Dans le texte qui suit, nous tentons de retranscrire en un seul article l'enquête récemment publiée, en 6 parties, par la journaliste canadienne Cory Morningstar, sur le site de son collectif "Wrong Kind Of Green" (Les mauvais verts ou La mauvaise écologie, en français).
Pendant que tous les yeux sont rivés sur le pipeline du Dakota Access, et sur le camp de Standing Rock, le pipeline de Sacagawea, également dans le Dakota du Nord, et actuellement en construction, ne semble intéresser personne.
Peu importe qu’il menace lui aussi les réserves d’eau potable de plusieurs villes du Dakota du Nord, puisqu’il menace l’intégrité et la propreté du lac Sakakawea. Peu importe que sa construction se déroule dans des conditions plus que douteuses et que Kenny Crase, un entrepreneur en construction de pipelines, se soit fait viré par la compagnie Boyd & Co (employée par la Sacagawea Pipeline Company LLC) après avoir exposé « des défauts dans le revêtement du pipeline qui pourraient l’amener à se déverser dans le réservoir ».
Pourquoi ce manque d’intérêt de la part des ONGs, pour un pipeline que même des ouvriers dénoncent ? Cory Morningstar et Forrest Palmer le résument ainsi : « Ce qui est sûr, c’est que ceux qui possèdent les médias (sans coïncidence aucune, les mêmes élites qui possèdent le Complexe Industriel Non-Lucratif, ou CINL) décident vers qui et vers quoi les projecteurs médiatiques sont tournés. Les défenseurs de la Terre amérindiens sont essentiellement ignorés, sauf lorsque cela sert les intérêts de l’élite. Plus simple encore. Les ONGs qui composent le CINL (Complexe Industriel Non-Lucratif) ne s’intéressent pas à ce pipeline – ni à la source d’eau dont ils prétendent tant se soucier – non seulement parce que les tribus amérindiennes (via Grey Wolf Midstream LLC) possèdent des parts dans le projet (environ 12%), mais aussi parce que ce pipeline sert les intérêts de Warren Buffet, à travers l’expansion de terminaux et d’infrastructure ferroviaire ».

Avant d’aller plus loin, il nous faut présenter un personnage clé de toute cette affaire : Warren Buffett. Warren Buffett est l’un des hommes les plus riches du monde. C’est un entrepreneur et investisseur états-unien, qui possède, à travers sa colossale holding Berkshire Hathaway, la compagnie de chemin de fer états-unienne Burlington Northern Santa Fe (BNSF), dont il est le principal actionnaire.
La BNSF est l’une des plus importantes entreprises ferroviaires des États-Unis. Seul le réseau de l’Union Pacific Railroad lui est comparable en taille.
Elle figure parmi les principaux acteurs du transport intermodal en Amérique du Nord. Elle est le premier réseau ferroviaire pour le transport de céréales, et transporte également assez de charbon pour produire environ 10 % de l’électricité produite aux États-Unis. Mais ce n’est pas tout, car elle transporte également du pétrole brut.
Les investissements de Buffett dans la BNSF sont ce qu’il appelle « un pari d’avenir ».
Ce que Cory Morningstar et Forrest Palmer soulignent, c’est que l’arrêt du pipeline du Dakota Access sert les intérêts de Warren Buffett, tout comme la construction du pipeline de Sacagawea. Pourquoi ?
Parce que le transport de pétrole par pipeline concurrence le transport de pétrole par train. Et parce que le pipeline de Sacagawea sera relié à un terminal ferroviaire desservi par la BNSF de Warren Buffett.
En effet, le pipeline de Sacagawea est détenu à 50% par la société américaine Phillips 66, spécialisée dans le gaz naturel et la pétrochimie, elle-même en partie sous le contrôle de Warren Buffet et de sa holding Berkshire Hathaway, et à 50% par l’entreprise Paradigm Energy Partners. Le terminal ferroviaire auquel sera relié le pipeline est détenu à 70% par la société Phillips 66, et à 30% par Paradigm Energy Transfers.
Lorsqu’on analyse la campagne contre le pipeline du Dakota Access, dont l’un des slogans clé est « l’eau c’est la vie », on peut alors se demander : quelle eau ? Quelle vie ? Les lacs importent tous, mais certains importent plus que d’autres, c’est ça ? Il en va ainsi du lac Sakakawea.
La production et l’infrastructure de transport du pétrole brut issu de la formation géologique de Bakken, dans le Dakota du Nord, continue leur expansion, elle-même accompagnée de dévastations écologiques et ethnocidaires.
