Article iniÂtiaÂleÂment publié en anglais sur le site du GuarÂdian, en date du 23 janÂvier 2015.
ChrisÂtiane KlieÂmann est une jourÂnaÂliste alleÂmande, en FreeÂlance qui écrit pour difÂféÂrents médias, dont le GuarÂdian. Les sujets qu’elle aborde le plus souÂvent sont l’aÂprès-croisÂsance, les alterÂnaÂtives écoÂnoÂmiques, et les chanÂgeÂments sociéÂtaux. Elle est membre de l’orÂgaÂniÂsaÂtion interÂnaÂtioÂnale pour la décroisÂsance.
Oubliez Davos. L’heure est venue de créer un mouÂveÂment social qui mette la presÂsion aux gouÂverÂneÂments et aux entreÂprises afin que l’acÂcent soit mis sur la quaÂliÂté de vie pluÂtôt que sur la croisÂsance écoÂnoÂmique.
La nouÂvelle année débute à peine et nous sommes déjà subÂmerÂgés par des nouÂvelles horÂribles : deux nouÂveaux rapÂports ont accuÂmuÂlés des preuves du risque que l’acÂtiÂviÂté écoÂnoÂmique humaine fait peser sur la vie terÂrestre, et un autre nous a stuÂpéÂfait en expliÂquant que les 85 perÂsonnes les plus riches de la plaÂnète posÂséÂdaient autant que les 50% les plus pauvres – et que le fosÂsé se creuÂsait en perÂmaÂnence. Sans parÂler des attaques de CharÂlie HebÂdo, des guerres en cour au Moyen-Orient et en Ukraine, et de la situaÂtion catasÂtroÂphique des réfuÂgiés.
ParalÂlèÂleÂment, beauÂcoup d’efÂforts sont faits pour nous assuÂrer que la croisÂsance écoÂnoÂmique et que l’éÂcoÂnoÂmie capiÂtaÂliste sont essenÂtiels pour résoudre ce que cerÂtains appellent « la crise de civiÂliÂsaÂtion ».
La croisÂsance est le mot clé perÂpéÂtuel du forum écoÂnoÂmique monÂdial – de cette année comme des autres. Les repréÂsenÂtants nous assurent que leurs propres proÂfits sont vitaux pour la sauÂveÂgarde de l’huÂmaÂniÂté, tanÂdis que nous, les gens ordiÂnaires, contiÂnuons avec notre rouÂtine : nous conduiÂsons joviaÂleÂment nos voiÂtures, nous réserÂvons nos vols pour nos proÂchaines vacances et éleÂvons nos enfants comme nous l’aÂvons touÂjours fait.
Il semble que nous soufÂfrions de déni colÂlecÂtif vis-à -vis des impliÂcaÂtions menaÂçantes de la réaÂliÂté. Nous croyons touÂjours en cette vieille litaÂnie selon laquelle la croisÂsance et la comÂpéÂtiÂtion sont des bonnes choses, la techÂnoÂloÂgie et les experts répaÂreÂront tout et le capiÂtaÂlisme est la vicÂtoire ultime de l’hisÂtoire. Les limites écoÂloÂgiques, les inégaÂliÂtés sociales croisÂsantes, mais ausÂsi la vioÂlence en hausse des fonÂdaÂmenÂtaÂlistes de tous bords, nous indiquent qu’il est grand temps de mettre en place une nouÂvelle écoÂnoÂmie et une nouÂvelle strucÂture sociale. Une écoÂnoÂmie essenÂtielÂleÂment basée sur la comÂpéÂtiÂtion contiÂnueÂra à perÂpéÂtuer la vioÂlence et la haine.
[A ce proÂpos la préÂsenÂtaÂtion de NaoÂmi Klein lors des conféÂrences BioÂneers 2014 est intéÂresÂsante]:
Recherché : nouveau projet économique
Avant qu’un nouÂveau proÂjet – la décroisÂsance, par exemple – puisse adveÂnir, nous devons accepÂter qu’il ne reste plus que des options radiÂcales. Nous devons choiÂsir entre notre écoÂnoÂmie et notre futur.
