-là à la fois ou sous d’autres encore, car les rubriques du catasÂtroÂphisme ne manquent pas, la réaÂliÂté du désastre en cours, ou du moins des risques et des danÂgers que comÂporte le cours des choses, n’est plus seuleÂment admise du bout des lèvres, elle est désorÂmais détaillée en perÂmaÂnence par les proÂpaÂgandes étaÂtiques et médiaÂtiques. Quant à nous, qu’on a souÂvent taxés de comÂplaiÂsance apoÂcaÂlypÂtique pour avoir pris ces phéÂnoÂmènes au sérieux ou de « pasÂséisme » pour avoir dit l’impossibilité de trier parÂmi les réaÂliÂsaÂtions et les proÂmesses de la sociéÂté indusÂtrielle de masse, préÂveÂnons tout de suite que nous n’entendons rien ajouÂter ici aux épouÂvanÂtables tableaux d’une crise écoÂloÂgique totale que brossent sous les angles les plus variés tant d’experts inforÂmés, dans tant de rapÂports, d’articles, d’émissions, de films et d’ouvrages dont les donÂnées chifÂfrées sont diliÂgemÂment mises à jour par les agences gouÂverÂneÂmenÂtales ou interÂnaÂtioÂnales et les ONG comÂpéÂtentes. Ces éloÂquentes mises en garde, quand elles en arrivent au chaÂpitre des réponses à apporÂter devant des menaces ausÂsi presÂsantes, s’adressent en généÂral à « l’humanité » pour la conjuÂrer de « chanÂger radiÂcaÂleÂment ses aspiÂraÂtions et son mode de vie » avant qu’il ne soit trop tard. On aura remarÂqué que ces injoncÂtions s’adressent en fait, si l’on veut bien traÂduire leur pathos moraÂliÂsant en un lanÂgage un peu moins éthéÂré, aux diriÂgeants des États, aux insÂtiÂtuÂtions interÂnaÂtioÂnales, ou encore à un hypoÂthéÂtique « gouÂverÂneÂment monÂdial » qu’imposeraient les cirÂconsÂtances. Car la sociéÂté de masse (c’est-à -dire ceux qu’elle a intéÂgraÂleÂment forÂmés, quelles que soient leurs illuÂsions là -desÂsus) ne pose jamais les proÂblèmes qu’elle préÂtend « gérer » que dans les termes qui font de son mainÂtien une condiÂtion sine qua non. On n’y peut donc, dans le cours de l’effondrement, qu’envisager de retarÂder ausÂsi longÂtemps que posÂsible la disÂloÂcaÂtion de l’agrégat de désesÂpoirs et de folies qu’elle est deveÂnue ; et on n’imagine y parÂveÂnir, quoi qu’on en dise, qu’en renÂforÂçant toutes les coerÂciÂtions et en asserÂvisÂsant plus proÂfonÂdéÂment les indiÂviÂdus à la colÂlecÂtiÂviÂté. Tel est le sens vériÂtable de tous ces appels à une « humaÂniÂté » absÂtraite, vieux déguiÂseÂment de l’idole sociale, même si ceux qui les lancent, forts de leur expéÂrience dans l’Université, l’industrie ou l’expertise (c’est, comme on s’en féliÂcite, la même chose), sont pour la pluÂpart mus par des ambiÂtions moins éleÂvées et rêvent seuleÂment d’être nomÂmés à la tête d’institutions ad hoc ; tanÂdis que des fracÂtions signiÂfiÂcaÂtives des popuÂlaÂtions se découvrent toutes disÂpoÂsées à s’atteler bénéÂvoÂleÂment aux basses Å“uvres de la dépolÂluÂtion ou de la sécuÂriÂsaÂtion des perÂsonnes et des biens. »
— Jaime SemÂprun & René RieÂsel, « CatasÂtroÂphisme, admiÂnisÂtraÂtion du désastre et souÂmisÂsion durable » (ÉdiÂtions de l’EncyÂcloÂpéÂdie des NuiÂsances, 2008)
AVANT LE DÉLUGE
Du brainwashing au greenwashing
LeoÂnarÂdo DiCaÂprio, star interÂnaÂtioÂnale, icône de mode et idole interÂgéÂnéÂraÂtionÂnelle, vient de proÂduire un docuÂmenÂtaire (« Avant le déluge ») monÂdiaÂleÂment relayé, sur le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique et ses conséÂquences pour la sociéÂté indusÂtrielle, ses membres, et, accesÂsoiÂreÂment, pour la plaÂnète et ce qui reste de ses autres habiÂtants.
Comme son titre nous l’inÂdique, ce film a pour ambiÂtion de préÂpaÂrer les popuÂlaÂtions du monde qui s’industrialise — et qui ne compte pas s’arrêter en si bon cheÂmin — aux contreÂcoups du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique, désorÂmais préÂsenÂté comme inéÂlucÂtable, induit par les colosÂsales émisÂsions de gaz à effet de serre qu’engendrent les diverses actiÂviÂtés de l’humanité civiÂliÂsée.
Pour comÂprendre le mesÂsage difÂfuÂsé à traÂvers ce docuÂmenÂtaire, il convient de rapÂpeÂler que le marÂdi 16 sepÂtembre 2014, le SecréÂtaire généÂral des Nations Unies, Ban Ki-moon, a nomÂmé MesÂsaÂger de la Paix sur la quesÂtion des chanÂgeÂments cliÂmaÂtiques l’acteur améÂriÂcain LeoÂnarÂdo DiCaÂprio, et que ce choix n’était pas forÂtuit.
« M. DiCaÂprio est une voix créÂdible du mouÂveÂment enviÂronÂneÂmenÂtaÂliste et il disÂpose d’une plaÂteÂforme consiÂdéÂrable pour se faire entendre. Je suis heuÂreux qu’il ait choiÂsi de mettre sa voix au serÂvice des efforts de l’ONU pour plaiÂder en faveur de mesures urgentes de lutte contre les chanÂgeÂments cliÂmaÂtiques », a déclaÂré le SecréÂtaire généÂral des Nations Unies dans un comÂmuÂniÂqué de presse.
PréÂciÂsons égaÂleÂment que parÂmi les proÂducÂteurs du film figure James Packer, sepÂtième forÂtune de l’Australie (preÂmière il y a quelques temps), qui posÂsède de nomÂbreux médias, et l’une des plus grandes entreÂprises de jeux et de diverÂtisÂseÂment du pays (« Crown Resorts », de nomÂbreux hôtels et casiÂnos dans le monde entier).
ReveÂnons-en au film. Nous sommes d’accord avec une de ses obserÂvaÂtions, sa reconÂnaisÂsance de la réaÂliÂté du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique d’origine anthroÂpique. AinÂsi qu’avec un constat rapiÂdeÂment menÂtionÂné, lorsque DiCaÂprio explique qu’il avait comÂpris, grâce au docuÂmenÂtaire d’Al Gore, Une vériÂté qui dérange, que « Tous nos moyens de transÂport : bateaux, trains, avions, voiÂtures, l’aÂgro-aliÂmenÂtaire, les construcÂtions… Tout relâÂchait du dioxyde de carÂbone ». VoiÂlà pour ce qu’on lui accorde.