La résistance des amérindiens d’Amérique contre divers projets nuisibles revêt de nombreuses formes, rappelons-nous :
« Estimant que leurs ancêtres ont été jadis spoliés par les colons qui se sont approprié de vastes ‘seigneuries’ pour les revendre ensuite aux Blancs, des autochtones repartent en guerre pour faire valoir leurs droits territoriaux. Les Mohawks, en partie venus de Kahnawake, d’Akwasasne et d’autres provinces du Canada, armés d’armes automatiques (AK-47, M16 et mitrailleuse Browning M2) ont occupé une forêt de pins abritant un cimetière d’Oka, village proche de Montréal. Le conflit a éclaté au printemps 1990 quand la municipalité a voulu agrandir un terrain de golf ainsi que vendre une partie des terres pour un projet domiciliaire en rasant une pinède centenaire. Or, cette pinède avait beaucoup de valeur pour les Agniers, l’utilisant comme terrain communautaire et ayant été plantée par leurs ancêtres cent ans plus tôt. Devant le refus des Amérindiens d’évacuer le terrain, les autorités donnèrent l’assaut au cours duquel un policier fut tué. Une partie de la communauté amérindienne a apporté son soutien aux ‘warriors’ (guerriers) d’Oka. À la fin d’août, à la demande du Premier ministre du Québec, le Royal 22e Régiment intervient et installe un véritable état de siège. Le 26 septembre 1990 les Warriors déposent les armes ».
Cory Morningstar et Forrest Palmer reconnaissent que les motivations qui ont poussé le CINL (le Complexe Industriel Non-Lucratif) à s’intéresser à Standing Rock ne sont pas entièrement claires : « Est-ce pour protéger les investissements de Warren Buffet dans le transport de pétrole par train (avec la BNSF), dans le contexte d’une économie déclinante… Ou est-ce parce que les ONGs qui constituent le CINL (fondé sur une idéologie de suprémacisme blanc) ne peuvent résister à l’opportunité de coloniser les peuples/nations indigènes restants, et n’ayant pas été assimilé par l’église ; ou peut-être qu’il ne s’agit que d’une simple expérience d’ingénierie sociale. Peut-être est-ce une expérience de masse pour voir s’il est possible d’imposer, aux nations indigènes, le dernier groupe d’individus que l’état craint encore, le crédo des méthodes d’action directe non-violentes (ADNV) comme seule manière de lutter contre la violence ou l’oppression étatique. Peut-être est-ce une expérience visant à renforcer un citoyennisme passif à travers l’entrainement et la formation à l’ADNV.
A l’aide des mêmes tactiques d’isolement, de systèmes de récompenses et de révisionnisme historique, encouragées encore et encore au cours des dernières décennies, à travers les ONG et les médias du CINL (avec une intensification après les émeutes de Seattle en 1999), le système d’hégémonie mondiale a‑t-il atteint son potentiel maximum de pacification et d’asservissement des masses libérales face au chaos planétaire qui se profile, tant au niveau du fascisme grandissant que de la menace écologique ?
Les mêmes méthodes de modification comportementale, d’ingénierie sociale, de conditionnement et d’endoctrinement religieux de sociétés entières peuvent-elle être utilisées pour contrôler et pacifier les peuples indigènes, qui incarnent une idéologie guerrière profonde (et enviable) ? Les premiers peuvent-ils influencer les seconds ? Peut-être la meilleure réponse est-elle que Standing Rock permet de faire d’une pierre trois coups : 1) Protéger les profits de la BNSF, 2) perpétuer la colonisation des peuples indigènes, 3) fournir un cadre d’étude expérimentale des impacts et des résultats des méthodes de l’ADNV sur les cultures non-anglaises, dans un contexte de propagation mondiale de ‘programmes’ d’ADNV par des ONGs. »
Une chose est sûre. Le syndrome du conformisme de type « pacifisme comme pathologie » continue de se propager :
« Au cours du briefing du 2 novembre dans le centre communautaire de Cannon Ball, Floberg rappela aux participants qu’ils avaient signé un serment selon lequel les évènements du 3 novembre à Standing Rock devaient être pacifique, par la prière, non-violent et légaux. D’autres ailleurs, appelaient à une approche frontale plus agressive » — Prière, pacifisme, posture non-violente de solidarité avec les Sioux de Standing Rock, 4 novembre 206
Afin d’illustrer comment la religion sert à endoctriner et à enrégimenter les plus défavorisés, soulignons que le révérend John Floberg, « est le prêtre en charge de la supervision de trois missions épiscopales dans la réserve de Standing Rock du Dakota du Nord ; il y a six autres églises missionnaires dans la partie de la réserve située dans le Dakota du Sud ».
Cory Morningstar poursuit : « Sans surprise, le fondateur de 350.org, Bill McKibben (un méthodiste laïc) entretient une relation étroite avec l’église Épiscopale. La colonisation et l’assimilation via des écoles pensionnats – où l’abus physique et psychologique était omniprésent – est considéré aujourd’hui comme une période horrible et honteuse de notre histoire collective, bien qu’elle ne prit fin qu’il y a à peine 60 ans. Et pourtant, lorsque ces mêmes idéaux sont refaçonnés en solidarité et diffusé par le CINL, la seule réponse est une adoration silencieuse de la part de ceux qui pensent que leur propre système de croyance culturel possède une certaine supériorité morale ».
