Davina Anne Grabriel était un homme qui eut un rôle assez important dans le milieu du militantisme trans pendant plusieurs décennies aux États-Unis (pour en savoir plus sur lui, il est possible de lire ce texte en anglais de la canadienne Eva Kurilova). Au cours de cette période d’activisme transidentitaire, il se disait « femme transsexuelle » (ayant subi une opération chirurgicale improprement dite « de réassignation sexuelle »). Il a notamment été le fondateur, le rédacteur en chef et l’éditeur d’une revue intitulée TransSisters : the Journal of Transsexual Feminism (« TransSoeurs : le journal du féminisme transsexuel »), publiée entre 1993 et 1995. Il a aussi aidé à organiser des manifestations, entre 1992 et 1995, contre la politique du Michigan Womyn’s Music Festival, un festival de musique réservé aux (vraies) femmes organisé chaque année dans le Michigan, de 1976 à 2015, date à laquelle les organisatrices ont semble-t-il choisi d’arrêter le festival, sans doute en raison de la pression croissante qu’exerçaient les militants trans. Autrement dit, les militants trans ont fini par réussir à détruire un festival de musique réservé aux femmes ! Quel formidable succès ! À partir de 1994, cette opposition (véritable harcèlement) transidentitaire contre la politique d’exclusivité femelle du festival avait pris la forme d’une sorte de contre-festival appelé « Camp Trans ». Gabriel est en outre l’inventeur du terme « transphobie » (c’est en tout cas ce qu’il revendique, et ça pourrait bien être le cas).
En 1996, il a cessé de publier la revue TransSisters et s’est complètement retiré de l’activisme transgenre. À la fin de sa vie, il répudiait complètement son militantisme passé. Au début de l’année 2000, il a envoyé une lettre à un collectif de lesbiennes dans laquelle il explique les raisons de son désengagement du mouvement trans. Il est mort en 2016 (par suicide, d’après certaines femmes), en laissant une autre lettre derrière-lui en guise d’adieu. Récemment tombé sur ces lettres (que l’on peut retrouver, en version originale, ici, pour la première, et ici, pour la seconde), je me suis permis de les traduire parce qu’elles me paraissent significatives. Si elles contiennent quelques idées maladroites ou inexactes, elles disent aussi beaucoup de vrai. Voici donc. (Dans la première, j’ai choisi de genrer Gabriel au féminin parce qu’il me semble qu’il l’avait rédigée dans cet esprit. Dans la seconde, je l’ai genré au masculin. Les raisons devraient vous apparaître au fil de la lecture.)
Nicolas Casaux
I. Lettre au collectif Lesbian Connection
Voici une lettre que je viens d’envoyer au groupe Lesbian Connection au sujet de la controverse « Son of Camp Trans » [« Fils du Camp Trans »]. Je ne sais pas si elle sera publiée ou non, c’est pourquoi j’aimerais la partager avec vous à l’avance. N’hésitez pas à la transmettre à toute personne que vous jugerez appropriée.
-Davina
27 janvier 2000
Chère LC [Lesbian Connection] :
Il s’agit d’une réponse à la nouvelle controverse concernant la présence de transsexuels au Michigan Womyn’s Music Festival (Festival de musique des femmes du Michigan), déclenchée par le groupe bien nommé « Son of Camp Trans ». Cette controverse a été initialement créée par l’expulsion de Nancy Burkholder du festival en 1991.
J’ai contribué à l’organisation et participé à une série d’actions de protestation contre la politique du festival qui consistait à n’accueillir que des femmes nées femmes [à refuser les soi-disant « femmes trans », c’est-à-dire les hommes qui se disent femmes] au cours des quatre années (1992–1995) qui ont suivi l’expulsion de Nancy, et j’ai été la seule femme transsexuelle à organiser et à participer à ces quatre actions. J’ai également été la fondatrice, rédactrice et éditrice de TransSisters : the Journal of Transsexual Feminism (« TransSoeurs : le journal du féminisme transsexuel »).