Venons-en aux menÂsonges et aux omisÂsions attenÂdus que se devait de préÂsenÂter un tel docuÂmenÂtaire, et qui sont en liens avec l’attribution à LeoÂnarÂdo DiCaÂprio du rôle de MesÂsaÂger de la paix onuÂsien.
L’ONU est une insÂtiÂtuÂtion agisÂsant au nom de — et créée par — la coaÂliÂtion des intéÂrêts des états-nations modernes, autreÂment dit, de ceux qui dirigent et encouÂragent l’industrialisation encore en cours (et de ceux qui la veulent infiÂnie, sans limites) du monde, ou pour le dire encore autreÂment, des élites diriÂgeant l’humanité civiÂliÂsée, la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle. Nous devrions tous être à peu près d’accord sur ce point. L’ONU ne repréÂsente pas les intéÂrêts des peuples indiÂgènes, pas non plus ceux des innomÂbrables autres espèces aniÂmales et végéÂtales disÂpaÂrues, ni ceux de celles qui sont actuelÂleÂment menaÂcées, surÂexÂploiÂtées, et/ou tuées à traÂvers le globe, par le déveÂlopÂpeÂment de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle. L’ONU, par défiÂniÂtion, strucÂtuÂrelÂleÂment, ne pourÂra jamais ni conceÂvoir ni encouÂraÂger son propre démanÂtèÂleÂment, pas plus que celui de la culture monÂdiaÂliÂsée qui lui a donÂné naisÂsance. Et puisque c’est elle qui, à traÂvers la voix et l’image d’une des céléÂbriÂtés les plus appréÂciées par les habiÂtants des états-nations modernes, proÂpose des soluÂtions pour que l’humanité indusÂtrielle puisse encaisÂser le choc du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique, « qui s’opposerait au mainÂtien de l’organisation sociale qui perÂmetÂtra de sauÂver l’humanité […] ? » (Jaime SemÂprun & René RieÂsel, ibid). Peu importe que ce proÂblème (et bien d’autres, très peu menÂtionÂnés, voire pas du tout, dans ce docuÂmenÂtaire) ait été direcÂteÂment cauÂsé par cette même orgaÂniÂsaÂtion sociale. AinÂsi, la manière de préÂsenÂter et de disÂcuÂter du (seul) proÂblème grave dont traite ce docuÂmenÂtaire, y est direcÂteÂment biaiÂsée par le cadre strucÂtuÂrel limiÂté dont parlent Jaime SemÂprun et René RieÂsel dans la citaÂtion introÂducÂtive de ce texte :
« Car la sociéÂté de masse (c’est-à -dire ceux qu’elle a intéÂgraÂleÂment forÂmés, quelles que soient leurs illuÂsions là -desÂsus) ne pose jamais les proÂblèmes qu’elle préÂtend « gérer » que dans les termes qui font de son mainÂtien une condiÂtion sine qua non ».
Nous comÂpreÂnons que, pour beauÂcoup — et surÂtout pour ceux qui vivent dans le meilleur des mondes, où leur pays est une démoÂcraÂtie, leur préÂsident le repréÂsenÂtant légiÂtime du peuple (obéisÂsant à sa stricte volonÂté éclaiÂrée), où le proÂgrès techÂnoÂloÂgique est une réaÂliÂsaÂtion merÂveilleuse et un but inesÂtiÂmable, où le pasÂsé est inféÂrieur au préÂsent, lui-même inféÂrieur au futur (comme le sauÂvage est inféÂrieur au civiÂliÂsé, ou en retard par rapÂport à lui, puisque la civiÂliÂsaÂtion est de toute éviÂdence une bonne chose et un proÂgrès humain en elle-même) — cela puisse paraître obsÂcure. DéveÂlopÂpons.
Il y a 10 ans, en 2006, sorÂtait le film d’Al Gore, Une vériÂté qui dérange, qui traiÂtait du même sujet que le nouÂveau docuÂmenÂtaire de LeoÂnard DiCaÂprio. Il preÂnait fin en indiÂquant que si des mesures approÂpriées étaient prises rapiÂdeÂment, le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique pourÂrait être inverÂsé. 10 ans plus tard, l’échec est proÂbant, ce qui n’a rien d’étonnant. PourÂquoi ?
Parce que toutes les soi-disant soluÂtions prôÂnées dans le film docuÂmenÂtaire d’Al Gore (ou dans celui de DiCaÂprio) ne sont absoÂluÂment pas en mesure de stopÂper quoi que ce soit, encore moins d’inverser les tenÂdances catasÂtroÂphiques que nous connaisÂsons. PourÂquoi ?
Parce qu’elles sont autant de menÂsonges techÂnoÂloÂgiques. Les soi-disant énerÂgies renouÂveÂlables (solaire et éolien, mais pas seuleÂment, puisque l’hydroélectrique est à lui seul plus imporÂtant que les deux preÂmiers réunis) ne pourÂront jamais remÂplaÂcer les comÂbusÂtibles fosÂsiles et le nucléaire, et d’abord parce qu’elles en dépendent larÂgeÂment, pour pluÂsieurs étapes de leur proÂducÂtion, mais ausÂsi parce qu’elles ne pourÂront jamais fourÂnir assez d’énergie pour répondre aux besoins préÂsents de la sociéÂté indusÂtrielle (et donc, encore moins à ceux du futur, croisÂsance oblige), même si, oui, l’ADEME a publié un rapÂport, ou StanÂford, ou n’importe quel agence d’Etat ou corÂpoÂraÂtiste (si tant est qu’il y ait une difÂféÂrence), qui nous assure un futur 100% renouÂveÂlable, tout droit sorÂti de raiÂsonÂneÂments fanÂtaiÂsistes et déjà déconsÂtruits par pluÂsieurs esprits relaÂtiÂveÂment plus pragÂmaÂtiques, même au sein des médias grand public ; égaÂleÂment parce que leur utiÂliÂsaÂtion demeure polÂluante et desÂtrucÂtrice des milieux natuÂrels, quoi qu’il en soit (avez-vous remarÂqué l’énorme socle en béton nécesÂsaire à chaque éolienne indusÂtrielle ? Le mat de l’éolienne nécesÂsite égaÂleÂment toutes sortes de resÂsources, et toutes nécesÂsitent un acheÂmiÂneÂment comÂplexe. Les surÂfaces sur lesÂquelles elles sont insÂtalÂlées sont autant de parÂcelles de la plaÂnète que l’on sacriÂfie, pour ne faire que quelques remarques, bien d’autres existent, qui ne sont simÂpleÂment pas prises en compte, volonÂtaiÂreÂment ou pas). Mais il y a pire, et plus ridiÂcule encore ; ces soi-disant énerÂgies renouÂveÂlables serÂviÂraient à fourÂnir de l’électricité aux smartÂphones, aux ordiÂnaÂteurs porÂtables, etc., et finaÂleÂment aux usines qui fabriquent tous les objets polÂluants et consomÂmaÂteurs de resÂsources non-renouÂveÂlables qui défiÂnissent la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle ; elles serÂviÂraient à mainÂteÂnir en vie l’organisation sociale non-seuleÂment desÂtrucÂtrice du vivant (à l’origine du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique), mais ausÂsi inique, aliéÂnante et dépriÂmante dans laquelle la majoÂriÂté des humains s’entassent désorÂmais.