Dans un article intitulé « Comptez-vous vous rendre à Standing Rock ? C’est le moment », publié le 24 octobre 2016 sur un site de l’université de Yale, on peut lire que :
« La formation était si instructrice, pas juste parce que ça m’a permis de regarder en moi, mais parce que j’ai aussi essayé de comprendre les choses du point de vue de l’oppresseur », explique Lopez. « Grâce à cette formation, j’ai réalisé qu’en m’engageant dans de l’ADNV (Action Directe Non-Violente), je pouvais directement me mettre à prier. Cela me rappela qui j’étais, et ce que je faisais là. Je me suis rappelé que la prière, la paix et l’amour peuvent nous porter plus loin que tout ».
Le 25 novembre 2016, dans l’article intitulé « Les gens se comportent à Standing Rock comme s’ils étaient à Burning Man [une rencontre pseudo-hippie pour riches privilégiés qui a lieu chaque année dans le désert du Nevada, aux USA, une soi-disant expérience culturelle qui finalement n’est qu’un rassemblement de fêtards venus polluer le désert, NdT], le camp a été envahi par des manifestants qui essaient de s’imbiber de ‘l’expérience culturelle’ », on apprend que :
« Ces inquiétudes ont été soulevées par des protestataires dans une série de Tweets et de posts Facebook. Selon eux, des gens viennent sur le camp de Standing Rock pour s’imbiber de ‘l’expérience culturelle’, et se comportent comme s’ils étaient à ‘Burning Man’ ou à un rassemblement de la ‘Rainbow Family’ [Famille ou communauté arc-en-ciel, en français]. J’en ai même vu plusieurs aller et venir dans les camps en comparant cela à des festivals. Avec des grands sourires ils s’attendaient à ce que nous leur donnions un collier ou un ‘nom’ indien, tandis que le leader du camp s’exprimait… La situation a tellement dégénéré qu’une lettre ouverte détaillant les règles du camp a circulé sur Twitter. Elle rappelait, face à ce nouvel arrivage d’individus, que le camp n’était pas ‘un lieu de vacances’. »
Un autre évènement important de la médiatisation de Standing Rock, à analyser, car très révélateur : le grand concert du 27 novembre 2016, intitulé « Stand with Standing Rock » [« Soutiens Standing Rock », en français] organisé à Washington DC., et sponsorisé par Ben & Jerry. Sur leur page Facebook, l’entreprise Ben & Jerry (filiale d’UNILEVER, une multinationale anglo-néerlandaise, présente dans plus de 100 pays, quatrième acteur mondial du marché de l’agroalimentaire) écrivait alors :
« Pose-toi, attrape une pinte, et soutiens la Tribu Sioux de Standing Rock dans son opposition au Dakota Access Pipeline. »
Dans son article Cory Morningstar passe ensuite en revue quelques scandales écologiques et sociaux dans lesquels trempe UNILEVER. Et il y en a. Entre pollutions au mercure et racisme ouvert lors de certaines de leurs campagnes.
Ben & Jerry est partenaire de l’ONU, de l’ONG 350.org, et d’Avaaz. Unilever est également partenaire de la compagnie sœur d’Avaaz : Purpose Inc. (une firme de marketing à but lucratif spécialisée dans l’ingénierie sociale, aussi appelé changement comportemental). Unilever et Purpose Inc. font partie de la coalition d’ONG et d’entreprises appelée « We Mean Business » (« Nous voulons faire des affaires », en français). Toutes ces liaisons sont importantes à connaître ; Cory Morningstar et Forrest Palmer les analysent et les dissèquent plus en profondeur dans leurs articles, mais, de toute manière, ces renseignements sont disponibles sur Internet, pour qui prend le temps de faire des recherches. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’à travers divers partenariats, alliances, et/ou coalitions, ces corporations et ONGs (Avaaz, 350.org, Purpose Inc., Unilever, Ben & Jerry, et bien d’autres) font finalement partie d’une même toile d’intérêts financiers.
Le 24 novembre 2016, plutôt qu’un dîner honorant la tradition américaine/colonial de « Thanksgiving », un dîner « de remerciement de la communauté des défenseurs de l’eau » fut organisé dans l’école de la communauté de Standing Rock, au sein de la réserve. Les glaces, pour le dessert, furent offertes par Ben & Jerry.
Parmi les entités sur lesquelles nous ne nous attarderons pas, mais qui font également partie de la toile d’intérêts financiers précédemment mentionnée, on retrouve le réseau « The Other 98% », qui co-gère, avec la « Standing Rock Sioux Tribe », la pétition contre le pipeline, proposée par Ben & Jerry sur son site.
« The Other 98% » a été fondé, entre autres, par Andrew Boyd. Andrew Boyd est une figure de proue de l’activisme médiatisé. Il s’est occupé de plusieurs campagnes d’activisme « satirique » dont « Billionaires for Bush » (« Des milliardaires pour Bush »), a co-fondé Agit-Pop Communications, une agence de communication « au service de la subversion », et a coordonné la « bible du militantisme créatif » (dixit Libération), intitulée Joyeux Bordel, tactiques, principes et théories pour faire la révolution, qui vient d’être publiée aux éditions Les Liens qui libèrent. A propos de ce livre, le journal Libération nous explique, dans un article intitulé « La contestation doit passer par des actions plus créatives et joyeuses », qu’il s’agit d’une « boîte à outils » qui « allie expériences cocasses et conseils pratiques pour un monde plus beau et plus rigolo ».