Aujourd’Âhui même, la décroisÂsance attire de plus en plus de monde, comme l’a illusÂtrée la quaÂtrième conféÂrence interÂnaÂtioÂnale sur la décroisÂsance et pour la souÂteÂnaÂbiÂliÂté écoÂloÂgique et l’éÂquiÂté sociale, de l’an derÂnier, à LeipÂzig.
Elle englobe bien des aspects comÂmuns à un cerÂtain nombre d’initiative popuÂlaires sociales et écoÂloÂgiques à traÂvers la plaÂnète :
- IntéÂgrer les proÂblèmes sociaux et écoÂloÂgiques au lieu de les mettre en concurÂrence
- RemÂplaÂcer la croisÂsance écoÂnoÂmique par une idée holisÂtique de bien-être
- Se détourÂner de la proÂducÂtion qui surÂexÂploite les resÂsources et de l’aÂgriÂculÂture indusÂtrielle
- InsÂtauÂrer une démoÂcraÂtie réelÂleÂment parÂtiÂciÂpaÂtive et la co-créaÂtion
- PréÂféÂrer les petites soluÂtions décenÂtraÂliÂsées avec retours rapides, reloÂcaÂliÂser l’éÂcoÂnoÂmie et décenÂtraÂliÂser
- FavoÂriÂser l’auÂtoÂnoÂmie et la résiÂlience
- Créer des lieux de vies résiÂlients pluÂtôt que des emplois instables dans des chaines logisÂtiques monÂdiaÂliÂsées
Dans les cercles proches du « mainsÂtream », j’ai pu perÂsonÂnelÂleÂment obserÂver que criÂtiÂquer la dépenÂdance à la croisÂsance écoÂnoÂmique et appeÂler à une transÂforÂmaÂtion socio-écoÂloÂgique de l’éÂcoÂnoÂmie était bien accueilli par beauÂcoup.
Le doute et l’héÂsiÂtaÂtion sont issus du préÂjuÂgé répanÂdu selon lequel transÂforÂmer le sysÂtème serait irréaÂliste, vu les puisÂsants intéÂrêts des élites. Les gens ordiÂnaires se sentent sujets pluÂtôt que maitres de leurs cirÂconsÂtances. Afin que la persÂpecÂtive d’une sociéÂté de décroisÂsance soit accepÂtée larÂgeÂment comme réaÂliste, nous devons accepÂter les points suiÂvants :
- CroisÂsance et staÂbiÂliÂté cliÂmaÂtique sont incomÂpaÂtibles
- La croisÂsance perÂpéÂtuelle n’augÂmente pas la prosÂpéÂriÂté
- La croisÂsance va de toute façon bienÂtôt touÂcher à sa fin
- Après un cerÂtain point, les coûts écoÂloÂgiques et sociaux du mainÂtien de la croisÂsance sont inacÂcepÂtables
- Les schéÂmas de croisÂsance et de consomÂmaÂtion occiÂdenÂtaux sont de plus en plus réprouÂvés dans l’héÂmiÂsphère Sud
- Les « retomÂbées écoÂnoÂmiques » n’existent pas
- La « croisÂsance verte » n’existe pas non plus
- La décroisÂsance ne signiÂfie pas moins, mais difÂféÂremÂment, c’est-à -dire répondre aux besoins de chaÂcun de manière plus souÂteÂnable et équiÂtable en utiÂliÂsant moins de resÂsources
- La décroisÂsance n’est pas contre l’inÂnoÂvaÂtion techÂnoÂloÂgique, mais requiert son admiÂnisÂtraÂtion démoÂcraÂtique et basée sur le prinÂcipe de préÂcauÂtion

Il est temps de créer un mouvement social mondial
En dépit de ce que les intéÂrêts des corÂpoÂraÂtions nous racontent, nous pouÂvons tous comÂprendre qu’une bonne vie ne requiert pas plus de traÂfic, des maiÂsons plus grandes, et plus de gasÂpillage. On ne peut pas étuÂdier les bénéÂfices de « plus de trucs » alors que même que nos écoÂsysÂtèmes sont menaÂcés et que cela entraine une pauÂvreÂté extrême à cerÂtains endroits du globe.