Ceux qui ont une vision écoÂloÂgique assez honÂnête et assez gloÂbale du monde dans lequel nous vivons doivent comÂprendre que la surÂvie de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle n’est pas souÂhaiÂtable. Pour les autres, contiÂnuons à déveÂlopÂper.
Dans « Avant le déluge », lorsqu’Elon Musk préÂtend que 100 de ses GigaÂfacÂtoÂry pourÂraient sufÂfire à couÂvrir tous les besoins énerÂgéÂtiques de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle, il s’agit d’un menÂsonge colosÂsal, appuyé par rien du tout, une asserÂtion graÂtuite qu’il se perÂmet — qu’il se doit — d’avancer, en tant que PDG d’une entreÂprise à but lucraÂtif, qui cherche à vendre ses proÂduits et à faire du proÂfit ; lorsque Johan RocksÂtrom affirme : « Une fois qu’on invesÂtit dans le solaire et l’éolien, on a de l’énergie infiÂnie pour touÂjours », c’en est un autre, mais plus groÂtesque encore, qui s’adresse aux plus naïfs parÂmi les naïfs. Des ingéÂnieurs manÂdaÂtés par Google concluaient en 2007 que les énerÂgies renouÂveÂlables n’entraineraient aucune réducÂtion d’émissions de gaz à effet de serre — sachant que leur étude comÂporÂtait de nomÂbreux angles morts, d’aspects proÂbléÂmaÂtiques qu’ils ne prennent pas en compte, au niveau écoÂloÂgique comme au niveau de l’éthique, supréÂmaÂcisme humain oblige. Pablo SerÂvigne et Raphael SteÂvens parÂviennent à cette même concluÂsion dans leur livre « ComÂment tout peut s’effondrer », publié en 2015 aux édiÂtions du Seuil :
« En résuÂmé, les énerÂgies renouÂveÂlables n’ont pas assez de puisÂsance pour comÂpenÂser le déclin des énerÂgies fosÂsiles, et il n’y a pas assez d’énergies fosÂsiles (et de mineÂrais) pour déveÂlopÂper masÂsiÂveÂment les énerÂgies renouÂveÂlables de façon à comÂpenÂser le déclin annonÂcé des énerÂgies fosÂsiles. Comme le résume Gail TverÂberg, actuaire et spéÂciaÂliste de l’économie de l’énergie, « on nous dit que les renouÂveÂlables vont nous sauÂver, mais c’est un menÂsonge. L’éolien et le solaire phoÂtoÂvolÂtaïque font autant parÂtie de notre sysÂtème basé sur les énerÂgies fosÂsiles que n’importe quelle autre source d’électricité ». »
A l’instar de PhiÂlippe Bihouix, qui a publié « L’Âge des low tech », égaÂleÂment aux édiÂtions du Seuil, en 2014 :
« En réaÂliÂté, le déveÂlopÂpeÂment des énerÂgies renouÂveÂlables ne perÂmet pas, et ne perÂmetÂtra pas, de mainÂteÂnir notre niveau effaÂrant de dépense énerÂgéÂtique et d’absorber la croisÂsance contiÂnue de notre consomÂmaÂtion matéÂrielle.
Il est insenÂsé de croire que l’on peut réduire les émisÂsions de gaz à effet de serre signiÂfiÂcaÂtiÂveÂment sans réduire masÂsiÂveÂment notre consomÂmaÂtion énerÂgéÂtique. De ce point de vue, la « croisÂsance verte », qui élude la quesÂtion de nos modes de vie, est une mysÂtiÂfiÂcaÂtion absoÂlue. Les chiffres le montrent aiséÂment. »
&, aux États-Unis, du cherÂcheur Ozzie ZehÂner, qui a publié en 2012 un excellent livre, dans lequel il criÂtique la manière dont les énerÂgies renouÂveÂlables sont disÂcuÂtées, intiÂtuÂlé Green IlluÂsions : The DirÂty Secrets of Clean EnerÂgy and the Future of EnviÂronÂmenÂtaÂlism (en franÂçais : « Les illuÂsions vertes : les sales secrets de l’énergie propre et le futur de l’environnementalisme ») :
« Il y a cette impresÂsion de choix entre comÂbusÂtibles fosÂsiles et techÂnoÂloÂgies énerÂgéÂtiques propres comme les panÂneaux solaires et les éoliennes. Ce choix est une illuÂsion. Ces techÂnoÂloÂgies alterÂnaÂtives reposent, à tous leurs stades de proÂducÂtion, sur les comÂbusÂtibles fosÂsiles. Les techÂnoÂloÂgies alterÂnaÂtives dépendent des comÂbusÂtibles fosÂsiles lors des opéÂraÂtions d’extractions, dans les usines de fabriÂcaÂtions, pour l’installation, la mainÂteÂnance, et le démanÂtèÂleÂment. En plus, à cause de l’irrégularité de proÂducÂtion du solaire et de l’éolien, ces techÂnoÂloÂgies requièrent des cenÂtrales à comÂbusÂtibles fosÂsiles opéÂraÂtionÂnelles en paralÂlèle et en perÂmaÂnence. Et, plus signiÂfiÂcaÂtif encore, le finanÂceÂment des énerÂgies alterÂnaÂtives dépend du type de croisÂsance souÂteÂnu par les comÂbusÂtibles fosÂsiles. »
PréÂsenÂter le fait de manÂger du pouÂlet pluÂtôt que du bÅ“uf comme une soluÂtion à la catasÂtrophe qui se proÂfile relève égaÂleÂment du menÂsonge, à la difÂféÂrence près que celui-ci perÂmet de rire un coup.