Libération présente Andrew Boyd comme un « vétéran » de l’activisme (et qui vient d’en publier rien de moins qu’une bible, rappelez-vous), un professionnel, pourrait-on dire. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais en ce qui concerne l’activisme, ces derniers temps, la réussite est plutôt mitigée. Dans le domaine de l’écologie, on pourrait aisément soutenir qu’il connait un échec retentissant et dramatique. Mais, comme toujours, l’appareil médiatique, appartenant au Complexe Industriel Non-Lucratif, nous refourgue ses « vétérans » et autres « pros » de l’activisme, comme si ces gens avaient quelques victoires réelles à leur actif, comme si les médias avaient intérêt à mettre en avant de véritables activistes subversifs, et dangereux pour l’ordre économique dont ils participent et dépendent. Rappelons quelque chose de crucial mais qui semble trop vite oublié : les médias de masse, obéissant tous à des intérêts économiques spécifiques, ne défendent pas, par définition, les intérêts des peuples et/ou de la planète. S’il arrive qu’ils publient un article non ou peu biaisé de temps à autre, en règle général, c’est plutôt l’inverse.
Par souci de concision, nous avons choisi de ne pas traduire entièrement, dans cet article, la liste édifiante et interminable d’ONGs, de corporations, de businessmen, de réseaux et d’alliances exposée par Cory Morningstar et Forrest Palmer dans leur série de reportages sur Standing Rock (avez-vous connaissance du rôle du projet « Climate Ribbon » ? De celui du réseau « Beautiful Trouble » ? Des liens entre « Beautiful Trouble » et 350.org ? De l’ONG « Backbone Campaign », de son rôle et de ses liens avec 350.org ? Du rôle et de l’objectif de la « Global Campaign for Climate Action (GCCA) » [en français, « Campagne mondiale d’action pour le climat »] et de sa vitrine publique TckTckTck ? Et ainsi de suite, ad nauseam). Rappelons simplement que Dominique Guillet, de Kokopelli, a écrit un des seuls articles disponibles en français et s’intéressant à un des protagonistes de cette vaste toile d’intérêts, l’ONG Avaaz.
A propos, le co-fondateur d’Avaaz, Jeremy Heimans :
Le journalisme d’investigation, s’il a jamais existé en France, est désormais quasi-inexistant. Aucun média même autoproclamé « indépendant » ou « alternatif » ne s’intéresse à ce sujet, pourtant crucial, du fonctionnement des ONGs, de leur création, de leur rôle dans l’ingénierie sociale, de leurs liens avec les corporations, les fondations, et les agences de renseignement secrètes qui continuent, encore aujourd’hui, de façonner l’économie mondiale (très franchement à part le blog les-crises.fr et le site legrandsoir.info, et sachant que nous n’en approuvons pas la totalité des publications, nous ne saurions quoi vous conseiller ; et, non, Basta Mag et Reporterre, s’ils publient de temps en temps un article pertinent, restent sur des lignes superficielles, flirtant trop souvent avec l’écologie capitaliste).
Et pourtant les ONGs sont aujourd’hui partout, comme le souligne Arundhati Roy, une auteure et activiste indienne qui s’intéresse particulièrement à cette problématique et dont nous avons traduit et publié plusieurs textes :
« La plupart des ONG sont financées et patronnées par les agences d’aide au développement, qui sont à leur tour financées par les gouvernements occidentaux, la Banque mondiale, les Nations unies et quelques entreprises multinationales. Sans être identiques, ces agences font partie d’un ensemble politique aux contours flous qui supervise le projet néolibéral et dont la demande prioritaire est d’obtenir des coupes drastiques dans les dépenses gouvernementales ».
Quelques statistiques : « On estime qu’il y a 10 millions d’organisations non gouvernementales (ONG) dans le monde entier. […] Si les ONG étaient un pays, elles auraient la 5ème plus grande économie dans le monde. […] Avec plus de 3,3 millions d’organisations non gouvernementales, l’Inde a environ une ONG pour 400 personnes. […] En 2015, il y avait 136.453 organisations non gouvernementales enregistrées en Afrique du Sud et, en moyenne, 68 nouvelles ONG sont enregistrées chaque jour ».
Rappelons-nous également que la Central Intelligence Agency (CIA) finançait, pendant la guerre froide, à l’étranger (en France aussi), des syndicats, des organisations culturelles, des médias, ainsi que des intellectuels réputés, à l’aide de « fondations américaines connues, mais aussi d’autres entités créées dans cet objectif et n’existant que sur le papier ». Parmi elles, les fondations Andrew Hamilton, Bacon, Beacon, Borden Trust, Carnegie, Colt, Chase Manhattan, Edsel, Ford, Florence, Gotham, Hobby, Hoblitzelle, Kentfield, Josephine and Winfield Baird, J.M. Kaplan, Lucious N. Littauer, M.D. Anderson, Michigan, Rockefeller, Ronthelyn Charibable Trust, Shelter Rock, Price, etc.