Dès le début, notre intention consistait à persuader les organisatrices de modifier la politique du festival afin d’autoriser les transsexuels hommes-vers-femmes [MTF, male-to-female] postopératoires [ayant été opérés] — mais pas préopératoires [non-opérés] — à y participer. Si nous demandions uniquement l’admission des postopératoires, c’est parce que nous pensions que la grande majorité des femmes participant au festival soutiendraient l’inclusion des transsexuels hommes-vers-femmes ayant été opérés, mais pas préopératoires, et que nous avions l’intention de respecter les souhaits des femmes présentes. Cette conviction a ultérieurement été confirmée par une enquête que nous avons menée en 1992 et par les nombreuses discussions qui ont eu lieu lors des ateliers organisés dans le cadre du festival.
Si les actions du « Camp Trans » pour faire pression sur le festival ont été interrompues après 1995, c’est principalement à cause de l’implication de Riki Anne Wilchins, qui a tout fait pour nous forcer à exiger également l’admission des transsexuels MTF préopératoires [non-opérés]. Peu après l’action de 1995, dégoûtée, je me suis totalement désinvestie du « mouvement transgenre », parce que je voyais qu’il s’orientait de plus en plus dans une direction très hostile et belliqueuse, en affirmant par exemple que les femmes qui ne voulaient pas voir de pénis dans un festival réservé aux femmes allaient devoir s’y faire, un point c’est tout. En outre, j’avais l’impression que le festival avait adopté une politique autorisant de facto les femmes transsexuelles postopératoires [les hommes ayant été opérés pour ressembler à des femmes] à assister au festival ; même si j’aurais préféré que ce soit la politique officielle du festival, j’étais prête à me contenter d’une politique de facto si tel était le prix à payer pour empêcher les personnes à pénis d’assister au festival et empêcher des gens comme Riki d’exploiter nos actions.
J’ai été profondément attristée et troublée, mais pas surprise, d’apprendre que Riki avait finalement atteint son objectif phallocentrique d’exposer des pénis à la vue des femmes, objectif qu’elle [il, Riki est un homme, comme l’auteur de cette lettre] préconise et pour lequel elle travaille depuis longtemps. J’y vois la confirmation que j’avais raison dans mon évaluation du « mouvement transgenre » lorsque je l’ai abandonné, et que j’avais également raison d’avoir affirmé que Riki est profondément misogyne — une affirmation qui a été fortement contestée au sein du « mouvement transgenre ». Les actions de Riki lèvent tout doute sur la véracité de mon affirmation.
J’ai été relativement satisfaite d’apprendre que les personnes préopératoires que Riki avait persuadées de s’exposer au festival ont finalement été persuadées de ne pas revenir au festival après avoir rencontré Lisa Vogel ; et j’espère qu’elles ont également réalisé à quel point elles ont été exploitées par Riki, qui ne cherchait qu’à satisfaire son insatiable ego.
Plusieurs lettres ont qualifié de « transphobie » le fait de ne pas autoriser les personnes qui s’identifient comme des femmes à assister au festival, ce qui est clairement déplacé. Si je peux me permettre de soutenir que cette accusation est erronée avec une telle assurance, c’est parce que je suis la personne qui a initialement inventé le terme « transphobia » [transphobie] en 1989. Je défie quiconque de trouver un usage antérieur de ce terme. En inventant ce terme, je ne voulais certainement pas désigner le désir de ne pas être contrainte de voir un pénis lors d’un festival réservé aux femmes.
D’autres femmes ont affirmé que le processus de déconstruction du genre conduisait inévitablement à devoir autoriser toute personne s’identifiant comme une femme à participer au festival. Ce n’est pas vrai non plus. Une femme a affirmé dans le numéro précédent que « la déconstruction du genre signifie précisément que les gens doivent être responsables de la revendication de leur propre identité de genre et ne doivent pas compter sur les autres pour la définir à leur place ». Cette affirmation n’est rien d’autre qu’une baliverne intéressée. L’objectif de tout type de déconstructionnisme consiste à faire la distinction entre ce qui est socialement construit et ce qui ne l’est pas ; il ne s’agit pas de parvenir à n’importe quelle conclusion arbitraire, subjective.