Si les soluÂtions préÂsenÂtées, qui n’en sont pas vraiÂment, sont autant de menÂsonges, elles ne sont pas les seuls du docuÂmenÂtaire, et découlent des nomÂbreuses omisÂsions qu’on y relève ausÂsi. A comÂmenÂcer par celle qui préÂtend que tous les humains du monde rêvent de bénéÂfiÂcier du mode de vie de l’américain moyen. Ce qui n’est pas disÂcuÂté, c’est le pourÂquoi et le comÂment. Les milÂliards d’êtres humains qui peuplent les états modernes ne se sont pas sponÂtaÂnéÂment réveillés un matin avec l’envie presÂsante de boire du Coca-Cola, de manÂger chez McDoÂnalds, de posÂséÂder un smartÂphone, un écran plat, une PlaySÂtaÂtion et de conduire un 4x4. Un fasÂtiÂdieux traÂvail sécuÂlaire de condiÂtionÂneÂment, de marÂkeÂting, de publiÂciÂté, de coloÂniaÂlisme, de desÂtrucÂtions cultuÂrelles, d’acculturations, de coerÂciÂtions étaÂtiques, de matraÂquage médiaÂtique et de fabriÂcaÂtion du consenÂteÂment, a été nécesÂsaire pour qu’ils en arrivent là . Ce traÂvail, que l’on pourÂrait imaÂgiÂner inverÂser (mais qui ne peut pas l’être, par défiÂniÂtion) afin de vendre un rêve de décroisÂsance, n’est éviÂdemÂment pas menÂtionÂné.
« Un cliÂché rebatÂtu, qui préÂtend résuÂmer de manière frapÂpante les « impasses du déveÂlopÂpeÂment », et appeÂler à la contriÂtion, affirme que pour assuÂrer le mode de vie d’un AméÂriÂcain moyen à l’ensemble de la popuÂlaÂtion monÂdiale, il nous fauÂdrait disÂpoÂser de six ou sept plaÂnètes comme la nôtre. Le désastre est éviÂdemÂment bien pluÂtôt qu’un tel « mode de vie » – en réaÂliÂté une vie paraÂsiÂtaire, honÂteuse et dégraÂdante dont les stigÂmates si visibles sur ceux qui la mènent se comÂplètent des corÂrecÂtions de la chiÂrurÂgie esthéÂtique – semble désiÂrable et soit effecÂtiÂveÂment désiÂré par l’immense majoÂriÂté de la popuÂlaÂtion monÂdiale. (Et c’est pourÂquoi la vulÂgaÂriÂté des nanÂtis peut s’exhiber avec une telle comÂplaiÂsance, sans plus rien conserÂver de la reteÂnue et de la disÂcréÂtion bourÂgeoises : ils susÂcitent l’envie – il leur faut tout de même des gardes du corps – mais pas la haine et le mépris qui préÂpaÂraient les révoÂluÂtions.) »
— Jaime SemÂprun & René RieÂsel, « CatasÂtroÂphisme, admiÂnisÂtraÂtion du désastre et souÂmisÂsion durable » (ÉdiÂtions de l’EncyÂcloÂpéÂdie des NuiÂsances, 2008)
Un autre menÂsonge imporÂtant (un des plus signiÂfiÂcaÂtifs du docuÂmenÂtaire, et de la proÂpaÂgande médiaÂtique en généÂral) explique peut-être pourÂquoi rien de tout ça n’est disÂcuÂté ou à peine menÂtionÂné : durant tout le docuÂmenÂtaire, une idée répanÂdue mais (ou donc) fausse, est disÂtilÂlée, selon laquelle les états-nations modernes sont des démoÂcraÂties foncÂtionÂnelles. LeoÂnarÂdo DiCaÂprio quaÂliÂfie, par exemple — selon une bienÂséance de mise — le préÂsident des Etats-Unis d’Amérique, Barack ObaÂma, de « leaÂder du monde libre ». GreÂgoÂry ManÂkiw, un presÂtiÂgieux écoÂnoÂmiste états-unien (PrinÂceÂton-HarÂvard-MIT), et ancien conseiller écoÂnoÂmique de George W. Bush — qui a d’ailleurs publié un article à son sujet, au moment des élecÂtions états-unienne de 2000, intiÂtuÂlé « Bush is a LeaÂder The EcoÂnoÂmy Can Trust », en franÂçais « Bush est un diriÂgeant auquel l’économie peut faire confiance », dans lequel il expliÂquait pourÂquoi il voteÂrait pour Bush pluÂtôt que pour Al Gore, Ô iroÂnie — interÂviewé dans le film, nous y explique que les hommes poliÂtiques « font ce que le peuple veut qu’ils fassent », que « Les hommes poliÂtiques sont des élus et ils suivent leurs élecÂteurs ». Nous ne penÂsons pas nécesÂsaire d’expliquer en quoi tout ça est groÂtesque. Nous ne vivons pas en démoÂcraÂtie. Par manque de place, pour éviÂter une trop longue digresÂsion, nous ne détailleÂrons pas plus, nous nous contenÂteÂrons de sugÂgéÂrer à ceux qui ne le comÂprennent pas, d’arrêter de ronÂfler et d’ouvrir les yeux.
A souÂliÂgner égaÂleÂment, l’hypocrisie de pasÂser 15 minutes à expliÂquer en quoi le lobÂby des indusÂtriels des comÂbusÂtibles fosÂsiles orgaÂnise finanÂcièÂreÂment la confuÂsion autour du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique et de sa réaÂliÂté (ce qui est tout à fait exact, le lobÂby de l’industrie des comÂbusÂtibles fosÂsiles essaie encore aujourd’hui de laisÂser plaÂner un cerÂtain doute), mais de se demanÂder pourÂquoi, très étranÂgeÂment, les gouÂverÂneÂments ne font rien contre les indusÂtriels de l’huile de palme. Le méchant lobÂby de l’industrie des comÂbusÂtibles fosÂsiles est fusÂtiÂgé tout au long du docuÂmenÂtaire, tanÂdis que tous les autres lobÂbys inhéÂrents à la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle, dont celui du marÂkeÂting de la démoÂcraÂtie, ou celui de n’importe quel secÂteur indusÂtriel, ne sont pas même menÂtionÂnés.
Nous ne nous attarÂdeÂrons pas sur la soi-disant « soluÂtion » consisÂtant à faire en sorte que le grand public ait accès aux releÂvés des émisÂsions de gaz à effet de serre (ou d’autres types de polÂluÂtions, l’idée serait la même) en temps réel — « sur leur téléÂphone » porÂtable, cette invenÂtion forÂmiÂdable — des cenÂtrales (ou d’usines, quelles qu’elles soient), afin que « les gens » puissent « exiÂger que ces usines arrêtent leurs infracÂtions ». On ne va pas vous faire l’insulte de vous rapÂpeÂler qu’il ne faut pas compÂter sur les pétiÂtions — les lettres au préÂsident, ou au PDG, au sénaÂteur, aux aliens, à Dieu, à qui ou quoi que ce soit — pour « chanÂger le monde », ou simÂpleÂment pour démanÂteÂler la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle de croisÂsance.