Revenons-en au domaine de l’écologie, et précisons : au sein des diverses grandes ONGs environnementales (Greenpeace, 350 & Co.), si les militants et les membres qui en constituent la base s’opposent peut-être ouvertement aux pratiques destructrices et au règne des multinationales, voire à leur existence, plus on monte dans la hiérarchie, plus le discours sera nuancé, jusqu’au sommet, où leurs dirigeants, pour beaucoup, parlent de « partenariat », de « travailler avec », « d’œuvrer ensemble », bref, où l’opposition s’efface pour laisser place à une sorte de volonté de « coopérer ». (Ceci explique largement l’incapacité des ONGs écologistes à ne serait-ce qu’entraver l’augmentation (la croissance) des destructions environnementales).
La raison en est simple : le financement — comme le rappelle Arundhati Roy plus haut — dont dépend l’existence même de ces grandes ONGs, et qui dépend lui, en partie, et plus ou moins directement (parfois par fondations interposées) des corporations auxquelles elles s’attaquent (ou font mine de). D’où le problème, et l’impossibilité logique et technique pour ces grandes ONGs de porter un discours véritablement offensif, subversif, ou menaçant véritablement le statu quo institutionnel de notre temps.
L’ONG 350.org a entre autres été financée et fondée grâce à l’argent des Rockefeller et de la Tides Foundation (elle-même financée par Warren Buffett). Lors du concert en faveur de Standing Rock sponsorisé par Ben & Jerry, on pouvait voir 4 « actions » de soutien proposées sur benjerry.com, la première étant de signer la pétition mise en ligne sur le site de 350.org.
Ce dont il faut donc se rendre compte, c’est que la médiatisation de Standing Rock s’est accompagnée d’une récupération par diverses ONGs, opérée avec l’aide des différents médias, et que médiatisation et récupération vont bien souvent de pair.
A travers cette médiatisation et cette récupération s’opère également un renversement des valeurs et des aspirations ayant initié la lutte. La société du spectacle utilise à cet escient d’autres membres de sa toile d’intérêts financiers : les célébrités.
C’est ainsi que Leonardo DiCaprio produit un documentaire sur le réchauffement climatique (visant à sauver la civilisation et le mode de vie hautement technologique des occidentaux, et pas la planète), et qu’on le voit poser avec les responsables de 350.org. Le Complexe Industriel Non-Lucratif a toujours procédé ainsi, braquant ses projecteurs médiatiques sur Gandhi plutôt que sur Kartar Singh, sur Martin Luther King plutôt que sur Malcolm X, sur Angela Davis plutôt que sur Assata Shakur, sur Vandana Shiva plutôt que sur Arundhati Roy.
L’histoire telle qu’elle nous est présentée dans les programmes scolaires officiels reflète également ces préférences idéologiques (ou économiques, les premières se distinguent parfois mal des dernières), très logiquement ; les Sante Geronimo Caserio, les Omali Yeshitela, les Ken Saro-Wiwa, les Bhagat Singh et les Stokely Carmichael n’y trouvent pas leur place.
L’enquête de Cory Morningstar continue. Mais avant de reprendre, un rappel important : nous avons publié, sur notre site, plusieurs articles exposant en quoi les énergies dites « renouvelables », en plus de n’être pas écologiques, à l’instar de leurs homologues du nucléaire et des combustibles fossiles, ne servent certainement pas à débuter une transition vers une civilisation aux pratiques moins polluantes, encore moins à entamer la décroissance tant espérée (par des écologistes, cela s’entend, certainement pas par la majorité des habitants des pays dits « développés » ou « en développement »), et encore moins à défendre la planète contre l’assaut constant de la civilisation. Au contraire, le développement des industries du solaire, de l’éolien, de l’hydroélectrique et de la biomasse servent, comme tous les projets dudit « développement » (qu’il s’agisse de l’industrie des combustibles fossiles ou de celle du nucléaire), les intérêts des corporations et de ceux au pouvoir, les intérêts du dieu production et ceux du dieu progrès technique, toujours au détriment du monde naturel et des espèces non-humaines.
Ce qui nous amène à une autre organisation, intitulé « The Solutions Project » (en français, Le projet solutions), « créé en 2011 par des personnalités éminentes du domaine des sciences, du business et des médias du divertissement, dans le but d’utiliser les efforts combinés d’individus dans les domaines des sciences, du business et de la culture pour accélérer la transition vers 100% d’utilisation d’énergie renouvelable aux États-Unis ». Une organisation financée, entre autres, par Elon Musk, Leonardo DiCaprio et Mark Ruffalo. La vidéo de présentation du projet est narrée par Jason Silva, un « futuriste » états-unien, qui, pour vous donner une idée du personnage et de l’idéologie du milieu, proclame de manière extatique à propos de l’être humain et de sa technologie : « Nous sommes des dieux. Nos outils font de nous des dieux ».