J’ai également été très déçue d’apprendre le soutien apporté au « Son of Camp Trans » par les Lesbian Avengers (« Vengeuses lesbiennes ») ; et j’en suis venue à réaliser qu’il s’agit simplement d’une autre organisation qui se préoccupe davantage de participer à ce vieux jeu absurde du « je-suis-plus-radical-que-toi » que des préoccupations légitimes des femmes du MWMF.
Le festival de musique des femmes du Michigan a une raison parfaitement légitime d’exclure les transsexuels MTF préopératoires (les hommes se disant femmes non-opérés). Leur admission ouvrirait également la porte aux drag-queens et finalement à toute personne souhaitant être admise. En revanche, permettre aux femmes transsexuelles postopératoires de participer n’aurait pas de telles conséquences. J’espère que cela deviendra un jour sa politique officielle. Les actions de groupes tels que « Son of Camp Trans » ne font qu’entraver cet objectif.
Davina Anne Gabriel
27 janvier 2000
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II. Lettre posthume
Si vous lisez ou entendez ceci, cela signifie que je suis mort. Je tiens à vous remercier tous et toutes d’avoir été mes ami·es et à vous dire que j’apprécie de vous avoir eu·es comme ami·es dans ma vie. Je regrette beaucoup la peine ou la détresse que cela peut vous causer. Vous avez rendu ma vie plus riche. J’apprécie d’avoir eu la chance de vous côtoyer. J’espère que j’ai également enrichi votre vie d’une manière ou d’une autre et que j’ai été un bon ami pour vous. Veuillez me pardonner pour tout tort que j’aurais pu causer à l’un·e d’entre vous, ou pour vous avoir offensé·e ou blessé·e. Par la présente, je pardonne tous les torts qui m’ont été causés au cours de ma vie, quelle qu’en soit la gravité, car je souhaite n’emporter aucune mauvaise volonté envers qui que ce soit dans l’autre vie.
J’espère que vous garderez un bon souvenir de mon amitié. Il est important pour moi que vous vous souveniez de moi, c’est pourquoi je vous écris en ce moment. S’il vous plaît, ne vous souvenez pas de moi pour mon activisme en faveur de la cause transgenre. Si c’est pour cela que l’on se souvient de moi, je considérerai que ma vie a été gâchée. Je réfute et répudie tout cela aujourd’hui, car je n’y crois plus. Le fait est que je méprise le fait d’être un transsexuel. Je considère qu’avoir été un transsexuel a été une malédiction pour moi, qui ne m’a apporté que douleur et misère, et m’a empêché de réaliser tout mon potentiel en tant qu’être humain. Si je pouvais recommencer, je ne le ferais pas. Je maudis le jour où j’ai décidé de subir une opération de changement de sexe. Je considère qu’il s’agit de la pire erreur que j’aie jamais commise dans ma vie. Mais surtout, je maudis les facteurs sociaux qui m’ont forcée à le faire en me faisant croire que c’était nécessaire. Au lieu de soulager l’énorme douleur et la souffrance que je ressentais déjà, cela n’a eu pour effet que de multiplier cette douleur et cette souffrance par cent. Et pas seulement à cause de la discrimination ou des mauvais traitements que j’ai subis à cause de cela. Plutôt parce que le simple fait d’être un transsexuel m’a empêché de vivre une vie vraiment satisfaisante, en m’obligeant à consacrer inutilement d’énormes quantités de temps, d’énergie, d’émotions et de ressources à une chose qui n’était absolument pas nécessaire et qui n’a rien fait pour améliorer ma vie, mais l’a au contraire rendue pire à tous points de vue. En outre, je me suis rendu compte que le transsexualisme est une illusion, un trouble psychologique et une forme de haine de soi. Au lieu de m’ouvrir de nouvelles possibilités, il a entravé ma vie à tous les niveaux et de toutes les manières.