En outre, tout le docuÂmenÂtaire a été réaÂliÂsé selon une vision du monde absoÂluÂment anthroÂpoÂcenÂtrée (ce qui, à nouÂveau, n’a rien d’étonnant). Les humains (civiÂliÂsés) gèrent la plaÂnète, sur laquelle il se trouve que d’autres espèces (et d’autres cultures humaines inciÂviÂliÂsées, même si de moins en moins) résident ausÂsi, seuleÂment, celles-ci constiÂtuent le décor de la granÂdiose avenÂture humaine que l’on appelle civiÂliÂsaÂtion, c’est pourÂquoi la persÂpecÂtive du chanÂgeÂment cliÂmaÂtique n’est enviÂsaÂgé que sous l’angle des conséÂquences pour les humains (civiÂliÂsés) — « ComÂment assuÂrer un futur prosÂpère pour l’humanité ? » s’inquiète Johan RocksÂtrom, ou, plus expliÂcite encore, pour la « préÂserÂvaÂtion de l’ordre monÂdial exisÂtant », dixit ObaÂma. Le moment du docuÂmenÂtaire qui s’attarde le plus sur le sort d’autres aniÂmaux nous incite à manÂger du pouÂlet pluÂtôt que du bÅ“uf. VoiÂlà pour nos esclaves amis les aniÂmaux. Peu importe que la surÂexÂploiÂtaÂtion, ainÂsi que l’étalement urbain, autreÂment dit l’accaparement d’une surÂface de plus en plus imporÂtante de la plaÂnète, par la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle de croisÂsance, figurent parÂmi les prinÂciÂpaux facÂteurs préÂciÂpiÂtant les autres espèces vers l’extinction.
La myriade de proÂblèmes que pose l’existence de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle pour la contiÂnuaÂtion, la diverÂsiÂté, et la prosÂpéÂriÂté de la vie sur Terre, qui devrait être connue de chaÂcun de nous, et que nous rapÂpeÂlons brièÂveÂment dans l’à proÂpos de ce site,
« Du côté de la vie non-humaine : les forêts du monde sont dans un état désasÂtreux (en ce qui concerne les vraies forêts, pas les planÂtaÂtions ou monoÂculÂtures modernes ; il n’en resÂteÂrait que deux) et qui ne cesse d’empirer. La pluÂpart des écoÂsysÂtèmes oriÂgiÂnels ont été modiÂfiés (détruits, ou détraÂqués), d’une façon ou d’une autre (25% des fleuves n’atteignent plus l’océan ; depuis moins de 60 ans, 90% des grands poisÂsons, 70% des oiseaux marins et, plus généÂraÂleÂment, 52% des aniÂmaux sauÂvages, ont disÂpaÂru ; depuis moins de 40 ans, le nombre d’animaux marins, dans l’ensemble, a été diviÂsé par deux). Les scienÂtiÂfiques estiment que nous vivons aujourd’hui la sixième extincÂtion de masse. Sachant que les déclins en popuÂlaÂtions aniÂmales et végéÂtales ne datent pas d’hier, et qu’une dimiÂnuÂtion par rapÂport à il y a 60 ou 70 ans masque en réaÂliÂté des pertes bien pires encore (cf. l’amnésie écoÂloÂgique). On estime que d’ici 2048 les océans n’abriteront plus aucun poisÂson. D’autres proÂjecÂtions estiment que d’ici 2050, il y aura plus de plasÂtiques que de poisÂsons dans les océans. On estime égaÂleÂment que d’ici à 2050, la quaÂsi-totaÂliÂté des oiseaux marins auront ingéÂré du plasÂtique. La pluÂpart des biomes de la plaÂnète ont été contaÂmiÂnés par difÂféÂrents proÂduits chiÂmiques toxiques de synÂthèse (cf. l’empoisonnement uniÂverÂsel de NicoÂliÂno). L’air que nous resÂpiÂrons est désorÂmais clasÂsé canÂcéÂriÂgène par l’OMS. Les espèces aniÂmales et végéÂtales disÂpaÂraissent (sont tuées) au rythme de 200 par jour (estiÂmaÂtion de l’ONU). Les dérèÂgleÂments cliÂmaÂtiques auxÂquels la plaÂnète est d’ores et déjà condamÂnée proÂmettent d’effroyables conséÂquences.) »
en est réduite, dans ce docuÂmenÂtaire, à la menace que constiÂtue le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique d’origine anthroÂpique (plus préÂciÂséÂment, d’origine civiÂliÂsée), pour la perÂpéÂtuaÂtion de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle.
ConforÂméÂment aux vÅ“ux de Jeff Bezos, PDG d’Amazon, qui a récemÂment déclaÂré — énonÂçant ainÂsi ouverÂteÂment ce que pensent tout bas la grande majoÂriÂté des PDG de corÂpoÂraÂtions et des diriÂgeants poliÂtiques (encore une fois, si tant est qu’il y ait une difÂféÂrence) — que,
« Nous ne vouÂlons pas vivre dans un monde rétroÂgrade. Nous ne vouÂlons pas vivre sur une Terre où nous devrions geler la croisÂsance de la popuÂlaÂtion et réduire l’utilisation d’énergie. Nous proÂfiÂtons d’une civiÂliÂsaÂtion extraÂorÂdiÂnaire, aliÂmenÂtée par de l’énergie, et par la popuÂlaÂtion. […] Nous vouÂlons que la popuÂlaÂtion contiÂnue à croître sur cette plaÂnète. Nous vouÂlons contiÂnuer à utiÂliÂser plus d’énergie par perÂsonne. »
le docuÂmenÂtaire de LeoÂnarÂdo DiCaÂprio ne préÂfiÂgure en rien une décroisÂsance d’aucune sorte, même si cerÂtains se débrouilleÂront cerÂtaiÂneÂment pour affirÂmer le contraire. En revanche, ce qu’il préÂfiÂgure, ce sont les mesures imporÂtantes qui seront prises pour gérer les chanÂgeÂments que le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique impoÂseÂra à la sociéÂté indusÂtrielle, qui devra s’en accomÂmoÂder, puisqu’elle ne compte plus vraiÂment l’empêcher, qu’elle le consiÂdère désorÂmais comme « inéÂlucÂtable » (ce sur quoi nous allons reveÂnir).
Ce qui n’est jamais disÂcuÂté donc, et jamais sugÂgéÂré comme soluÂtion, c’est une désÂinÂdusÂtriaÂliÂsaÂtion, une vériÂtable décroisÂsance, l’abandon des strucÂtures sociales et des infraÂstrucÂtures techÂnoÂloÂgiques qui constiÂtuent la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle ; le renonÂceÂment à l’électricité indusÂtrielle et à tous les gadÂgets issus de l’industrialisme que l’on assoÂcie au « proÂgrès » (des téléÂphones porÂtables aux iPods, en pasÂsant par les 4x4, les ordiÂnaÂteurs porÂtables, les écrans plats, interÂnet, et, oui, les réfriÂgéÂraÂteurs, les fours micro-ondes, les rasoirs élecÂtriques, les antiÂbioÂtiques indusÂtriels, les vacÂcins indusÂtriels, etc.). Cette désÂinÂdusÂtriaÂliÂsaÂtion — ce renonÂceÂment aux mythes assoÂciés au proÂgrès techÂnoÂloÂgique — est cruÂciale, ainÂsi que le rapÂpellent le jourÂnaÂliste écoÂloÂgiste Fabrice NicoÂliÂno dans un article récemÂment publié sur son site,
« Quel est le moteur à exploÂsion de la crise cliÂmaÂtique ? La proÂducÂtion masÂsive d’objets inutiles qu’il faut remÂplaÂcer au plus vite pour que tourne la machine. Ce qui inclut les télés plasÂma, les trotÂtiÂnettes élecÂtriques, les ordiÂnaÂteurs derÂnier cri, les bagnoles cliÂmaÂtiÂsées avec appaÂreillage élecÂtroÂnique de bord perÂmetÂtant de se branÂler sans ralenÂtir, les vacances à la monÂtagne et à Bali, l’avion pour aller pisÂser au-desÂsus de l’Atlantique, les casques pour se tuer l’oreille, la goûÂteuse nourÂriÂture indusÂtrielle, etc.