Mark Ruffalo, célèbre acteur états-unien made in Hollywood, s’est d’ailleurs rendu à Standing Rock, ce qui a à la fois servi à médiatiser la lutte comme à la pacifier, puisqu’il s’est fendu d’un discours paternaliste, dans lequel il exhortait les protestataires à rester « pacifique », en expliquant que « la chose la plus importante est de rester pacifique. Que nous n’adoptions pas la violence du système qu’il utilise contre nous [sic]. Parce que si vous adoptez cette violence vous devenez ce système [re-sic] et parce que chaque mouvement social qui est resté pacifique et sans violence a fini par triompher [re-re-sic]. A chaque fois que la police vous attaque avec des balles en caoutchouc ou avec des matraques, ou vous met dans des cages à chien et vous traite comme un animal, elle perd [re-re-re-sic]. A chaque fois que la garde nationale joue le rôle d’extension de l’industrie des combustibles fossiles et ne se bat pas pour le peuple, elle perd. Ils perdent lorsque vous restez pacifique. Et c’est dur. C’est très, très dur. Mais c’est ainsi que vous gagnez ».
Pour des amérindiens issus de traditions guerrières et courageuses, incarnées par Sitting Bull et Crazy Horse, entendre un blanc, riche, ultraprivilégié, ayant investi dans l’industrie des soi-disant « renouvelables », leur faire une lecture sur la stratégie de lutte à adopter pour « gagner », quel honneur, n’est-ce pas.
On observe là « le fétichisme de la célébrité au service du paternalisme de l’élite, visant à pacifier les luttes sociales et écologiques », comme l’écrit Cory Morningstar.
Aucun mouvement social, aucune lutte populaire, n’a abouti à l’aide de l’usage d’une seule et unique tactique. Si tant est que certaines luttes aient triomphé (ce qui est à nuancer), elles y sont parvenues à l’aide d’une diversité de tactiques. Mais, bien sûr, on n’en attendait pas plus de la part d’un promoteur d’une des pires formes de spectacle de la société du spectacle, qu’un discours creux, et mielleux.
Un point central de ce qu’expose Cory Morningstar consiste en une critique de « l’activisme marchandise ». Il s’agit du titre d’un livre en anglais, jamais traduit, qu’elle cite dans son enquête, et dont voici le texte de la 4ème de couverture :
Acheter des produits — des T‑shirts Gap aux appareils Apple — pour combattre le SIDA. Boire une tasse de café “solidaire” de la marque Coffee Bean & Tea pour soutenir le commerce équitable. Conduire une Toyota Prius pour combattre le réchauffement climatique. Toutes ces activités très répandues exposent une caractéristique centrale de la culture contemporaine : la façon la plus commune dont nous participons à l’activisme social consiste à acheter quelque chose.
Roopali Mukherjee et Sarah Banet-Weiser ont rassemblé un groupe de chercheurs pour explorer ce nouveau concept à travers une série d’études cas sur “l’activisme marchandise”. Qu’il s’agisse de télévision, de films, de campagnes d’activisme consommable, de la culture de la célébrité et du patronage corporatiste, les essais compilés dans ce livre analysent, par exemple, la campagne Dove “Beauté Réelle”, ou Angelina Jolie en tant que missionnaire et célébrité mondiale.
Cette marchandisation de l’activisme a largement participé à la récupération et la pacification des luttes sociales et écologiques, aux côtés de la corruption financière plus directe.
Le 5 avril 2016, la Standing Rock Sioux Tribe [l’organisation juridique qui représente la tribu Sioux de Standing Rock, NdT] a accepté un don de 125 000$ de la part de la Consolidated Edison, Inc., l’une des plus grandes sociétés du secteur de l’énergie aux États-Unis, avec un chiffre d’affaires annuel de 13 milliards et des actifs de 33,9 milliards de dollars, dans l’optique d’un projet privé de logement communautaire.
Le même jour, la Standing Rock Sioux Tribe a accepté deux dons de 125 000$ chacun, le premier de la part de la même entreprise, Consolidated Edison, et le second de la part de Fagen Inc, une entreprise de travaux industriels, et ce dans une optique de coopération avec la tribu pour un projet de construction d’un parc de 55 éoliennes, dans le Dakota du Sud.
Le leader de la Standing Rock Sioux Tribe a récemment annoncé, après l’annonce d’une pause dans la construction du pipeline par le Corps du génie de la US Army (Army Corps of Engineers, ACE), pour des raisons administratives, qu’il souhaitait que tous les manifestants rentrent chez eux. Il a également affirmé qu’il voulait que la lutte se déroule de manière strictement pacifique, sans aucune violence, et qu’une diversité de tactiques n’était ni respectable ni voulue.
Plusieurs tribus, groupes et camps étaient regroupés sur le site de Standing Rock (et le sont encore pour certains). Le camp de la Red Warrior Society a publié un communiqué en décembre, dans lequel il exprimait un désaccord avec le leader de la Standing Rock Sioux Tribe, Dave Archambault, en affirmant son soutien envers une diversité de tactiques dans la lutte, et en incitant tous ceux qui le pouvaient à rester pendant l’hiver.