Une bonne vie requiert que les besoins fonÂdaÂmenÂtaux de tous soient sécuÂriÂsés : nourÂriÂture, toit, affecÂtion, loiÂsirs, proÂtecÂtions, comÂpréÂhenÂsion, sanÂté, parÂtiÂciÂpaÂtion, créaÂtion et liberÂté. Toutes ces condiÂtions dépendent d’une plaÂnète saine.
Si nous preÂnons les valeurs occiÂdenÂtales – dont nous parÂlons sans cesse – au sérieux, il ne fait aucun doute que nous devons chanÂger nos modes de vies et nous assuÂrer que valeurs viennent avant les corÂpoÂraÂtions et le proÂfit.
Il est grand temps d’esÂquisÂser un vaste mouÂveÂment social qui metÂtrait la presÂsion sur les gouÂverÂneÂments et le monde du comÂmerce afin de modiÂfier les proÂducÂtions et la consomÂmaÂtion au bénéÂfice de tous. Nous vouÂlons la coopéÂraÂtion au lieu de la comÂpéÂtiÂtion, le bien comÂmun au lieu de l’inÂtéÂrêt des corÂpoÂraÂtions, la soliÂdaÂriÂté au lieu de l’aÂvaÂrice, des relaÂtions sociales fortes au lieu d’une consomÂmaÂtion insenÂsée, une gesÂtion intelÂliÂgente des resÂsources au lieu d’un extracÂtiÂvisme, et la comÂpasÂsion au lieu de l’inÂdifÂféÂrence. Nous vouÂlons moins de traÂfic, moins de méga-proÂjets et plus de règles basées sur les comÂmuÂnauÂtés.
Il est grand temps de prendre en main notre futur et de réaÂliÂser que notre sysÂtème écoÂnoÂmique actuel fait parÂtie du proÂblème et ne peut donc faire parÂtie de la soluÂtion.
ChrisÂtiane KlieÂmann
TraÂducÂtion : NicoÂlas CASAUX
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je fais suivre sur mon blog… sauf si ça pose proÂblème.
salut ami
Chère ChrisÂtiane, N’ayons pas un train de retard si nous vouÂlons vraiÂment nous en sorÂtir ; .…Soyons honÂnêtes : cela fait déjà quelques années que nous ne sommes plus dans un sysÂtème capiÂtaÂlisme, si nous l’aÂvons était un jour .… Voyez la docÂtrine et son appliÂcaÂtion … Moins d’éÂtat, voir pas d’éÂtat, tout se régule par l’offre et la demande .… Or, si on injecte des fonds monéÂtaires publics dans des orgaÂnismes banÂcaires priÂvées pour éviÂter leurs faillites, éviÂter que ces entreÂprises priÂvées souÂmises à la loi du marÂché norÂmaÂleÂment ne périÂclitent grâce à l’argent de chaÂcun, alors qu’eux via l’éÂvaÂsion fisÂcale n’ont pas contriÂbuaient au foncÂtionÂneÂment de l’éÂtat, donc à constiÂtuer ces fonds salÂvaÂteurs, nous ne sommes d’auÂcune manière sous un sysÂtème capiÂtaÂliste mais dans un sysÂtème d’oÂliÂgarÂchie, petit groupe de perÂsonnes qui s’enÂtendent entre eux pour tout diriÂger sans rien risÂquer, oliÂgarÂchie finanÂcières de quelques ultra riches finanÂciers. N’ayons pas un train de retard pour préÂpaÂrer le futur car cela donÂneÂrait un train d’aÂvance à l’oÂliÂgarÂchie pour nous contrer, à moins qu’on veuille leur simÂpliÂfier la tâche.… VériÂfions touÂjours nos sources et ayons conscience que de plus en plus de jourÂnaÂleux ont un job par cette oliÂgarÂchie qui contrôle de plus en plus la presse et ses posÂsibles déraÂpage .… cqfd.
PhoÂto de Eric MarÂtin.