[…] Nul n’envisage de remettre en cause un modèle si exalÂtant, et voiÂci pourÂquoi tous leurs disÂcours ne sont que daube comÂmerÂciale. »
et l’auteur états-unien DerÂrick JenÂsen,
« Il n’est pas quesÂtion d’exterminer les iPads, les iPhones, les techÂnoÂloÂgies inforÂmaÂtiques, les toits rétracÂtables de stades, les insecÂtiÂcides, les OGMs, l’internet (que diable, la porÂnoÂgraÂphie sur InterÂnet), les véhiÂcules tout-terÂrains, les armes nucléaires, les drones préÂdaÂteurs, l’agriculture indusÂtrielle, l’électricité indusÂtrielle, la proÂducÂtion indusÂtrielle, les bénéÂfices de l’impérialisme (humains, états-uniens, ou autre).
Nous n’en parÂlons pas. Jamais. Pas une seule fois. »
BeauÂcoup sauÂteÂront au plaÂfond en lisant cela — en criant à l’obscurantisme, en dénonÂçant des velÂléiÂtés autoÂriÂtaires, etc. — les mêmes qui ignorent volonÂtiers toutes les formes de coerÂciÂtion, d’exploitations humaines et non-humaines, de desÂtrucÂtions enviÂronÂneÂmenÂtales, hisÂtoÂriques et actuelles, qui furent et qui sont encore nécesÂsaires à l’industrialisme. RapÂpeÂlons donc que la popuÂlaÂtion humaine croisÂsait et prosÂpéÂrait déjà avant la « révoÂluÂtion indusÂtrielle », tanÂdis qu’après, la popuÂlaÂtion humaine a comÂmenÂcé à exploÂser de façon inconÂtrôÂlée et inconÂsiÂdéÂrée, les popuÂlaÂtions d’espèces non-humaines ont comÂmenÂcé à décliÂner masÂsiÂveÂment de manière inconÂtrôÂlée et inconÂsiÂdéÂrée, l’environnement plaÂnéÂtaire a comÂmenÂcé à être altéÂré, polÂlué, détruit, exploiÂté et contaÂmiÂné de manière inconÂtrôÂlée et inconÂsiÂdéÂrée.
CepenÂdant, que les choses aient pris une très mauÂvaise tourÂnure avec la « révoÂluÂtion indusÂtrielle » n’implique pas que la situaÂtion préÂinÂdusÂtrielle était excelÂlente. Nos proÂblèmes sont plus proÂfonds et plus anciens encore que cette soi-disant « révoÂluÂtion » ; citons, à ce proÂpos, un extrait de ce qu’a récemÂment écrit Max WilÂbert (article comÂplet ici) :
« Bien que les comÂbusÂtibles fosÂsiles ne soient brûÂlés à grande échelle que depuis 200 ans, le défriÂchage de terre est une caracÂtéÂrisÂtique propre aux civiÂliÂsaÂtions — ces cultures fonÂdées sur les villes et l’agriculture — depuis leur avèÂneÂment il y a 8000 ans.
Ce défriÂchage de terre a un impact sur le cliÂmat monÂdial. Lorsqu’un écoÂsysÂtème foresÂtier est remÂplaÂcé par de l’agriculture, plus des 2/3 du carÂbone qu’il stoÂckait sont relâÂchés, et le carÂbone conteÂnu dans les sols riches en matières orgaÂniques contiÂnueÂra à s’échapper au fur et à mesure de l’érosion qui s’ensuivra. »
Ou ce sucÂcinct résuÂmé par Lierre Keith d’une trop ancienne hisÂtoire de desÂtrucÂtion :
« L’agriculture engendre un mode de vie que l’on appelle civiÂliÂsaÂtion. La civiÂliÂsaÂtion désigne les regrouÂpeÂments humains sous forme de villes. Ce que cela signiÂfie : un niveau de besoin qui excède ce que la terre peut offrir. La nourÂriÂture, l’eau, l’énergie doivent venir de quelque part. Peu importe les jolies et paciÂfiques valeurs que les gens portent en leurs cÅ“urs. La sociéÂté est dépenÂdante de l’impérialisme et du génoÂcide. Parce que perÂsonne n’accepte d’abandonner sa terre, son eau, ses arbres. Et parce que la ville a utiÂliÂsé les siens jusqu’à épuiÂseÂment, elle doit s’en proÂcuÂrer ailleurs. VoiÂlà les 10 000 derÂnières années résuÂmées en quelques lignes.
La fin de la civiÂliÂsaÂtion est insÂcrite dans son comÂmenÂceÂment. L’agriculture détruit le monde. Et il ne s’agit pas de l’agriculture lors de ses mauÂvais jours. C’est simÂpleÂment ce qu’est l’agriculture. Vous abatÂtez les forêts, vous labouÂrez les praiÂries, vous draiÂnez les zones humides. Et, plus spéÂciÂfiÂqueÂment, vous détruiÂsez le sol. Les civiÂliÂsaÂtions durent entre 800 et peut-être 2000 ans — jusqu’à ce que le sol ne puisse plus suivre.