Un de nos contacts, un vétéran de l’armée US, qui s’était rendu à Standing Rock, nous rapportait également cet état de fait. Entre les tribus, entre les générations, différents point de vue s’expriment. Le pacifisme absolu semble plus prôné par les « Anciens » des tribus Indiennes, tandis que les jeunes souhaitent parfois considérer plus d’options et de stratégies.

Dans la conclusion de leur enquête, Cory Morningstar et Forrest Palmer résument leur analyse des détournements et des écrans de fumée dont la « révolution pour des énergies propres » se sert. Le mouvement de masse visant à regrouper et à canaliser la génération Y (les « millenials ») et les citoyens bien intentionnés afin qu’ils acceptent le 21ème siècle et ses chambardements n’a pas pour objectif de faire cesser la dépendance aux combustibles fossiles, seulement à en transformer l’esthétique. Des profits sont toujours engrangés, mais au détriment de qui ? L’activisme manufacturé (marchandise) prospère au niveau des ONG, des corporations et de l’individu et bénéficie aux loups déguisés en moutons que sont les directeurs exécutifs, les dirigeants de fonds d’investissement, les philanthropes et les investisseurs privés… tous des profiteurs d’une manière ou d’une autre. La guerre corporatiste est menée à l’aide des formes de soft power (le pouvoir doux, en français) les plus insidieuses qui soient. Le complexe industriel non-lucratif est l’antichambre de ces mécanismes de soft power. Collectivement, la société occidentale a été endoctrinée afin de prendre l’écocitoyennisme pour de l’écologie, la plupart de ses activistes défendent plus l’industrialisme « vert » et les énergies dites « renouvelables » que le monde naturel. Il est tout à fait possible qu’il s’agisse à ce jour d’un des exemples les plus réussis d’ingénierie sociale, parmi tous ceux financés par les oligarques mondiaux les plus puissants.
L’écologie est morte. Place à l’écocitoyennisme du 21ème siècle.
Le but n’est plus de protéger la nature et toutes les créatures vivantes. Au contraire, l’objectif est désormais de privilégier la technologie au détriment du monde naturel et du vivant. De soutenir une « révolution pour les énergies propres », aux frais du peu qu’il reste de nature et de vie non-humaine, et au bénéfice de la satisfaction des désirs des civilisés. En ce sens, les sociétés occidentales ont collectivement involué et se retrouvent au plus profond de l’abîme. Pourtant, endoctrinement oblige, peu le remarquent. Comme toujours, les jeunes sont ciblés et apprêtés, en agneaux sacrificiels pour la continuation du capitalisme.
Portez du bleu. Portez du rouge. Portez du jaune. Participez à des opérations photo. A des opérations commerciales. Des artifices amusants pour les masses des privilégiés, qui s’ennuient. Ceux dont les métriques sociales sont les plus élevées seront les plus financés. C’est une course. Une course vers l’abîme.





L’activisme, il y a bien longtemps :

Enfin, quelques images assez parlantes, afin d’exposer l’objectif déclaré de l’activisme tel qu’organisé par les grandes ONG, et surtout, en l’occurrence, par l’ONG supposément écologiste (mais véritablement écocapitaliste) la plus en vogue en ce moment, qui, venu des USA, se propage rapidement à l’international (des filiales ouvrent dans plusieurs pays), grâce à l’argent des Rockefeller et de Warren Buffett : 350.org
Retour sur les Bishnoïs, voyez la différence :

Et on reprend :



« Il faut montrer qu’il existe d’autres investissements plus porteurs d’avenir, le solaire et l’éolien par exemple ». (350 France – Nicolas Haeringer)
« Le Brésil a un grand potentiel pour la génération de 100% d’énergie renouvelable, d’énergie sûre et équitable comme le solaire, l’éolien et la biomasse ». (350 Brésil et Amérique Latine – Nicole Figueiredo)
« L’Australie est le pays qui a le plus à gagner à passer au solaire, à l’éolien, à l’hydroélectrique et au géothermique ». (350 Australie – Blaise Palese)
Et la plus belle, du fondateur et directeur de 350.org, Bill McKibben
« Mettre en place plus de panneaux solaires et d’éoliennes ne sonne peut-être pas comme une guerre, mais c’est exactement ce qui nous a permis de remporter la seconde Guerre Mondiale : ce ne furent pas les invasions massives et les brutales batailles de tanks et les féroces bombardements aériens, mais une réorganisation totale de l’industrie nécessaire à la fabrication des armes et au ravitaillement des troupes à une échelle sans précédent. Vaincre les nazis a nécessité plus que de braves soldats. Il a fallu construire d’immenses usines, et les construire très, très vite ».
Il s’agit clairement d’une volonté de soutenir un nouvel industrialisme. Mais un industrialisme étiqueté « vert », « propre », « durable », « soutenable », ou « renouvelable », bien sûr.