Je me suis rendu compte que toutes les causes de la dysphorie de genre sont sociologiques et non biologiques. Cela signifie que je ne crois plus que quiconque se trouve dans le « mauvais corps » ou soit du « mauvais sexe ». Le corps dans lequel la nature place les personnes et le sexe qu’elle leur attribue sont toujours les bons. Tous les sentiments d’être dans le « mauvais corps » ou d’être du « mauvais sexe » sont causés par des facteurs sociologiques, en particulier la manière dont le sexe et la sexualité sont socialement construits dans cette société. C’est uniquement parce que les gens intériorisent ces constructions sociales qu’ils ressentent un conflit entre leur esprit et leur corps. Le fait est qu’il n’y a pas de qualités internes, de traits, de caractéristiques ou de types de sentiments ou de pensées qui soient intrinsèquement opposés au fait d’être un homme ou une femme ; c’est seulement la société elle-même qui donne aux gens l’impression du contraire. Personne n’a réellement besoin de changer de sexe. Tout le monde est déjà dans le bon corps et dans le bon sexe. L’idée selon laquelle nous pourrions être dans le « mauvais corps » ou du « mauvais sexe » est une illusion. Malheureusement pour moi, je m’en suis rendu compte trop tard. S’il y a une chose dans ma vie que je pouvais changer en revenant dans le passé, ce serait ma décision de subir une opération de changement de sexe. Je considère que cette décision a été le fardeau de mon existence. J’espère qu’un jour l’espèce humaine sera plus éclairée et qu’elle se rendra compte que personne n’est dans le mauvais corps, que personne n’est du mauvais sexe, que personne ne doit changer de sexe pour être son « vrai soi », et que la malédiction de la dysphorie de genre cessera d’exister.
Je regrette également tout mon activisme au nom des causes transgenres, parce que je regrette d’avoir fait quoi que ce soit pour encourager quelqu’un à suivre la même voie erronée que moi. Les personnes transgenres s’illusionnent en s’imaginant gagner en autonomie grâce à la possibilité de changer de sexe ou en déstigmatisant la dysphorie de genre. Le fait est que la dysphorie de genre constitue la forme la plus extrême de malaise vis-à-vis de soi-même, une forme profonde de mal-être, et qu’elle repose sur une hypothèse de dualisme corps/esprit qui n’est étayée ni par la science ni par la philosophie. En outre, il s’agit d’une forme de haine de soi, parce qu’il s’agit d’une haine de son sexe biologique naturel, qui ne peut pas réellement être en conflit avec un trait de caractère interne ou un type de pensées ou de sentiments. Dans tous les autres cas, la haine d’une partie intrinsèque et naturelle de soi-même est reconnue comme une forme de haine de soi, mais lorsqu’il s’agit de la haine de son propre sexe biologique naturel, nous sommes convaincus qu’il ne s’agit pas d’une forme de haine de soi. Pourtant, c’en est une. C’est aussi un trouble psychologique et un défaut de caractère qui devrait être traité par des moyens psychologiques. Les personnes transgenres ne pourront gagner en épanouissement que si elles parviennent à comprendre les forces sociologiques qui les ont amenées à haïr leur sexe biologique naturel et à éprouver une dysphorie de genre, et si elles commencent à travailler pour changer la société qui les a amenées à ressentir ce conflit interne.
Souvenez-vous plutôt des choses dont je suis fier. Souvenez-vous de moi comme d’un intellectuel, d’un érudit et d’un bohémien. Souvenez-vous de moi pour mes réalisations intellectuelles, le fait que j’ai été un étudiant en doctorat, très près de l’obtenir ! Souvenez-vous de ma passion pour l’apprentissage et de mon intégrité intellectuelle. Souvenez-vous de moi pour la complexité de ma pensée et pour ma capacité à percevoir et à apprécier la subtilité et la nuance. Souvenez-vous de moi pour ma vaste connaissance d’une grande variété de sujets, y compris la sociologie, la psychologie, l’histoire, la religion, la littérature, l’art, la philosophie, la théologie, la musique populaire et la culture populaire. Souvenez-vous de mon amour passionnel de la musique, de l’art et de la littérature, de mon amour pour Dostoïevski, que j’ai commencé à lire à l’âge de quatorze ans, mais aussi pour Shakespeare, Charles Dickens, les sœurs Bronte, Aldous Huxley, Allen Ginsberg, Robert Burns, Ralph Waldo Emerson, Simone de Beauvoir, William Blake et un grand nombre d’autres auteurs, autrices et poètes. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui aimait lire des ouvrages universitaires difficiles et denses parce que j’appréciais le défi.