[…] La civiÂliÂsaÂtion est fonÂdée sur le préÂlèÂveÂment. Celui-ci s’appuie sur l’impérialisme, la prise de pouÂvoir sur le voiÂsiÂnage et le pillage de ses terres, mais en fin de compte, même les coloÂnies finissent par s’épuiser. Le comÂbusÂtible fosÂsile a été un accéÂléÂraÂteur, tout comme le capiÂtaÂlisme, mais le proÂblème sous-jacent est bien plus imporÂtant que l’un ou l’autre. La civiÂliÂsaÂtion requiert l’agriculture, et l’agriculture est une guerre que l’on mène contre le vivant. »
Mettre fin à la desÂtrucÂtion de la plaÂnète par la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle (et mettre fin à cette orgaÂniÂsaÂtion sociale proÂfonÂdéÂment inégaÂliÂtaire, démente et aliéÂnante) — que cette desÂtrucÂtion revête la forme du réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique, de la polÂluÂtion de l’air, de la polÂluÂtion des sols, de la polÂluÂtion des eaux, de la défoÂresÂtaÂtion, de l’anéantissement de l’habitat des autres espèces aniÂmales ou végéÂtales, de leur surÂexÂploiÂtaÂtion, du déclin de leurs popuÂlaÂtions et de leurs extincÂtions, ou n’importe quelle autre — exige un chanÂgeÂment radiÂcal, d’une magniÂtude colosÂsale et d’une ampleur plaÂnéÂtaire, tel qu’il est difÂfiÂcile pour quiÂconque d’en prendre la mesure. Cela exige, entre autres, un (ré-)approfondissement de nos connaisÂsances de l’écologie de la plaÂnète, de l’histoire (et de la préÂhisÂtoire) de l’humanité (ou des humaÂniÂtés), une meilleure comÂpréÂhenÂsion du foncÂtionÂneÂment et des impliÂcaÂtions sociales et écoÂloÂgiques de la sociéÂté indusÂtrielle ; pour un tel apprenÂtisÂsage, il est éviÂdemÂment naïf de compÂter sur une éduÂcaÂtion natioÂnale (étaÂtique), ou, plus généÂraÂleÂment, sur les organes offiÂciels de la culture qui pose proÂblème, puisque ceux-ci ont tout intéÂrêt à tronÂquer, filÂtrer ou cenÂsuÂrer l’information qu’ils disÂtilÂlent, par intéÂrêt (insÂtinct de surÂvie). Nous ne faiÂsons pas tant réféÂrence ici à une quelÂconque théoÂrie du comÂplot qu’à des phéÂnoÂmènes de l’ordre de l’inertie et de la disÂsoÂnance cogÂniÂtive, ou au fait que l’histoire est écrite par les vainÂqueurs. Ce sujet mériÂteÂrait de biens plus amples déveÂlopÂpeÂments ; pour éviÂter une autre longue digresÂsion, nous nous contenÂteÂrons de citer un extrait de l’excellent livre « L’Etat » (1949), écrit par BerÂnard CharÂbonÂneau :
« Le proÂgrès le plus imporÂtant accomÂpli par l’État au XIXe siècle, le plus lourd de conséÂquences pour l’avenir, c’est sa main mise sur l’enseignement. Jusque-là , dans la sociéÂté occiÂdenÂtale l’enseignement était laisÂsé à l’initiative des indiÂviÂdus ou des groupes. Le roi proÂtéÂgeait ou surÂveillait, mais même quand il fonÂdait le colÂlège de France, il ne lui venait pas à l’idée d’instruire. Aujourd’hui, de cette indéÂpenÂdance de la foncÂtion enseiÂgnante, à peu près rien ne reste en France, sauf quelques priÂviÂlèges désuets dans la disÂciÂpline intéÂrieure des faculÂtés, par exemple le droit pour les doyens de refuÂser l’entrée des bâtiÂments uniÂverÂsiÂtaires à la police. »
Ce qui est sûr, c’est que les racines de la dégraÂdaÂtion de l’environnement et des injusÂtices sociales sont bien plus anciennes que beauÂcoup ne l’imaginent, et bien plus comÂplexes ; que les mirages absurdes ériÂgés en soluÂtions et venÂdus par les élites de la civiÂliÂsaÂtion domiÂnante n’ont pour but que sa perÂpéÂtuaÂtion ; que le coût du soi-disant proÂgrès techÂnoÂloÂgique, de l’industrialisme, dépasse larÂgeÂment ses bénéÂfices, et d’abord parce qu’il s’agit de concepts fonÂdaÂmenÂtaÂleÂment desÂtrucÂteurs du monde natuÂrel ; que le mythe des techÂnoÂloÂgies vertes-renouÂveÂlables-ou-propres est ausÂsi absurde et irréel que la démaÂtéÂriaÂliÂsaÂtion de l’économie ; qu’aucune civiÂliÂsaÂtion n’a jamais été ni viable écoÂloÂgiÂqueÂment, ni juste sociaÂleÂment (que les sociéÂtés de masse connaissent inéÂlucÂtaÂbleÂment toutes sortes de proÂblèmes écoÂloÂgiques et sociaux qui leurs sont inhéÂrents).
Enfin, contraiÂreÂment à son préÂdéÂcesÂseur (Une vériÂté qui dérange), le docuÂmenÂtaire de LeoÂnarÂdo DiCaÂprio baisse d’un ton au niveau des préÂtenÂtions optiÂmistes, et tend même à insisÂter sur l’inéluctabilité de catasÂtrophes à venir (ce qui n’est pas nécesÂsaiÂreÂment faux, au contraire ; mais qui relève jusÂteÂment de ce que le film sous-entend finaÂleÂment la contiÂnuaÂtion de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle, à quelques éco-réformesâ„¢ et détails durables© près) ; d’où la déclaÂraÂtion de John KerÂry, dans le docuÂmenÂtaire, à proÂpos de l’accord de la COP 21 : « Cet accord préÂpaÂreÂra le monde à l’impact des chanÂgeÂments cliÂmaÂtiques qui se maniÂfestent déjà et de ceux que nous savons désorÂmais inéviÂtables », et celle d’Elon Musk, selon qui « nous nous diriÂgeons inéÂlucÂtaÂbleÂment vers un cerÂtain niveau de proÂblèmes ». De leurs parts, de telles vatiÂciÂnaÂtions n’ont rien d’étonnant, étant donÂné qu’ils parÂtiÂcipent tous deux à ce que la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle contiÂnue son expanÂsion sans fin (et d’ailleurs, jusqu’à la plaÂnète Mars, puisque c’est ce que souÂhaite Elon Musk ; un proÂjet fanÂtaiÂsiste, tout sauf souÂhaiÂtable, et quoi qu’il en soit absoÂluÂment pas prioÂriÂtaire, qui sera cerÂtaiÂneÂment par trop énerÂgiÂvore et consomÂmaÂteur en resÂsources).