Bill McKibben, le fondateur de 350, est d’ailleurs assez proche des partisans du capitalisme vert, comme John Fullerton, un ancien directeur général de la banque JP Morgan, qui dirige aujourd’hui le « Capital Institute », et qui prône un « capitalisme régénératif ». Ils ont tous deux participé, par exemple, à une conférence intitulé « capitalisme vert : oxymore ou possibilité ? » (la réponse : possibilité, bien sûr). Il est également proche de Bob Massie, un ancien PDG de la coalition d’entreprises CERES, et actuel PDG du « New Economics Institute », formé à la « Harvard Business School ».
Résumons, voici plusieurs choses que les médias français, qui se sont empressés de nous vendre une « victoire » à Standing Rock, n’ont pas dit, ou rarement :
- Il ne s’agit que d’une suspension temporaire (ça, certains l’ont rapporté), qui bénéficie, en attendant, au transport de pétrole par réseau ferroviaire, de Warren Buffett (entre autres).
- Les Indiens à Standing Rock ne sont pas aussi unis qu’ils l’ont laissé entendre.
- Comme lors de nombreux évènements de luttes sociales ou écologiques, les grandes ONGs se sont empressées de récupérer la lutte, de la détourner vers certains objectifs, ou de l’inscrire dans le cadre de leur agenda (350.org France, dans leur newsletter de décembre 2016, classe la « victoire » de Standing Rock dans la liste de ses succès de l’année).
- Bien des Indiens, aux USA, sont au courant de la corruption des organisations, des délégations et des médias « Indiens » qui les représentent supposément (celles qu’on voit parfois à l’ONU, celles qui sont invitées aux COP, etc.).
- Le leader de la tribu Sioux de Standing Rock, Dave Archambault a clairement exprimé que tout ce qu’il souhaitait c’était que le pipeline soit « détourné ».
- Les grandes ONGs et les tribus indiennes (et/ou les individus qui initient certaines luttes écologiques ou sociales) ne s’associent pas toujours bien, au contraire.
- Les grandes ONGs et les tribus indiennes (et/ou les individus qui initient certaines luttes écologiques ou sociales) n’ont pas toujours, voire pas du tout, le même objectif, qu’il s’agisse de l’objectif immédiat ou de l’objectif plus large et à long terme.
- Les Premières Nations, les tribus Amérindiennes, et les indigènes du monde sont parfois (souvent) utilisés par les grandes ONGs et les médias pour promouvoir le mensonge du développement « durable ».
Pour les grandes ONGs, comme pour les célébrités (et pour les ultra-privilégiés en général, ainsi que pour ceux dont l’endoctrinement les a menés à adopter la perspective des premiers) qui défendent la civilisation industrielle sans laquelle ils ne seraient ce qu’ils sont et ne bénéficieraient de ce dont ils bénéficient, la crise écologique de notre temps est « la plus grande opportunité économique de l’histoire [des USA] » (dixit Leonardo DiCaprio). Il ne s’agit pas de protéger la biodiversité restante, ni le peu de nature sauvage qu’il reste, ou de défendre la planète, il s’agit de soutenir l’implantation de nouvelles centrales solaires, parcs éoliens, barrages, et centrales à biomasse, qui représentent une nouvelle opportunité de croissance (mais « verte », rassurez-vous), à même de soutenir le mode de vie hautement extractiviste, technologisé, inégalitaire, polluant et aliénant de la civilisation industrielle. Sachant que ces nouveaux projets industriels sont toujours le fait de grandes corporations ou de grands groupes qui investissent par ailleurs dans nombre d’autres secteurs nuisibles, toujours en expansion.
Ce détournement grotesque du mouvement écologiste a été opéré de manière insidieuse à l’aide d’une propagande médiatique et culturelle massive. Un discours simpliste a été diffusé et encouragé, n’analysant plus rien des mécanismes politiques et économiques en jeux, des multiples causes des pollutions et des destructions écologiques (l’extractivisme et ses conséquences, les pollutions chimiques, etc.), ne tenant pas compte ni ne discutant des phénomènes d’aliénations, de la perte d’autonomie, ignorant tout à fait la corporatocratie mondiale, la déplétion des ressources naturelles, pour ne se contenter que de de soutenir les industries des « renouvelables ».
Bien évidemment, les puissances économiques (corporations, conglomérats, états qu’on qualifie de « superpuissances ») qui ont façonné l’humanité industrielle au sein de laquelle nous vivons — qui ne se préoccupent que de gagner toujours plus d’argent et de pouvoir, et d’encourager un progrès technologique insensé, toujours plus aliénant, et sans autre objet que lui-même — n’ont pas intérêt à ce que nous en discutions. Les médias de masse et les grandes ONGs, qu’elles possèdent, qu’elles financent, qu’elles ont littéralement créés, ainsi que la culture, dans son sens large, dans laquelle nous baignons (littérature, cinéma, musique, etc.) reflètent logiquement leurs préoccupations. La médiatisation de Standing Rock a été l’occasion pour nous de tenter de l’exposer.
Une enquête de Cory Morningstar & Forrest Palmer, retranscrite par le Collectif Le Partage