Souvenez-vous de moi pour mon individualité et mon anticonformisme. Souvenez-vous de moi pour mon amour passionné des Beatles, et pour être toujours un Beatlemaniaque 50 ans après. Souvenez-vous de moi pour avoir organisé une marche aux chandelles et une commémoration pour John Lennon le jour du premier anniversaire de sa mort. Souvenez-vous de moi pour avoir été un hippie depuis l’âge de quatorze ans et pour être resté fidèle à mes idéaux hippies pendant tout ce temps, même si certaines de mes convictions se sont atténuées au cours de cette période. Souvenez-vous de moi pour mon amour de la contre-culture des années 1960, pour ma défense des drogues psychédéliques et mon affection pour la marijuana. Souvenez-vous de moi pour mon amour de la nature et pour mon intérêt passionné pour le mysticisme. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui a vécu des choses inhabituelles, exotiques et bizarres. Souvenez-vous de moi pour mon mépris de ce qui est ordinaire, normal, ennuyeux ou conformiste. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui aimait les animaux, surtout les chats, et plus particulièrement les chats noirs.
Souvenez-vous de moi pour mon dévouement passionné aux causes sociales et pour le fait que je n’ai jamais suivi la ligne d’un parti idéologique, même celle élaborée par des causes que je soutiens en principe. Souvenez-vous de moi pour mon dévouement au féminisme de la deuxième vague et pour m’être élevée contre la version édulcorée et abrutie du féminisme qui se qualifie lui-même de « troisième vague ». Souvenez-vous de moi pour ma haine de toutes les choses qui oppriment les femmes, comme la pornographie, la prostitution, l’hypersexualisation, l’objectification sexuelle et les rôles de genre. Souvenez-vous de moi pour avoir été ouvertement néo-païen dans un séminaire chrétien pendant quatre ans, et pour avoir contesté toutes les affirmations de primauté chrétienne ou de dénigrement des païens que j’ai affrontées pendant cette période. Souvenez-vous de mon dévouement envers l’universalisme unitaire et le pluralisme religieux.
Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui ne supportait pas les imbéciles, qui détestait toutes les formes de prétention, d’arrogance, d’hypocrisie, de superficialité, de fausseté, d’hypocrisie et de dilettantisme. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui s’est toujours efforcé d’atteindre l’excellence dans tout ce que je faisais, qui croyait que tout ce qui vaut la peine d’être fait vaut la peine d’être bien fait. Souvenez-vous de moi pour ma haine du football et de toutes les choses vulgaires qui corrompent notre société et atrophient notre qualité de vie à tous, et pour avoir ouvertement exprimé cette haine, quelles qu’en soient les conséquences. Souvenez-vous de moi pour ma propension à juger les choses en fonction de leurs mérites propres, et non pas en fonction de leurs cohérences avec quelque idéologie ou ligne de parti. Souvenez-vous de moi pour ma volonté de changer mes croyances lorsque je les découvrais erronées, pour ma volonté d’admettre que j’avais tort, même lorsque cela remettait en question quelque chose que je croyais passionnément. Souvenez-vous de moi pour mon imagination, ma créativité, mon individualité et mon courage, ma volonté de dire ce que je pense, même lorsque cela m’a valu d’être vilipendé. Souvenez-vous de moi comme d’une personne qui a essayé de vivre aussi passionnément que possible et qui a défendu ses convictions. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui a enduré énormément d’adversité tout au long de sa vie, mais qui a lutté vaillamment contre toutes les circonstances qui l’ont opprimé et l’ont empêché de réaliser son plein potentiel. Souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui a consacré sa vie à essayer de vivre libre, quitte à mourir en cours de route. Mais surtout, souvenez-vous de moi comme de quelqu’un qui n’a jamais abandonné sa quête de vérité ou accepté une illusion confortable en lieu et place de la vérité.
Davina Anne Gabriel
4 janvier 2016
C’est une excellente idée de traduire et de publier ces deux textes limpides, rigoureux et émouvants. Ils disent à peu près tout ce qu’on peut dire d’intelligent et de sensible sur ce sujet. Merci.