« Quand finaÂleÂment l’officialisation de la crise écoÂloÂgique (en parÂtiÂcuÂlier sous l’appellation de « réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique ») donne lieu à de préÂtenÂdus « débats », ceux-ci resÂtent étroiÂteÂment cirÂconsÂcrits par les repréÂsenÂtaÂtions et les catéÂgoÂries plaÂteÂment proÂgresÂsistes que les moins insiÂpides des disÂcours catasÂtroÂphistes annoncent pourÂtant vouÂloir remettre en cause. PerÂsonne ne songe à consiÂdéÂrer le catasÂtroÂphisme pour ce qu’il est effecÂtiÂveÂment, à le saiÂsir dans ce qu’il dit à la fois de la réaÂliÂté préÂsente, de ses antéÂcéÂdents et des réaÂliÂtés aggraÂvées qu’il souÂhaite antiÂciÂper. »
— Jaime SemÂprun & René RieÂsel, « CatasÂtroÂphisme, admiÂnisÂtraÂtion du désastre et souÂmisÂsion durable » (ÉdiÂtions de l’EncyÂcloÂpéÂdie des NuiÂsances, 2008)
La disÂcusÂsion entre SuniÂta Narain (une écoÂloÂgiste indienne, proÂmoÂtrice du déveÂlopÂpeÂment durable) et LeoÂnarÂdo DiCaÂprio (37ème minute, enviÂron) est un des moments clés pour comÂprendre tout ce qui ne va pas dans ce blockÂbusÂter docuÂmenÂtaire, et dans la façon dont la culture domiÂnante, à traÂvers les médias domiÂnants, disÂcute des proÂblèmes écoÂloÂgiques et sociaux de notre temps. Non seuleÂment SuniÂta Narain explique-t-elle qu’il est juste et souÂhaiÂtable que toute l’Inde s’industrialise, que tous les indiens aient accès à l’électricité indusÂtrielle (et donc à la consomÂmaÂtion indusÂtrielle, aux écrans plats, aux comÂmandes sur AmaÂzon, à interÂnet, aux smartÂphones, aux ordiÂnaÂteurs porÂtables, aux consoles de jeux vidéo, etc. — si vous penÂsez que ce n’est pas ce qu’engendre le racÂcorÂdeÂment et l’intégration de comÂmuÂnauÂtés non-indusÂtriaÂliÂsées à la sociéÂté indusÂtrielle, voyez vous-mêmes, à traÂvers l’exemple des TokeÂlau) ; et donc que le monde entier puisse s’intégrer à la sociéÂté indusÂtrielle, ce qui constiÂtue une catasÂtrophe inimaÂgiÂnable, puisque seule une désÂinÂdusÂtriaÂliÂsaÂtion, une sorÂtie masÂsive et plaÂnéÂtaire de la sociéÂté indusÂtrielle, pourÂrait faire cesÂser, à terme, les desÂtrucÂtions écoÂloÂgiques et les inégaÂliÂtés sociales ; mais il y a pire, LeoÂnarÂdo DiCaÂprio y admet que « la quesÂtion du mode de vie et de la consomÂmaÂtion doit être au centre des négoÂciaÂtions », que « c’est un arguÂment très difÂfiÂcile à faire entendre aux AméÂriÂcains », qui devraient « chanÂger leur mode de vie », mais que, finit-il par affirÂmer fataÂleÂment, « ça n’arÂriÂveÂra jamais » ; il contiÂnue alors en expliÂquant qu’il faut compÂter sur les énerÂgies renouÂveÂlables pour résoudre tous nos proÂblèmes. Le prinÂciÂpal proÂblème, avec ce raiÂsonÂneÂment, c’est qu’il n’a aucun sens. S’il en a un, c’est un mauÂvais sens, un sens létal.
Il s’agit là d’un aveu terÂrible, qui nous dit tout. Le mode de vie hauÂteÂment consuÂméÂriste des améÂriÂcains (et, plus généÂraÂleÂment, des membres de la sociéÂté indusÂtrielle, en France, en BelÂgique, en Chine, en TurÂquie ou au ChiÂli, parÂfois dans des moindres mesures) ne chanÂgeÂra pas. C’est hors de quesÂtion, impenÂsable, inimaÂgiÂnable. A parÂtir de là , les catasÂtrophes deviennent inéÂlucÂtables, jusqu’à la catasÂtrophe finale, la desÂtrucÂtion de la majeure parÂtie de la vie qu’héberge encore la plaÂnète. Les soi-disant renouÂveÂlables, comme nous l’expliquions plus haut, n’y feront rien. Au contraire, elles ajouÂteÂront à la proÂducÂtion énerÂgéÂtique monÂdiale et perÂmetÂtront la contiÂnuaÂtion de l’expansion techÂno-indusÂtrielle. Les 1,2 milÂliards d’humains qui vivent encore en dehors de la sociéÂté indusÂtrielle, sans l’électricité — cette bénéÂdicÂtion, ce saint Graal moderne, qui garanÂtit, n’est-ce pas, une féliÂciÂté et un contenÂteÂment suprêmes — ajouÂteÂront leurs consomÂmaÂtions aux nôtres, pour eux ausÂsi obteÂnir le priÂviÂlège de s’aliéner dans les méandres d’un sysÂtème techÂnoÂloÂgique dont la croisÂsance inerÂtielle, peu importe la manière dont on la préÂsente, qu’elle repose sur les comÂbusÂtibles fosÂsiles ou sur leurs dériÂvés, les soi-disant renouÂveÂlables, ne sera jamais entraÂvée par ceux qui le contrôlent et en bénéÂfiÂcient.
En guise de concluÂsion, repreÂnons une parÂtie de l’introduction du livre « Deep Green ResisÂtance » :
« ComÂment stoppe-t-on un réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique gloÂbal cauÂsé en grande parÂtie par la comÂbusÂtion de pétrole et de gaz ? La réponse est une éviÂdence, que n’importe quel enfant de 7 ans, norÂmaÂleÂment constiÂtué, devrait être en mesure de vous donÂner. Mais si vous demanÂdez à n’importe quelle perÂsonne de 35 ans, norÂmaÂleÂment constiÂtuée, traÂvaillant par exemple dans le déveÂlopÂpeÂment durable pour une grande mulÂtiÂnaÂtioÂnale, vous receÂvrez proÂbaÂbleÂment une réponse plus à même d’aider la mulÂtiÂnaÂtioÂnale que le monde réel.
Quand la pluÂpart des membres de cette culture se demandent, « comÂment arrêÂter le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique ? », ils ne demandent pas vraiÂment ce qu’ils préÂtendent demanÂder. Ils demandent en réaÂliÂté, « comÂment arrêÂter le réchaufÂfeÂment cliÂmaÂtique sans arrêÂter de consomÂmer du pétrole et du gaz, sans arrêÂter le déveÂlopÂpeÂment indusÂtriel, sans arrêÂter ce sysÂtème omniÂciÂdaire ? ». La réponse est simple : c’est imposÂsible. »
La civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle est induÂbiÂtaÂbleÂment insouÂteÂnable, son exisÂtence est desÂtrucÂtrice, si bien qu’elle finiÂra immanÂquaÂbleÂment par s’autodétruire. Nous souÂhaiÂtons que la décomÂpoÂsiÂtion inéviÂtable de la civiÂliÂsaÂtion indusÂtrielle advienne au plus tôt — pour qu’enfin la plaÂnète puisse comÂmenÂcer à recouÂvrer la sanÂté —, et, si posÂsible, qu’elle ne soit pas patiemÂment ou fataÂleÂment attenÂdue (moins elle sera subie, moins ses membres en soufÂfriÂront). Il est déjà bien tard, cepenÂdant, s’il reste une issue de secours, il s’agit de la désÂinÂdusÂtriaÂliÂsaÂtion, d’une vériÂtable décroisÂsance, du démanÂtèÂleÂment des indusÂtries et des infraÂstrucÂtures de nos sociéÂtés techÂnoÂloÂgiques, et cerÂtaiÂneÂment pas du mal-nomÂmé « déveÂlopÂpeÂment durable » et de ses illuÂsions vertes.
ColÂlecÂtif Le ParÂtage
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